EMMANUEL
SWEDENBORG
TRAITE DES REPRESENTATIONS ET DES CORRESPONDANCES
Traduit du latin par J.-F.-E. LE BOYS DES GUAYS (1857)
DE
LA CORRESPONDANCE DES SENS EN GENERAL
AVEC LE TRES-GRAND HOMME
4318. Le principal de l'intelligence, pour les Anges, c'est de savoir et de percevoir que toute vie procède du Seigneur; puis aussi que tout le Ciel correspond au Divin Humain du Seigneur, et conséquemment que tous les Anges, tous les Esprits, et tous les Hommes correspondent au ciel ; puis encore de savoir et de percevoir en quelle qualité ils correspondent : ce sont là les principes d'intelligence, dans lesquels les Anges sont plus que les hommes ; par là, ils savent et perçoivent les choses innombrables qui sont dans les cieux, et par suite aussi celles qui sont dans le monde, car celles qui existent dans le monde et dans la nature du monde sont des causes et des effets provenant des choses du ciel comme principes ; en effet, toute la nature est le Théâtre représentatif du Royaume du Seigneur.
4319. Il m'a été montré par de nombreuses expériences
que non seulement l'homme, mais l'esprit et même l'ange, ne pense
rien, ne prononce rien et ne fait rien d'après lui-même, mais
que c'est d'après d'autres, et ces autres d'après d'autres
encore, et non d'après eux-mêmes, et ainsi de suite, et qu'en
conséquence tous et chacun pensent, parlent et agissent d'après
le Premier de la vie, c'est-à-dire d'après le Seigneur, quoiqu'il
semble absolument que ce soit d'après eux-mêmes : cela a été
très souvent montré aux Esprits qui, dans la vie du corps,
ont cru et se sont confirmés que toutes choses étaient en
eux, ou qu'ils pensent, parlent et agissent d'après eux-mêmes
et d'après leur ame, dans laquelle la vie apparaît insitée
: il leur a été aussi montré par de vives expériences
- telles qu'il en est donné dans l'autre vie sans qu'il puisse en
être donné dans le monde, - que les méchants pensent,
veulent et agissent d'après l'enfer, et les bons d'après le
ciel, c'est-à-dire d'après le Seigneur opérant par
le Ciel ; et néanmoins les maux et aussi les biens semblent provenir
d'eux : c'est ce quesavent les Chrétiens par le Doctrinal qui est
tiré de la Parole, à savoir que les maux proviennent du diable,
et que les biens procèdent du Seigneur, mais il en est peu quile
croient ; et parce qu'ils ne le croient point, ils s'approprient les maux
qu'ils pensent, veulent et font ; mais les biens ne leur sont point appropriés,
car ceux qui croient que les biens proviennent d'eux les revendiquent et
se les attribuent, et ainsi placent en eux le mérite ; on sait aussi
par le doctrinal dans l'Eglise que personne ne peut faire le bien par soi-même,
de telle sorte que tout ce qui provient de l'homme et de son propre est
le mal, de quelque manière que cela se présente comme bien
; mais il en est peu aussi qui le croient, quoique ce soit la vérité.
Il y avait des méchants qui s'étaient confirmés dans
cette opinion qu'ils vivent par eux, et qu'en conséquence tout ce
quils pensent, veulent et font provient d'eux ; quand il leur fut montré
que la chose se passe absolument selon le doctrinal, ils dirent : maintenant,
nous croyons ; mais il leur fut répondu que savoir n'est pas croire,
et que croire est interne, et que cet interne ne peut exister que dans l'affection
du bien et du vrai, par conséquent non chez d'autres que chez ceux
qui sont dans le bien de la charité à l'égard du prochain
; ces mêmes esprits, parce qu'ils étaient méchants,
insistaient en disant : maintenant, nous croyons parce que nous avons vu
; mais il fut fait un examen au moyen d'une expérience familière
dans l'autre vie, et qui consiste à être inspecté par
les Anges ; lorsque ces esprits furent inspectés, la partie supérieure
de leur Tête apparut enlevée, et leur Cerveau comme une masse
hérissée de cheveux et sombre ; par là, on vit clairement
quels étaient intérieurement ceux qui ont seulement la foi
scientifique, et non la véritable foi, et que savoir n'est pas croire
; en effet, chez ceux qui savent et croient, la tête apparaît
comme humaine, et le cerveau en ordre, blanc comme la neige et lumineux,
car la lumière céleste est reçue par eux ; mais chez
ceux qui savent seulement et qui d'après cela s'imaginent croire,
et cependant ne croient pas parce qu'ils vivent dans le mal, la lumière
céleste n'est pas reçue, ni par conséquent l'intelligence
et la sagesse qui sont dans cette lumière ; c'est pourquoi, quand
ils s'approchent des sociétés angéliques, c'est-à-dire
de la lumière céleste, cette lumière est changée
chez eux en ténèbres ; de là vient que le Cerveau de
ces esprits apparut sombre.
4320. Si la vie qui procède du Seigneur Seul se montre chez chacun
comme si elle était en lui-même, cela vient de l'Amour ou de
la Miséricorde du Seigneur envers tout le Genre humain, à
savoir en ce qu'il veut approprier à chacun ce qui appartient à
Lui, et donner à chacun la félicité éternelle
; que l'amour approprie ce qui est à lui à un autre, cela
est notoire, car l'amour se fixe dans un autre et s'y rend présent
; que ne doit donc pas faire l'amour Divin ! Si les méchants aussi
reçoivent la vie qui procède du Seigneur, c'est qu'il en est
d'eux comme des objets du monde qui tous reçoivent la lumière
provenant du Soleil, et par suite les couleurs, mais selon les formes ;
les objets qui étouffent la lumière et la corrompent, apparaissent
d'une couleur noire ou hideuse, mais toujours est-il qu'ils ont leur teinte
noire et hideuse d'après la lumière du soleil ; de même,
la lumière ou la vie procédant du Seigneur chez les méchants
; mais cette vie n'est pas la vie ; elle est, comme on l'appelle la mort
spirituelle.
4321. Quoique ces choses paraissent à l'homme paradoxales et incroyables,
toujours est-il cependant qu'on ne doit pas le nier, parce que l'expérience
elle-même les enseigne ; si l'on niait toutes les choses dont les
causes ne sont pas connues, on nierait d'innombrables choses qui existent
dans la nature, et dont à peine quant à la dix-millième
partie l'on connaîtt les causes ; en effet, il y a dans la nature
tant et de si grands arcanes que ceux que l'homme connaît sont à
peine quelque chose par rapport à ceux qu'il ne connaît pas
; que ne doit-il pas en être pour les arcanes qui existent dans la
sphère au-dessus de la nature, c'est-à-dire dans le monde
spirituel ! Par exemple, ceux-ci : qu'il y a une vie unique, et que tous
vivent de cette vie, et chacun autrement qu'un autre ; que les méchants
vivent de cette même vie, et aussi les enfers ; et que la vie qui
influe agit selon la réception ; que le ciel a été
tellement mis en ordre par le Seigneur qu'il présente la ressemblance
d'un Homme, d'où il est appelé le Très-Grand Homme,
et que de là toutes les choses qui sont chez l'homme correspondent
au ciel ; que l'homme, sans l'influx qui en vient dans chacune des choses
qui sont chez lui, ne peut pas même subsister un seul moment ; que
tous tiennent dans le Très-Grand Homme une situation constante selon
la qualité et l'état du vrai et du bien dans lesquels ils
sont ; que la situation y est non pas une situation, mais un état,
et que par suite apparaissent constamment à gauche ceux qui sont
à gauche, à droite ceux qui sont à droite, en avant
ceux qui sont en avant, par-derrière ceux qui sont par-derrière,
vers le plan de la Tête, de la Poitrine, du Dos, des Lombes, des Pieds,
au-dessus de la tête et au-dessous des plantes des pieds, directement
et obliquement, à une moindre ou à une plus grande distance,
ceux qui sont dans ces positions, de quelque manière et vers quelque
plage qu'un esprit se tourne ; que le Seigneur comme Soleil apparaît
constamment à droite, à une hauteur moyenne, un peu au-dessus
du plan de l'oeil droit, et que toutes choses se réfèrent
au Seigneur comme Soleil, et au Centre qui est là, par conséquent
à leur unique, par lequel elles existent et subsistent ; et comme
tous apparaissent devant le Seigneur constamment dans leur situation selon
les états du bien et du vrai, c'est pour cela qu'ils apparaissent
pareillement à chacun d'eux, et cela parce que la vie du Seigneur,
par conséquent le Seigneur, est dans tous ceux qui sont dans le ciel
: outre d'autres arcanes innombrables.
4322. Qui est-ce qui ne croit pas aujourd'hui que l'homme existe naturellement
d'après la semence et l'uf et que dès la première
création il v a dans la semence une vertu de se produire en de telles
formes d'abord au dedans de l'uf puis dans l'utérus, et après
cela de soi-même et qu'il n'y a point de Divin qui outre cela produise
? Si l'on a cette croyance, c'est que personne ne sait qu'il existe un influx
procédant du ciel, c'est-à-dire du Seigneur par le ciel, et
cela parce qu'on ne veut pas savoir qu'il y a un ciel ; en effet, dans leurs
assemblées, les érudits discutent ouvertement entre eux s'il
y a un enfer, par conséquent s'il y a un Ciel ; et comme ils doutent
de l'existence du Ciel, c'est pour cela aussi qu'ils ne peuvent prendre
pour principe qu'il existe un influx du Seigneur par le ciel, lequel influx
cependant produit et contient en forme selon les usages toutes les choses
qui sont dans les trois règnes de la terre, principalement dans le
Règne animal, et spécialement dans l'homme: de là ils
ne peuvent pas non plus savoir qu'il y a une correspondance entre le ciel
et l'homme ni, à plus forte raison, que cette correspondance est
telle que de là chacune des choses qui sont chez l'homme, même
les plus, petites,existent, et aussi par suite subsistent, car la subsistance
est une perpétuelle existence, conséquemment la conservation
dans la connexion et la forme est une perpétuelle création.
4323. Qu'il y ait une correspondance de chaque chose chez l'homme avec le
ciel, j'ai commencé à le montrer, et cela d'après une
vive expérience provenant du monde des esprits et du ciel, dans le
but que l'homme sache d'où il existe et d'où il subsiste,
et que de là il y a en lui un continuel influx : dans ce qui suit
il va être montré, pareillement d'après l'expérience,
que l'homme rejette l'influx procédant du ciel, c'est-à-dire
du Seigneur par le ciel, et qu'il reçoit l'influx provenant de l'enfer
; mais que néanmoins, il est continuellement tenu par le Seigneur
dans la correspondance avec le ciel afin qu'il puisse, si c'est son choix,
être conduit de l'enfer au ciel, et par le ciel au Seigneur.
4323. Il a été question, ci-dessus, de la Correspondance du
Cur et des Poumons et de celle du Cerveau avec le Très-grand
Homme ; ici, selon le but proposé, il sera parlé de la Correspondance
avec les Sensoria externes, à savoir avec le sensorium de la vue
ou l'oeil, avec le sensorium de l'ouïe ou l'oreille, avec les sensoria
de l'odorat, du goût et du toucher mais il sera d'abord parlé
de la correspondance avec le sens dans le commun.
4325. Le sens dans le commun, ou le commun sens, est distingué en
volontaire et en involontaire ; le sens volontaire est propre au Cerveau,
et le sens involontaire est propre au Cervelet ; ces deux communs sens ont
été conjoints chez l'homme, mais toujours est-il qu'ils sont
distincts ; les fibres qui effluent du Cerveau présentent dans le
commun le sens volontaire, et les fibres qui effluent du Cervelet présentent
dans le commun le sens involontaire ; les fibres de cette double origine
se conjoignent dans deux appendices qui sont appelés Moelle allongée
et Moelle épinière, et passent par elles dans le corps, et
en conforment les membres, les viscères et les organes ; les choses
qui enveloppent le corps de tous côtés, comme les Muscles et
la peau, et aussi les organes des sens, reçoivent pour la plupart
les fibres qui partent du Cerveau ; de là les sens pour l'homme et
de là les mouvements selon sa volonté ; mais les choses qui
sont au-dedans de cette ceinture ou de cette enveloppe, et sont appelées
viscères du corps, reçoivent les fibres qui partent du Cervelet
; de là l'homme n'en a point le sens, et elles ne sont point sous
l'arbitre de sa volonté : par là, on peut voir en quelque
sorte ce que c'est que le sens dans le commun, ou le commun sens volontaire
et le commun sens involontaire. En outre, il faut qu'on sache qu'il doit
y avoir un commun pour qu'il y ait quelque particulier ; que le particulier
ne peut jamais exister ni subsister sans un commun ; que même il subsiste
dans le commun ; et qu'il en est de tout particulier selon la qualité
et selon l'état du commun ; il en est de même aussi des sens
chez l'homme, et de même aussi des mouvements.
4326. J'entendis un bruit sourd, semblable au roulement du tonnerre, qui
venait de très haut au-dessus de l'occiput et se continuait autour
de toute cette région ; j'étais dans la surprise, ne sachant
qui étaient ces esprits ; il me fut dit que c'étaient ceux
qui avaient pour rapport le commun sens involontaire ; et il fut ajouté
que ces esprits pouvaient habilement percevoir les pensées de l'homme,
mais qu'ils ne veulent ni les exposer ni les proférer, de même
que le Cervelet qui perçoit tout ce que fait le Cerveau, mais ne
le divulgue pas. Quand leur opération manifeste dans toute la province
de l'occiput eut cessé, il me fut montré jusqu'où s'étendait
leur opération ; elle se fixait d'abord dans toute la face, ensuite
elle se traînait vers la partie gauche de la face, et enfin vers l'oreille
gauche ; par là, il était signifié quelle avait été
l'opération du commun sens involontaire dès les premiers temps
chez les hommes sur cette terre, et comment elle a marché. L'influx
provenant du Cervelet s'insinue principalement dans la face, ce qui est
évident en ce que dans la face a été inscrit le mental
(animus) , et que dans la face apparaissent les affections, et cela le plus
souvent sans la volonté de l'homme; par exemple la crainte, le respect,
la pudeur, divers genres d'allégresse, et aussi de tristesse, outre
plusieurs autres choses, qui par là se font connaître à
un autre, de sorte que d'après la face celui-là sait quelles
sont les affections et quels sont les changements du mental (animus) et
du mental (mens) ; ces choses procèdent du Cervelet au moyen de ses
fibres, quand il n'y a rien de simulé : c'est ainsi qu'il m'a été
montré que le commun sens dans les premiers temps, ou chez les Três-Anciens,
a occupé toute la face, et que successivement après ces premiers
temps, il en a occupé seulement la partie gauche, et qu'ensuite après
ces temps-ci il s'est répandu hors de la face, au point qu'aujourd'hui
il est à peine resté quelque commun sens involontaire dans
la face : la partie droite de la face avec l'oeil droit correspond à
l'affection du bien ; mais la partie gauche à l'affection du vrai
la région où est l'oreille correspond à l'obéissance
seule sans l'affection en effet, chez les Très-Anciens, dont le siècle
a été appelé siècle d'or, parce qu'ils ont vécu
dans un certain état d'intégrité, et dans l'amour envers
le Seigneur et dans l'amour mutuel comme les anges, l'involontaire du Cervelet
se manifestait tout entier dans la face, et alors ils ne savaient montrer
par le visage nulle autre chose que selon qu'influait le ciel dans les efforts
involontaires, et par suite dans la volonté : mais chez les Anciens,
dont le siècle a été appelé siècle d'argent,
parce qu'ils étaient dans un état de vérité,
et par là dans la Charité à l'égard du prochain,
l'involontaire qui appartient au Cervelet se manifestait non dans la partie
droite de la face, mais seulement dans la partie gauche ; chez leurs descendants,
dont le temps a été appelé siècle de fer, parce
qu'ils vivaient non dans l'affection du vrai, mais dans l'obéissance
du vrai l'involontaire ne se manifesta plus dans la face, mais il se retira
dans là' région qui est autour de l'oreille gauche : j'ai
été instruit que les fibres du Cervelet ont ainsi changé
leur efflux dans la face, et qu'à la place de fibres, il y a été
transporté des fibres partant du Cerveau, lesquelles commandent alors
à celles qui partent du Cervelet ; et cela, par l'effort de former
la physionomie de la face selon le gré de la volonté propre
qui provient du Cerveau : il ne semble pas à l'homme que cela soit
ainsi, mais c'est ce que voient clairement les Anges par l'influx du ciel
et par la correspondance.
4327. Tel est aujourd'hui le commun sens involontaire chez ceux qui sont
dans le bien et le vrai de la foi ; mais chez ceux qui sont dans le mal
et par suite dans le faux, il n'y a plus aucun commun sens involontaire
qui se manifeste, ni dans la face, ni dans le langage, ni dans le geste,
mais il y a un volontaire qui simule l'involontaire, ou un naturel,, comme
on l'appelle, qu'ils ont rendu tel par le fréquent usage ou l'habitude
dès l'enfance : quel est ce sens chez eux, c'est ce qui m'a été
montré par un influx, qui était tacite et froid, dans toute
la face, tant dans la partie droite que dans la partie gauche, et de là
se fixant vers les yeux, et de l'oeil gauche s'étendant dans la face,
ce qui signifiait que les fibres du Cerveau s'y étaient mêlées,
et qu'elles commandent aux fibres du Cervelet, et que par suite à
l'intérieur règnent l'imposture, la feinte, le mensonge et
la fourberie, et qu'à l'extérieur se montrent la sincérité
et la bonté : la fixation vers l'oeil gauche, et par suite aussi
dans la face, signifiait qu'ils ont pour fin le mal et qu'ils se servent
de la partie intellectuelle pour parvenir à leur fin, car l'oeil
gauche signifie l'intellectuel. Ceux-là aujourd'hui sont ceux qui,
quant à la plus grande partie, constituent le commun sens involontaire
; cependant, ils étaient anciennement les plus célestes de
tous, mais aujourd'hui ils sont les plus scélérats de tous,
et principalement ceux du monde Chrétien : ils sont en grand nombre,
et ils apparaissent sous l'occiput et vers le dos, où ils ont très
souvent été vus et perçus par moi ; car ceux qui ont
aujoud'hui pour rapport ce sens, sont ceux qui pensent avec fourberie, qui
méditent des méchancetés contre le prochain, et qui
montrent un visage amical, même très amical, et aussi des gestes
semblables, qui parlent avec douceur comme s'ils étaient, plus que
les autres, doués de Charité, et qui sont cependant les ennemis
les plus acharnés, non seulement de celui avec qui ils ont commerce,
mais même du genre humain : leurs pensées m'ont été
communiquées ; elles étaient affreuses et abominables, pleines
de cruautés et de barbarie.
4328. Il m'a aussi été montré ce qui en est du volontaire
et de l'intellectuel dans le commun. Les Très-Anciens qui ont constitué
l'Eglise Céleste du Seigneur, et dont il a été parlé
n° 1114 à 112 3, ont eu un volontaire dans lequel il y avait
le bien, et un intellectuel dans lequel il y avait le vrai provenant du
bien, et chez eux les deux faisaient un ; mais les Anciens, qui ont formé
l'Eglise spirituelle du Seigneur, ont eu le volontaire entièrement
détruit, mais un intellectuel entier, dans lequel le Seigneur par
la régénération formait un nouveau volontaire, et aussi
par ce volontaire un nouvel intellectuel, voir n° 863, 875, 895, 927,
928, 1023, 1043, 1044, 1555, 2256. Comment avait été le bien
de l'Eglise céleste, cela m'a été montré par
une colonne descendant du ciel, laquelle était de couleur d'azur
; à son côté gauche, il y avait un brillant comme le
brillant enflammé du soleil ; par là était représenté
leur premier état, par la couleur d'azur leur bien volontaire, et
par le brillant enflammé leur intellectuel : et ensuite l'azur de
la colonne passait dans un enflammé obscur, ce qui représentait
leur second état, et que les deux vies, à savoir la vie de
la volonté et la vie de l'entendement, faisaient néanmoins
un, mais plus obscurément quant au bien provenant de la volonté
; car l'azur signifie le bien, et le brillant enflammé le vrai d'après
le bien : peu après, cette colonne devint entièrement noire,
et autour de la colonne il y avait un brillant qui était bigarré
par une sorte de blancheur éclatante, et présentait des couleurs
par lesquelles était signifié l'Etat de l'Eglise spirituelle
; la colonne noire signifiait le volontaire qui avait été
entièrement détruit, et qui n'était que mal ; le brillant
bigarré par une sorte de blancheur éclatante signifiait l'intellectuel,
dans lequel un nouveau volontaire avait été introduit par
le Seigneur en effet, dans le ciel l'intellectuel est représenté
par le brillant.
4329. Il vint des Esprits à une certaine hauteur au bruit qu'ils
faisaient entendre, il me sembla qu'ils étaient en grand nombre ;
et, d'après les idées de leur pensée et de leur langage,
qui étaient dérivées vers moi, je découvris
qu'ils étaient comme n'ayant aucun idée distincte, mais comme
dans l'idée commune de plusieurs choses ; par suite, je présumais
qu'ils ne pouvaient percevoir rien de distinct, mais seulement quelque commun
indistinct, par conséquent obscur, car j'étais dans l'opinion
que le commun n'était pas autre chose ; que leur pensée fût
commune, c'est-à-dire de plusieurs choses en même temps, c'est
ce que j'ai pu clairement apercevoir par les choses qui influaient de là
dans ma Pensée : mais il leur était donné un esprit
intermédiaire, par lequel ils parlaient avec moi, car un tel commun
rie pouvait tomber dans le langage que par d'autres ; et lorsque je parlais
avec eux par cet intermédiaire, je disais, selon mon opinion, que
les communs ne peuvent présenter sur un sujet quelconque une idée
distincte, mais qu'ils en présentent une tellement obscure, qu'elle
est pour ainsi dire nulle ; or, un quart d'heure après, ils me montrèrent
qu'ils avaient une idée distincte des communs et, de plusieurs choses
dans les communs, surtout en ce qu'ils observaient exactement et distinctement
toutes les variations et tous les changements de mes pensées et de
mes affections avec les singuliers-là, de sorte que d'autres esprits
n'auraient pas pu faire mieux ; de là je pus conclure qu'autre chose
est la commune idée, qui est obscure, dans laquelle sont ceux qui
ont peu de connaissance et sont par suite dans l'obscur sur toutes choses,
et autre chose la commune idée, qui est claire, danslaquelle sont
ceux qui ont été instruits dans les vrais et dans les biens,
insinués en leur ordre et en leur série dans le commun, et
disposés de telle sorte que d'après le commun, ils peuvent
les voir distinctement ceux-ci sont ceux qui constituent dans l'autre vie
le commun Sens volontaire, et ce sont ceux qui par les connaissances du
bien et du vrai se sont acquis la faculté intuitive des choses d'après
le commun, et qui de contemplent les choses en même temps d'une manière
ample, et décident aussitôt si telle chose est ou n'est point
; à la vérité, ils voient les choses comme dans l'obscur,
parce qu'ils voient d'après le commun, celles qui sont dans le commun,
mais comme elles ont été distinctement disposées dans
le commun, c'est pour cela que ces choses sont néanmoins pour eux
dans la clarté: ce commun sens volontaire ne tombe que dans les sages
: je découvris aussi que ces esprits étaient des sages, car
ils considéraient intuitivement chez moi toutes et chacune des choses
qui appartenaient à la conclusion, d'après lesquelles ilsconcluaient
si habilement sur les intérieurs de mes pensées et de mes
affections, que je commençais à craindre de penser davantage
quelque chose, car ils découvraient des choses que je ne savais pas
être chez moi et cependant d'après les conclusions qu'ils tiraient,
il m'était impossible de ne pas les reconnaître ; de là
je percevais chez moi de la torpeur à parler avec eux ; cette torpeur,
ayant été remarquée, apparut quelque chose de poilu,
et comme prononçant là des mots d'une manière muette
; il fut dit que par là était signifié le commun sensitif
corporel qui leur correspond. Le jour suivant, je parlai une seconde fois
avec eux, et j'eus de nouveau par expérience la certitude qu'ils
avaient une perception commune non obscure mais claire, et que selon que
variaient les communs et les états des communs, de même variaient
les particuliers et les états des particuliers, car ceux-ci se réfèrent
en ordre et en série à ceux-là. Il fut dit qu'il existe
des communs Sens volontaires encore plus parfaits dans la sphère
intérieure du ciel et que, lorsque les anges sont dans une idée
commune ou universelle, ils sont en même temps dans les idées
singulières qui sont distinctement mises en ordre par le Seigneur
dans l'idée universelle ; puis aussi, que le Commun et l'Universel
ne sont quelque chose qu'autant qu'il y a en eux des particuliers et des
singuliers, par lesquels ils existent et d'où ils tirent leur nom,
et qu'ils existent en proportion des particuliers et des singuliers qui
sont en eux ; et que par là il est évident que la Providence
universelle du Seigneur, sans les très singuliers qui sont en elle
et dont elle est composée, n'est absolument rien, et qu'il y a de
la stupidité à décider qu'il existe un universel chez
le Divin, et d'en supprimer les singuliers.
4330. Puisque les Trois Cieux constituent ensemble le Très-Grand
homme et qu'à cet Homme correspondent tous les Membres, tous les
Viscères et tous les Organes du corps, selon leurs fonctions et leurs
usages, comme il a été dit ci-dessus, à lui correspondent,
non seulement les choses qui sont Externes et qui se montrent à la
vue, mais aussi celles qui sont Internes et qui ne se montrent point à
la vue, par conséquent celles qui appartiennent à l'homme
Externe et celles qui appartiennent à l'homme Interne : les Sociétés
d'esprits et d'anges, auxquelles correspondent les choses qui appartiennent
à l'homme Externe, proviennent de cette Terre quant à la plus
grande partie : mais les sociétés auxquelles correspondent
les choses qui appartiennent à l'homme Interne proviennent d'autre
part quant à la plus grande partie ; ces sociétés dans
les cieux font un, comme chez l'homme régénéré
l'homme Externe et l'homme Interne : toutefois, de ceux qui viennent de
cette Terre dans l'autre vie, il en est peu, aujourd'hui, chez qui l'homme
Externe fasse un avec l'homme Interne, car la plupart sont Sensuels, au
point qu'a y en a un très petit nombre qui croient autre chose, sinon
que l'Externe de l'homme est tout ce qui constitue l'homme et que, quand
cet Externe se retire, comme il arrive lorsque l'homme meurt, à peine
reste-t-il quelque chose qui vive ; encore moins croient-ils que c'est l'interne
qui vit dans l'externe, et que, quand l'externe se retire, l'interne vit
principalement. Il a été montré par une vive expérience
comment ceux-ci sont contre l'homme Interne : il y avait un grand nombre
d'Esprits de cette Terre, qui avaient été tels, lorsqu'ils
vivaient dans le monde ; il vint en leur présence des Esprits qui
avaient pour rapport l'homme Interne- Sensuel, et alors ceux-là se
mirent aussitôt à infester ceux-ci, à peu près
comme les irrationnels infestent ceux qui sont rationnels, en parlant et
en raisonnant continuellement d'après les erreurs des sens, d'après
les illusions qui en proviennent, et d'après de pures hypothèses,
ne croyant rien que ce qui peut être confirmé par les sensuels
externes ; et, de plus, ils se moquaient de l'homme Interne ; mais ceux
qui avaient pour rapport l'homme Interne Sensuel ne s'en inquiétaient
nullement ; ils étaient surpris, non seulement de leur folie, mais
encore de leur stupidité ; et, ce qui est étonnant, c'est
que, quand les Sensuels externes s'approchaient des Sensuels internes et
venaient presque dans la sphère de leurs pensées, les Sensuels
externes commençaient à respirer difficilement - car les Esprits
et les Anges respirent comme les hommes, mais la respiration en eux est
interne respectivement, n° 3884, 3885, et suiv., 3893 - et par conséquent
à être presque suffoqués, aussi se retiraient-ils, et
plus ils s'éloignaient des Sensuels Internes, plus il y avait chez
eux de tranquillité et de repos, parce qu'ils respiraient plus facilement
; et, de nouveau, plus ils se rapprochaient, plus ils étaient dans
le trouble et dans l'agitation ; cela venait de ce que, quand les Sensuels
Externes sont dans leurs illusions, leus fantaisies et leurs hypothèses,
et par suite dans leurs faux, ils sont dans un état de tranquillité
; et que, vice versa,quand ces faux leur sont enlevés, ce qui arrive
quand l'homme Interne influe avec la lumière du vrai, ils sont dans
un état de trouble ; en effet, dans l'autre vie, il existe des sphères
de pensées et d'affections, et elles sont mutuellement communiquées
selon la présence et l'approche, n° 1048, 1053, 1316, 1504 à
1512, 1695 2489 : ce conflit dura pendant quelques heures ; et c'est ainsi
qu'il fut montré comment les hommes de cette Terre sont aujourd'hui
contre l'homme Interne, et que le Sensuel externe fait presque tout chez
eux.