LA SOUFRANCE
par PAPUS
La souffrance terrestre est bénie car elle constitue le grand moyen de rachat et le seul mode de paiement des fautes pour les esprits incarnés.
Aussi, bien imprudent est-il celui qui veut éviter la souffrance ; il ne lui reste qu'une issue, révélée par le Bouddha, c'est la délivrance progressive et consciente des attractions de la vie. Voilà pourquoi la voie révélée par le Christ est la seule divine. Loin de fuir la vie il faut, au contraire, en accepter toutes les responsabilités et toutes les charges, avec calme et fermeté ; et pour cela il faut savoir souffrir , sans révolte et avec reconnaissance pour Celui qui n'abandonne jamais ceux qui s'abandonnent à lui.
L'aveuglement des hommes empoisonnés de rationalisme matérialiste, est tel qu'ils se figurent éviter la souffrance par la possession des richesses. La douleur change d'aspect chez les riches et s'élève du plan physique au plan sentimental, puis au plan mental. Elle s'affine, s'aiguise, s'exaspère et s'affirme d'autant plus terrible qu'elle échappe davantage à la puissance satanique de l'argent. Les millions ne gardent ni de la maladie, ni des déchirements du coeur, ni de la perte brusque des enfants, et ils apportent avec eux tant de ferments d'égoïsme et tant de graines de châtiments futurs, que l'homme sage doit bénir le ciel qui lui évite de si redoutables soucis d'aveuglement. C'est dans la détermination des plans et de leurs divines réactions douloureuses que réside cette science de la souffrance qui mène à la porte fermée de la réincarnation consciente.
C'est au moment où ton organisme dompté, se plie aux ordres de l'Esprit, où ton mental conscient de sa puissance, évoque, à ton désir, les images du passé et les linéaments de l'avenir, c'est à l'instant où fier de ta royauté spirituelle, tu vois la maladie et le malheur s'éloigner quand ton Verbe l'exige ; c'est alors que l'orgueil insidieux t'envahit et que tu t'écries : "l'homme est dieu, il ne doit pas s'humilier, il ne doit se courber devant rien, car rien ne saurait lui commander".
Oublies-tu donc que la richesse mentale exige des devoirs autrement plus sérieux que la richesse matérielle ; oublies-tu que l'homme n'est réellement digne de monter que s'il sait descendre, et qu'une pierre qui aspire au choc douloureux d'où jaillira le feu de son âme, est plus proche de la lumière que l'intellectuel, aveuglé par l'orgueil de se croire quelqu'un, devant Celui qui est Tout ? Laisse parler les ignorants et les vaniteux, laisse-les exalter la science humaine et les lois aveugles du Destin ; humilie-toi, écrase d'un coup ton orgueil, prosterne-toi et prie pour eux.
Prie pour ceux qui souffrent et qui ne savent pas souffrir ; prie pour ceux qui voient et qui ne savent pas voir ; prie pour toi-même car la prière est le pain quotidient donné par le Ciel au pauvre exilé de la Terre.
Tiré de l'ouvrage : Le Maître Philippe de Lyon du Dr Encausse.