Le
gaspillage
Sédir
On devrait réfléchir à la somme de travail, d'essais,
infructueux, et d'ingéniosité qui turent nécessaires
pour fabriquer les mille petites choses que nous gâchons ; combien
d'énergies ont été mises en oeuvre pour que nous puissions
goûter un morceau de pain. Si, le soir, on récapitule la journée,
que de forces dépensées inutilement ; que d'objets jetés,
de nourriture perdue, de paroles oiseuses, de mouvements sans raison, de
rêveries sans but que de forces détruites par caprice ou par
désoeuvrement.
La Nature nous tient compte de tout ; d'une fleur brisée, comme d'un
geste vaniteux. Tous ses dons, nous en sommes comptables ; qu'on les laisse
improductifs, qu'on en mésuse ou qu'on les dilapide, le résultat
futur sera identique. Celui qui jette du pain au ruisseau se condamne lui-même
à souffrir de la faim ; celui qui maltraite ou exténue ses
animaux, se condamne à n'avoir plus de quoi les nourrir un jour ;
celui qui dépense sa force physique, ou son intelligence sans motif,
se la verra reprendre.
Le moyen de pallier les conséquences de notre étourderie,
c'est d'établir un contrôle sur nous-mêmes, de faire
chaque chose en son temps, de ne jamais perdre de vue que nous sommes partie
intégrante d'un grand tout ; l'Invisible nous relie les uns aux autres
bien plus intimement encore que les cellules de notre corps physique entre
elles ; rien ne se perd des énergies que nous émettons ; rien
n'est sans valeur de ce que la Nature , ou la société met
à la portée de notre main.
Règle : Être économe pour soi et généreux
pour les autres.
(Extrait du Bréviaire mystique, 1909.)