Qu'est-ce que le Martinisme

par Robert Amadou.


Qu'est-ce que le Martinisme
CHAPITRE PREMIER
MARTINES DE PASQUALLY ET L'ORDRE DES ELUS COHEN
Le seul bilan biographique exact et aussi complet que le permet l'état présent, très défectueux, de la documentation et, surtout, le seul exposé d'ensemble détaillé et qui soit, lui aussi, exact, de la doctrine martinésienne, ont été publiés, avec biographie de et sur, dans l'Initiation (1969, janvier-mars, pp. 6-30; avriljuin, pp. 58-84; juillet-septembre, pp. 139-174.) Publié en volume: Le Théurge inconnu. Initiation à Martines de Pasqually, à paraître. V. aussi: La Magie des Elus Cohen, op. cit. intra. Il 4. Nous en tirons les indications suivantes, en y joignant quelques compléments.
1. - Une vie encore obscure.
Du nom et des origines, rien n'est sûr.
La découverte (Pinasseau-Cellier) de l'acte d'inhumation permet de fixer la date de naissance entre le 29 avril et le 21 septembre 1727. Je croirais que c'est à Grenoble ou près de Grenoble.
Sur son enfance, sa jeunesse, son instruction, aucune donnée, même hypothétique. Le français n'est pas sa langue maternelle.
Il faut attendre de le voir paraître sur la scène maçonnique pour qu'il sorte de l'ombre. Dès lors ces événements-ci de sa vie privee, inextricablement mêlée avec sa vie maçonnique, sont attestés: mariage à Bordeaux (1767); naissance de son fils Jean-Anselme (1768) qui devient commissaire de police, comme Pinasseau et Cellier l'ont découvert; naissance d'un deuxième fils (1771) aux prénoms inconnus et probablement mort en bas âge; le 5 mai 1772, embarquement pour Saint-Domingue; le 20 septembre 1774, décès et le 21 inhumation dans l'île, en un lieu aujourd'hui inconnu.
2) Martines de Pasqually s'est peint lui-même en ces lignes dont un long commerce martiniste, laissant subsister certes mainte énigme, m'a persuadé qu'elles étaient non seulement sincères mais véraces:
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Quant à moi, je suis homme et ne crois point avoir vers moi plus qu'un autre homme. [...] Je ne suis ni dieu ni diable, ni sorcier, ni magicien. Mais aussi: Je ne suis qu'un faible instrument dont Dieu veut bien, indigne que je suis, se servir de moi pour rappeler les hommes mes semblables à leur premier état de Maçon, qui veut dire spirituellement hommes ou âmes afin de leur faire voir véritablement qu'ils sont réellement Hommes-Dieu, étant créés à l'image et à la ressemblance de cet Etre tout-puissant. Martines de Pasqually, c'est avant tout sa doctrine et son Ordre des Elus Cohen, exposés dans ses écrits.
II. - Ecrits.
1) Traité de la réintégration des êtres dans leurs premières propriétés, vertus et
puissance spirituelles et divines. Publié pour la première fois par René Philipon (sous ce titre qui connaît des variantes), Paris. Chacornac. 1899.
Martines de Pasqually, Traité de la réintégration des êtres, créés... Version originale éditée pour la première fois, en regard de la version publiée en 1899, accompagnée du tableau universel, précédée d'une introduction et de documents inédits, Paris, Robert Dumas (puis Henry Veyrier), 1974.
2) Apocryphes. Réferons à la bibliographie de l'Initiation, mais avec une addition. Les titres des ouvrages attribués faussement à Martines par Ragon sont, en fait, ceux d'ouvrages, probablement fictifs, allégués comme leurs par les fictifs Frères de la Rose-Croix qui sont censés s'exprimer dans la Fama fraternitatis de J.V. Andréa, au passage suivant: Confessons d'ailleurs qu'après la mort d'A. aucun de nous n'obtint le moindre détail sur R.C., et sur ses premiers Frères, mis à part ce qu'en relatent notre Bibliothéque philosophique, entre autres, notre Axiomatique, I'ouvrage pour nous capital, les Cycles du monde, l'ouvrage le plus savant, et Protée, le plus utile. (Trad. Gorceix, La Bible des Rose-Croix, P.U.F., 1970, p. 12).
3) Correspondance. Les lettres les plus importantes sont celles a J.-B. Willermoz, qui ont été bien éditées par Van Rijnberk dans son ouvrage cité infra, t. II, pp, 71-166.
4) Documents d'ordre. C'est-à-dire tous textes officiels de l'Ordre des Elus Cohen; rituels,
catéchismes, pièces administratives. (Cf l'inventaire des sources in l'Initiation). Depuis la
bibliographie de l'Initiation, j'ai publié l'inventaire du fonds Hermete des archives des
néo-Cohen, ibid., janv.-mars 1970, pp. 52-53. Ce fonds comporte notamment la pièce
suivante: Statuts généraux de la Franche-Maçonnerie des Chevaliers Elus Coëns, original
déposé en 1767 dans les archives du Tribunal souverain élevé à la gloire du Grand Architecte de l'Univers sur le grand orient de Paris (fraternellement communiqué par Ivan Mosca), avec les signatures de Bacon de la Chevalerie, Balzac, Luzignan et Cerley. (La copie des statuts par Papus, qui est conservée à Lyon, ne porte pas de signature). Plusieurs documents martinésistes dans la partie des archives de J.-B. Willermoz récemment mise à jour.
(Fonds privé L.A.).
Ajoutons surtout le très important ensemble rituel inclus dans les papiers posthumes de Saint-Martin, constituant le fond Z (cf. infra, chapitre II).
Les éditions les plus importantes sont: catechismes de six grades Cohen ap Papus,
Martines de Pasqually...., Chamuel, 1895 (fac-sim. avec une préface de R.A. et une
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3 postface de Philippe Encausse, Paris, Robert Dumas puis Dervy-Livres, 1976), pp 213-283;
Extrait du catéchisme des Elus Cohen. ap. Amadou. Trésor martiniste.
Les exorcismes des Elus-Coëns par Robert Amblain. Les Cahiers de la Tour SaintJacques,
II-III-IV (1960), pp 175-186; Les diplômes coëns de J.-B. Willermoz par Alice Joly ibid, pp
216-223, avec une reproduction photographique de l'un d'eux; enfin François Ribadeau-
Dumas a bien voulu déférer à ma requête en reproduisant dans Les Magiciens de Dieu,
Robert Laffont, 1970. pp 267-293,1'un des trois textes (et le plus important, puisqu'il s'agit
d'un rituel d'initiation au premier degré) qui avaient motivé ma Note sur une source
ignorée de l'histoire des rituels coëns. Les Cahiers de la Tour Saint-Jacques,II-III-IV
(1960), pp. 187-189. Les documents du fonds Z sont à paraître en 1980-1981 chez Guy
Trédaniel, éditeur à Paris (La Magie des élus-coens, t.I, Théurgie; t. II, Franc-Maçonnerie). Y
sont joints des documents complémentaires tirés du fonds Prunelle de Lière, à la B.M. de Grenoble.
5) De la bibliographie martinésienne, que récapitule l'Initiation, un livre doit être cité: G.
Van Rijnberk, Un Thaumaturge du XVIIIème siècle, Martines de Pasqually. Sa vie, son
oeuvre, son ordre,tome. I, F. Alcan, 1935: tome. II, Lyon, Derain-Radet, 1938 (excellente bibliographie critique) René Le Forestier, La Franc-Maçonnerie occultiste au XVIIIème siècle et l'ordre des élus coëns (Paris, Dorbon-Ainé, s.d. [ 1928 ]) fournit un panorama aux tons justes, mais ses essais de reconstitutions rituelles sont aujourd'hui dépassés, grâce aux découvertes et aux publications mentionnées ci-dessus.
Les lettres de S.M. à J.-B. Willermoz, pleines de détails rituels, ont fait l'objet d'une première et déplorable édition par Papus, Louis-Claude de Saint-Martin (Paris, Chacornac, 1902).Une transcription exacte a été procurée par R.A. (cf. sa préface à la rééd. par lui établie du susdit Papus, Paris, Pierre Belfond, 1919).
III. - La Réintégration.
1) Martines de Pasqually a élaboré une doctrine complexe et précise. A partir de quelles données, outre son expérience personnelle qui, disait-ii, avait été jusqu'à lui faire prendre sous dictée les enseignements de la Sagesse divine même? La critique externe ne dispose d'aucun élément de réponse. La critique interne désigne le courant de l'ésotérisme judéochrétien, et plus particulièrement certains de ses rameaux provençaux et espagnols (avec, dans ce dernier cas, une influence islamique de seconde main).
Sur la doctrine elle-même, les modernes sont, en revanche, bien renseignés. Le Traité
constitue la source principale Adjuvants; les textes rituels, aussi les explications fournies
par Willermoz et surtout par Saint-Martin sous le couvert de ses idées propres. A michemin,
en quelque sorte, de ces deux dernières sources, les instructions aux Cohen de
Lyon, à partir
de 1774 (extraits ap. Paul Vulliaud, Les Rose-Croix Iyonnais au XVIlIè siècle....E.Nourry,
1929, pp. 225-252; I'édition de R.A. des Le~ons de Lyon comprend le texte intégral des dix premières leçons par Saint-Martin, le résumé de toutes les leçons, qu'elles soient de Saint-Martin ou d'Hauterive, dans un autographe du premier, avec des développements relatifs a quelques leçons du même, enfin le texte des notes prises exclusivement par J.-B. Willermoz. Une édition de ces dernieres notes exclusivement, aux Editions du Baucens (Braine-le Comte, Belgique, 1975), est mauvaise.
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A ces sources puise l'indispensable exposé de l'lnitiation.
Ici, I'on esquissera le schéma de l'essentiel.
2) Le titre du Traité l'annonce (à juste titre): la doctrine de Martines est une doctrine de la réintégration des êtres. Réintégration implique expulsion préalable, drame et dénouement. En effet. Et de le savoir sauve. Mais c'est par un savoir opératif. Martines est un gnostique. La reintégration doit être universelle. Sa tâche incombe à l'homme. A lui d'apprendre quelle fut l'origine et quelle est la destination, quelles sont les voies communes de la chute et de la remontée: apprentissage d'une théorie. Mais d'une théorie qui est, en fin de compte, théorie de l'action, qui se confond avec elle, c'est-à-dire théorie de la technique opératoire; théorie des intermédiaires et technique des moyens; techniques des agents et des opérations. Théorie des opérations théurgiques à la manière de Martines de Pasqually. Voilà la gnose particularisée en gnosticisme martinésien, en martinésisme. A cette particularisation concourent aussi - mais l'analyse de la théurgie particulière suffirait à l'indiquer - les modalités et les détails spécifiques, du moins en ' Ir assemblage, de l'épopée martinésiste; dommage que nous en soyons réduits à les porter pour mémoire. 3) Dieu est un, mais ses puissances sont trines et son essence quatriple. Au commencement il émane des êtres spirituels, libres et discrets qui forment sa cour. Certains de ces êtres cèdent à l'orgueil et opèrent - c'est-à-dire agissent - à l'instar de Dieu, en infraction, c'est-àdire en prétendant à l'autonomie. Pour les punir et sauver la cour divine, ils sont chassés de celle-ci et emprisonnés dans le monde matériel, spécialement créé pour l'occasion par des esprits restés fidèles. La matière est créée, non pas émanéé: elle est illusoire. Dieu émane alors l'homme: mineur sprirituel puisqu'il vient en dernier lieu, mais doué de privilèges supérieurs à ceux de ses aînés. Adam, androgyne, sera tout à la fois chargé de la garde et de la réhabilitation.
Mais Adam s'élève, à son tour, par son orgueil jusqu'à vouloir être créateur tout seul. Il lie sa puissance divine avec celle des démons et il effectue une création de perdition Sa création, sa créature Houwa, est ratée. Mais, après son forfait, il dégénère et devient l'opprobre de la terre.
Son corps glorieux devient ténébreux, en se matérialisant.
De pensant il devient pensif et la communication directe, dont il jouissait, avec Dieu, est coupée. Elle ne pourra plus s'effectuer désormais que par le truchement, éventuellement obtenu, des esprits, des intermédiaires.
Pour entrer en rapport avec ceux-ci, I'homme, en partie matérialisé, devra user de procédés en partie matériels. La mystique s'est dégradée en théurgie cérémonielle, science et sacrement. Le théurge prie d'abord, il demande à Dieu de lui restituer son pouvoir primitif sur les esprits. Puis il commande aux esprits bons et exorcise les mauvais. Des signes, quelquefois auditifs et tactiles, mais habituellement lumineux, indiquent le succès. La faute d'Adam fut suivie d'une seconde. Dieu avait maintenu le coupable dans ses droits et devoirs et l'avait pourvu des moyens nouveaux requis par la nouvelle situation. Pourtant, ingrat, I'homme s'unit à sa femme dans une fougue sexuelle digne des bêtes. De cet emportement, Caïn est issu.
Mais Dieu demeure encore fidèle à ses promesses et l'homme n'est point destitué de son poste.
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La postérité de Caïn est incapable de tenir le rôle du mineur. Naissance d'Abel. Caïn le tue. Seth sera l'ancètre des opérateurs, des théurges. Aussi bien après le déluge, plus de Caunites. Noé perpétuera la postérité de Seth (mais Cham réincarnera Caïn).Ainsi d'une race pure sortiront, au cours de l'histoire, des mineurs élus, grands et petits prophètes. Les Cohen y seront agrégés par élection.
La gnose martinésiste discerne, et s'approprie, dans les choses ce qui tient des choses de l'esprit, les symbolise, y mène. Elle trace le plan de la figure universelle où toute la nature spirituelle, majeure, mineure et inférieure opère; où les immensités céleste et temporelle qu'enceint l'immensité de l'axe feu central communiquent, à travers l'immensité surcéleste, avec l'immensité divine.
Pour se réintégrer et aider à la réintégration des autres hommes et de tous les êtres (point de réintégration complète sans réintégration universelle), celui qui a cette vocation sacerdotale, I'Elu Cohen, considère le nombre de ses doigts de pieds (les nombres, fondement de toute loi de création temporelle et de toute action divine...) et s'instruit du nom des anges. Il suit une ascèse (actes de piété, règles alimentaires, etc), une morale. Il célèbre la théurgie.
Saint-Martin abandonnera la théurgie cérémonielle pour une mystique spéculative dont la déité du Christ est le pivot; Willermoz n'en soufflera mot dans les instructions correspondant aux différents grades et à la Profession de l'Ordre des Chevaliers Bienfaisants de la Cité Sainte, car ceux-ci n'auront pas reçu l'ordination cohen. Mais la pensée de Saint-Martin se définit le mieux par sa continuité avec la pensée de Martines et le Régime Ecossais Rectifié, I'un des rares régimes maçonniques à posséder une doctrine systématique, avec l'Ordre des Elus Cohen, n'aura pas une autre doctrine que ce dernier, le martinésisme.
IV. - L'Ordre des Elus Cohen.
1) Martines de Pasqually était Franc-Maçon, reconnu pour tel par ses Frères. Quand et où a-t-il reçu la lumiere maçonnique? On l'ignore.
2) Il produira devant la Grande Loge de France une patente apparemment délivree à son père par Charles Edouard Stuart en 1738 et transmissible à lui-même. Elle pourrait n'être pas apocryphe si, contrairement à la probabilité, le prétendant avait été Franc-Maçon. 3) Martines de Pasqually fut le Grand Souverain de l'Ordre des Elus Cohen. Et son fondateur? Oui, à ce qu'il paraît. Non à ce qu'il assurait, en parlant de ses prédécesseurs, de ses collègues, de ses archives. Voici un tracé de sa carrière maçonnique, cohen. De 1754 peut-être, de 1758 sûrement, à 1760, propagande dans le Midi de la France, à Lyon, à Paris.
1762: arrivée, le 28 avril, à Bordeaux où il demeure jusqu'en 1766.
Fin 1766 - début 1767: pourparlers et différends avec la Grande Loge de France.
Fin 1766: Paris. Première rencontre avec J.-B. Willermoz.
1767: à l'équinoxe de printemps, installation du Tribunal souverain et promulgation des statuts de l'Ordre. En avril: départ de Paris, propagande en route, retour à Bordeaux en juin.
1768: première rencontre avec Saint-Martin.
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1769-1770: le clerc tonsuré Pierre Fournié, secrétaire de Martines, incapable tous deux de diriger et d'organiser l'Ordre qui, pourtant, se développe. Le 11 juillet 1770, Martines annonce, pour la première fois, qu'il travaille au Traité.
1771-1772: Saint-Martin secrétaire de Martines. Le travail s'améliore et s'intensifie. Mais Martines s'en va.
1772-1774: à Saint-Domingue. Martines poursuit le travail général et développe l'Ordre au plan local, sans désemparer jusqu'a sa mort.
4) Ajoutons quelque chose sur l'Ordre des Elus Cohen après la mort de Pasqually. A sa mort, Caignet de Lestère, que Martines avait désigné à cette fin, occupe la charge de Grand Souverain de l'Ordre, mais il meurt lui-même le 19 décembre 1779. Il a choisi pour successeur Sébastien de Las Casas. Celui-ci, en novembre 1780, conseilla aux Chapitres Cohen, qui souhaitaient de lui une direction plus ferme, de se dissoudre ! La désagrégation avait commencé dès la mort de Pasqually, peut-être un peu avant, tandis qu'il paraissait s'attarder à Saint-Domingue. Peu à peu les Temples s'effondrent ou changent d'appartenance. Des Cohen, cependant, continuent d'opérer. Le Chapitre toulousain, encouragé par d'Hauterive, persiste (révélation du fonds Du Bourg, en cours de publication).
Des deux disciples les plus distingués de Martines, Saint-Martin et Willermoz, le premier n'était pas enclin à favoriser le maintien, et encore moins l'essor de l'Ordre des Elus Cohen; le second pour des raisons analysées ailleurs, préféra infuser dans un autre Rite Maçonnique, la Stricte Observance Templière métamorphosée en Ordre des Chevaliers Bienfaisants de la Cité Sainte, la doctrine martinésienne de la réintégration, sauvant ainsi, croyait-il, la FrancMaçonnerie et ladite doctrine du même coup. La doctrine, disje, et l'on ne saurait trop remarquer que rien de l'initiation, rien de l'ordination cohen, ni, par conséquent, rien de la théurgie cérémonielle propre aux Elus Cohen ne passa chez les Chevaliers Bienfaisants de la Cité Sainte. Willermoz refusa de confondre une secte sacerdotale à la forme maçonnique (même si luimême éprouvait plus que d'autres la force et la valeur de cette forme) avec un Rite Maçonnique et un ordre chevaleresque dont le but, comme la doctrine, serait identique, mais le moyen different, quoiqu'il ne pût être qu'analogue.
Le 26 janvier 180~, Bacon de La Chevalerie parle des Elus Cohen toujours agissant sous la plus grande réserve en exécution des ordres suprêmes du Souverain Mâître $,le G $ W $ J $ (lettre à Chefdebien ap. Benjamin Fabre, Franciscus Eques a Capite galeato, Paris, la Renaissance française, 1913, p. 421). De quoi, de qui s'agit-il? Je me le demande bien, et depuis longtemps.
En 1822, dans une lettre, au baron de Turkheim, datee du 21-31 mars, conservée à la
Bibliothèque municipale de Lyon (ms. 5900) et contenant, selon une annotation du
signataire, des conseils pour la lecture du Traité de la réiotégration des êtres par
Pasqually, Willermoz déclare: De tous les R... [sc. Réaux-Croix] que j'ai connus
particulièrement, il n'en reste point de vivant. Ainsi il me serait vraiment impossible de
vous indiquer aucun pour après moi. Je doute même que le temps présent soit propre à en
préparer, mais nous savons tous que le Tout-Puissant plein d'amour et de miséricorde
peut, quand il voudra, faire nâître des pierres mêmes des enfants d'Habraham. Ce qui est
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7 équivoque, quand on prend garde, mais signifie au moins que les Cohen survivants étaient rares et dans l'ignorance les uns des autres; ce qui confirme que l'Ordre avait disparu sans que personne s'attachât à le réveiller.
A la fin du XIXè siècle, très vaguement, puis au XXè précisément, sont nées des sociétés qui revendiquèrent soit une filiation cohen directe, soit une filiation cohen indirecte. Les prétentions des néo-Cohen sont critiquées infra V.
5) La structure de l'Ordre des Chevaliers Maçons Elus Cohen de l'Univers, pour lui donner son titre entier, est celle d'un Rite maçonnique, d'un système de Hauts Grades souchés sur les trois degrés bleus, selon le modèle écossais.
Les listes de grades cohen fournies par les différents auteurs et même celles qu'on peut établir sur la base des documents officiels ne concordent pas toutes. Mais les variantes sont plus minces qu'il ne se colporte.
Voici la hiéarchie définie par les statuts de 1~67, à l'article XII. Des honneurs et des préséances, suivant le sens descendant: ~(Lc Sou~erain Juge [ = S.J. ou S.I., les initiales aussi de Supérieur Inconnu ] Réaux + est le premier grade la maçonnerie, ensuite le commandeur d'orient, le chevalier d'orient, le grand architecte, le maître, le compagnon et l'apprenti coën; le maître parfait élu, les maîtres, compagnon et apprenti bleus. Ces statuts fournissent des renseignements minutieux sur l'organisation de l'Ordre, distribués en six chapitres qui comportent respectivement trente, deux, dix-neuf, quinze, sept et cinq articles. (La copie Papus, à la B.M. de Lyon, cotée 5474, ne reproduit que le premier chapitre. C'est pourquoi les signatures qui viennent après le sixième, manquent). Le nombre des Temples cohen ne dépassa guere la douzaine, répartis, il est vrai, à travers toute la France. Leurs tribulations endogènes et exogènes, furent quasi permanentes. Sur tout cela Cf Van Rijnberk, op. cit. et les ouvrages qu'il recommande et qui sont rares.
V. - Les Néo-Cohen.
" A. - L'Ordre des Chevaliers Maçons Elus Cohen de l'Univers semble avoir disparu avant la Révolution. Sa survivance au début du XIXè siècle est douteuse. Papus, le premier ensuite, reparle des Elus Cohen comme d'un Ordre vivant, ou plutôt survivant de quelque maniere, bien incerraine, dans son Ordre martiniste. Bricaud revendique, quand il devient Grand Maître de l'Ordre martiniste, la succession cohen en ligne directe, et, pour l'Ordre martiniste, l'héritage martinésiste en même temps que celui de Saint-Martin.
" B. - Robert Ambelain, pour sa part, reconstitue l'Ordre des Elus Cohen, en 1942, sous le patronage de Georges Bogé de Lagrèze, Chevalier Bienfaisant de la Cité Sainte et peut-être Grand Profès (non liquet) et de Camille Savoire, Chevalier Bienfaisant de la Cité Sainte. Il l'associera à partir de 1958 à l'Ordre martiniste Cf Chap. IV, Le Grand Maître Lagrèze habilite, le 12 novembre 1945, 1' Imperator de l'AMORC à établir loges et chapitres de son Ordre aux Etats-Unis d'Amérique et au Canada. A la mort de Lagrèze, en 1946, Ambelain lui succède.
En 1967, Ambelain démissionne au profit d'Ivan Mosca. Celui-ci reprend pour son Ordre
en même temps que l'indépendance son titre primitif ~< Ordre des Chevaliers Maçons
Elus Cohen de l'Univers et pour lui le titre non moins primitif ~< grand souverain ~> (Cf
L'lnitiation, juillet-décembre 1967, p.ll3). Mais inquiet de la légitimité du réveil de 1942, il
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8 ne tarde pas (1968) à mettre l'Ordre en sommeil, pour une durée indéterminée (Cf l'Initiation, octobre, décembre 1968, pp. 230-231).
- C. - L'histoire de l'Ordre des Elus Cohen relève directement de l'histoire de la FrancMaçonnerie. Cet Ordre est un Rite maçonnique. Ses modernes champions ont continué à le tenir pour tel et il est caractéristique que la maçonnisation de l'Ordre martiniste par Bricaud ait coïncidé avec sa revendication de l'héritage martinésiste. 2 - Les néo-Cohen sont-ils héritiers légitimes? La question exige, tant elle fut embrouillée, une réponse exacte, et, d'abord, à cette fin, une analyse systématique du problème.
" A. - Suivant l'enseignement et la pratique constante de Martines de Pasqually, premier grand souverain connu de l'Ordre dit, en abrégé, des Elus Cohen, on tiendra pour acquis:
I'entrée et le progrès dans l'Ordre s'effectuaient par la communication d'initiateur(s) qualifié(s) à récipiendaire qualifié (et, au cas du degré suprême de Réau-Croix, d'ordinant(s) qualifié(s) à ordinand qualifié, selon des modalités différentes et successives correspondant aux grades hiérarchiques, d'un influx sui generis; toutes réserves faites sur l'origine et la nature de cet influx.
- B. - L'histoire nous assure que les détenteurs de cet influx, qualifiés pour le transmettre, ont existé jusque dans le premier tiers du XlXè siècle; toutes réserves faites sur le nombres de grades que chacun avait ou n'avait pas, respectivement, le pouvoir de conférer. (En effet, tout Cohen n'était pas autorisé - question de validité? question de licéité? voilà un hic subsidiaire - à conférer seul son propre grade, ni même les grades inférieurs au sien, ni, évidemment, ceux qui lui étaient supérieurs. Tout Réau-Croix, en particulier, n'était pas autorisé à ordonner un autre Réau-Croix, c'est, par exemple, la raison, ou l'une des raisons pourquoi Saint-Martin refusa, peu avant sa mort, d'ordonner Joseph Gilbert, son ultime disciple).
3 - A. - La seule prétention contemporaine de moi connue, à détenir la succession cohen en ligne directe, a été exprimée par Jean Bricaud (Cf Notice historique sur le martinisme, nouv. éd., Lyon, Editions des Annales initiatiques, 1934, p. 10. La première edition est de 1928). Bricaud nomme les frères Bergeron et Bréban-Salomon, le médecin danois Carl Michelsen; Edouard Blitz, surtout, médecin américain (d'origine israélite belge, préciseraije), ~< héritier légitime de Martinez et successeur direct de Willermoz et d'Antoine Pont. Blitz aurait, semble-t-il, d'après Bricaud, initié à son tour Fugairon et Charles Détré, dit Téder. Bricaud se donne pour rattaché lui-même à cette lignée, mais ne dit pas quel aurait été son propre initiateur.
" B. - Inutile d'entrer dans le détail. Rappelons seulement la magistrale critique avancée par
Robert Ambelain (Le Martinisme contemporain et ses véritables orgines, Paris, Les
Cahiers de Destins, 1948, pp. 22-30). Au terme de cette analyse dévastatrice et inattaquable, il appert que non seulement aucun des personnages cités par Bricaud, ni, par conséquent, Bricaud luimême, n'a été certainement en possession de la succession cohen (I'absence de preuves est totale et aux prétendants appartient la charge de prouver); mais encore que tous les indices décelables vont à l'encontre d'une telle hypothèse.
Mes recherches dans le fonds Papus conservé à la Bibliothèque municipale de Lyon et
dans les divers fonds privés d'archives relatives à l'Ordre des Chevaliers Bienfaisants de la
Cité Sainte et au Rite Ecossais Rectifié, rendent plus invraisemblable encore, pour ne pas
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9 dire impossible, que Blitz et Téder, en particulier (et ils sont les deux hommes clefs de la filiation revendiquée par Bicaud) aient été en possession de la succession cohen. Ajouter qu'une confusion a pu se produire chez Bricaud entre succession cohen et succession de la Grande profession du Régime Ecossais Rectifié, dont il n'entretenait qu'une idée très vague et qui n'est effectivement pas sans rapport avec le martinésisme, quoiqu'elle n'ait rien à voir avec l'Ordre des Elus Cohen.
En résumé, Bricaud a parlé sans produire de preuves et son affirmation est des plus constestables.
4. - L'influx en cause dans l'Ordre des Elus Cohen étant sui generis (même si cette proposition signifie seulement que l'Ordre des Elus Cohen a sa personnalité propre), la succession cohen qui le transmet ne peut être identifiée elle-même avec aucune des successions suivantes (contrairement à la démarche qui prétendit justifier certains réveils); toutes réserves faites sur le caractère hypothétique ou fallacieux de l'une ou de l'autre desdites successions:
A. Succession apostolique.
B. Succession dite gnostique, de Jules Doinel.
C. Succession dite martiniste, de Louis-Claude de Saint-Martin.
D. Succession de la Société des Philisophes Inconnus.
E. Succession des Philosopbes Inconnus.
F. Succession des propriétaires d'une partie des archives, en partie cohen, de Jean-
Baptiste Willermoz. (Si étrange qu'il y paraisse, Papus semble avoir cru, ou laissé croire, que la propriété de certains papiers cohen - à lui échus dans des circons-tances bien élucidées par Jean Saunier, <~ Elie Steel-Maret et le renouveau des études de la Franc-Maçonnerie illuministe à la fin du XIXè siècle, Revue de l'histoire des religions, juillet, 1972, pp, 53-81 -, équivalait à quelque investiture, voire à quelque initiation !)
" La succession cohen ne peut non plus être identifiée avec la succession des Grands Profès, classe secrete de l'Ordre intérieur des Chevaliers Bienfaisants de la Cité Sainte; cette succession s'étant d'ailleurs perpétuée jusqu'à nos jours, comme il a été officiellement révélé en 1969, pour arrêter les ragots et prévenir des profanations (Cf Maharba, <~ A propos du Régime Ecossais Rectifié et de la Grande Profession ~>, Le Symbolisme, octobre-décembre 1969, pp,63-67).
J.-B. Willermoz a défini le sens où il rédigea l'instruction secrète de la Grande Profession, dont il est le fondateur, en écrivant: Lié d'une part par mes propres engagements [sc. de secret envers l'Ordre des Cohen] et retenu de l'autre par la crainte de fournir des aliments à une frivole curiosité, ou de trop exalter certaines imaginations, si on leur présentait des plans de théorie qui annonceraient une pratique, je me vis obligé de n'en faire aucune mention et même de ne présenter qu'un tableau très raccourci de la nature des êtres, de leurs rapports respectifs, ainsi que des divisions universelles. (A Charles de Hesse-Cassel, du 12 octobre 1781, ap. G. Van Rijnberk, Martines de Pasqually, t.l, Paris, Alcan, 1935 p.l68) Et il y a d'autres textes !
Comment, dès lors, prétendre que l'acces à la Grande Profession, que suffit à donner la communication autorisée de l'instruction secrète y afférente, comportait l'initiation ou l'ordination à un degré cohen, quel qu'il Mt?
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6. Conclusions:
A. - Personne, à notre connaissance, ne détient aujourd'hui la succession cohen, ni au sein d'aucun Ordre, ni en sauvage.
B.- Il est possible, à strictement parler, que la succession cohen se soit perpétuée jusqu'à aujourd'hui, à notre insu. Mais cette éventuali~e ~emblc très improbable. C. - Il y aurait beaucoup à écrire sur la transmission légitime des pouvoirs initiatiques. On ne voit pas pourquoi des organisations entierement disparues aujourd'hui ne pourraient être relevées s'il s'avère que leur tradition ésotérique a été retrouvée et pourvu que l'investiture initiatique leur soit conférée régulièrement, c'est-à-dire hiérarchiquement. Les choses qui ont cessé d'exister sur le plan historique visible demeurent vivantes et virtuelles sur le plan spirituel. Il ne s'agit pas de recréer, mais de ré-animer. (Hervé-Masson, Des processus psychologiques du symbolisme, Le Symbolisme, octobre-décembre 1965, p. 51. n.l.). Si l'on admet la perspective ainsi ouverte, tout essai de réanimation de l'Ordre des Elus Cohen n'exigerait que la fidélité la plus profonde à l'enseignement de Martines de Pasqually, gnostique et kabbalistique, relevant de l'ésotérisme judéo-chrétien; à la structure administrative de l'Ordre, qui est de caractère maçonnique; au rituel, et notamment à la théurgie cérémonielle. Cette théurgie, au demeurant, perrnettrait, grâce aux éventuelles réponses de la chose, de verifier expérimentalement la réanimation de l'Ordre, le rattachement réinventé à sa succession interrompue.
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CHAPITRE II
LOUIS-CLAUDE de SAINT-MARTIN LE PHILOSOPHE INCONNU 1. - Esquisse biographique.
Louis-Claude de Saint-Martin (qui ne fut jamais marquis) est né à Amboise, le 18 janvier 1743. A trois ans, il perd sa mère; à six ans, il trouve une mère qui incarne la mère idéale, Elle l'enchantera. Les études commencées avec un précepteur, se poursuivent au collège de Pontlevoy (1755-1759), puis à la Faculté de Droit de Paris (1759-1762), d'où il sort licencié. Premières lectures, premières empreintes: Abadie, Burlamaqui (il adhère), la tourbe philosophique (il réagit là contre); et, bien sûr, les romans, le théatre, la poésie tant des anciens que des classiques et des contemporains (il goûte et prend garde). La musique le séduit pour la vie: théorie de l'harmonie et pratique du violon. S'il avait occupé plus de six mois (1764-1765) I'office d'avocat du roi du baillage et le siège présidial de Tours, il eût sans doute succombé à la tentation, qu'il avouera, de se suicider. L'état militaire lui agrée davantage. Il y demeure six ans (1765-1771). Dès son arrivée au Foix-Infanterie, alors stationné à Bordeaux, des camarades le devinent et l'initient aux mystères maçonnico-théurgiques des Elus Cohen: initiation selon l'externe. A partir de 1769, il passe ses quartiers d'hiver auprès de Martines de Pasqually, fondateur et Grand Souverain de l'Ordre, son premier Mâître. En 1771, il abandonne le service pour mieux suivre la carrière. Il ré-i(le à Lyon, en Touraine, à Paris surtout où le succès équivoque du livre Des Erreurs et de Ia vérité l'introduit dans le monde. Par deux fois, il visite l'ltalie (1774-1787), un voyage le mène à Londres (1787). Vite, il s'est méfié des chapelles, sauf à y porter la tlonl~ arole et la discorde, sauf aussi qu'à Lyon, en 1785, il s'éprend des communications medi~lltlniques de 1' Agent Inconnu. Il ne tarde pas à s'en déprendre, mais il en gardera la tra~: c'était du martinésisme sauvage.
Surgit, à Strasbourg, en 1788, son deuxième Maître, le cordonnier illuminé de Goerlitz, son chérissime Jakob Bohme (1575-1624), qu'il rencontre grâce aux ouvrages à lui tendus par sa chérissime Charlotte de Boecklin; Jakob Bohme dont il ne tâchera plus qu'à célébrer le mariage avec Martines. La Révolution francaise l'éprouve et l'emplit d'espoir; la providence y place la mort de son père (1793). Thermidor arrive à point pour que sa situation ne se gâte. Très attentif, Saint-Martin se renseigne amplement, mais enseigne avec discrétion, dans maintes conférences particulières et dans une conférence publique avec Garat, en 1793; dans des livres de marche moyenne, souvent lente. Aucun discours de lui qui n'encoura I'homme de désir et ne lui apprenne, au-delà de l'ecce homo, comment et pourquoi naît le nouvel homme, auquel incombera le rninistère de l'homme-esprit. Le Philosophe Inconnu, cormne il avait obtenu qu'on le désignât, mouru~ le 1~ octobre 1803, à Châtenay près de Paris, assez ignoré et fort mal compris. (Préface, pp. 9-10, à la rééd. 1973 [ Bibliothéque 10/18 ]-1979 [ Monaco, Ed. du Rocher ] de l'Homme de désir. Cf. Calendrier de la vie et des écrits de Louis-Claude de Saint-Martin, premiere partie, 1743-1777, N spécial de Renaissance traditionnelle, janvier 1978: suite et fin à paraître ibid.)
II. - Ecrits.
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1. - Voici la liste complète des écrits publiés de Saint-~1artim pour la premiere fois imprimée, d'apres ma Bibliographie générale des écrits de eet auteur (Paris, 1967; e~emplaires déposés à la Bibliothèque nationale et à la bibliothèque de la Sorbonne).
" Des Erreurs et de la vérité, 1775.
" Ode sur l'origine et la destination de l'homme, Ca. 1781.
" Tableau naturel des rapports qui existent entre Dieu, I'homme et l'univers, 1782.
" De la Poésie prophétique, épique et Iyrique.?
" Phanor, poème.?
" Discours sur la meilleure manière de rappeler à la raison les nations livrées aux erreurs et aux superstitions. Ca. 1785.
" L'Homme de désir, 1790.
" Ecce homo, 1792.
" Le Nouvel homme, 1792.
" Lettre à un ami, ou considérations... sur la Révolurioon Jrancoise; suivies du précis d'une conférence publique..., 1795.
" Stances sur l'origine et la destination de l'homme, 1796.
" Eclair sur I 'association humaine, 1791.
" Réflexions d'un observateur sur la quesrion: Quelles sont les institutions les plus propres à fonder la morale d'un peuple? 1797.
" Essai sur les signes et sur les idées. 1799.
" Le Crocodile, 1799.
" Recension du Crocodile. 1799.
" De l'Esprit des choses, 1800.
" L'Aurore naissante... de Jakob Bohme, 1800.
" Le Cimetière d 'Amboise, 1801.
" Controverse avec Garat, 1801.
" Des Trois principes de l'essence divine... par Jakob Bohme, 1802.
" Le Ministère de l'homme-esprit, 1802.
" OEuvres posthumes, 1807.
" Quarante questions... par Jakob Bohme, 1807.
" De la Triple vie de l'homme... par Jakob Bohme, 1809.
" Des Nombres, 1843.
" Cinq textes inédits, 1959.
" Mon portrait historique et philosophique, 1961.
" Conférences avec M. Ie chev. de Boufflers, 1961.
" Conférences avec M. Le Roux, docteur en médecine, 1961.
" Pensées mythologiques, 1961.
" Cahier des langues, 1961.
" Varia, 1962.
" Fragments de Grenoble, 1962.
" Pensées sur I 'Ecriture sainte, 1963- 1965.
" Etincelles politiques, 1965-1966.
" Cahier de métaphysique, 1966-1968.
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" Carnet d'un jeune Elu Cohen, 1968.
" Notes sur les Principes du droit naturel de Burlamaqui, 1969.
" Réflexions sur le magnétisme, 1969.
" Du somnambulisme et des crises magnétiques, 1969.
" Mon livre vert. en cours de publication.
" Pensées sur les sciences naturelles. A parâître.
" Oeuvres nouvelles (fonds Z). A paraître.
2. - La Correspondance éditée comprend de très nombreuses lettres, toutes posthumes, sauf une à Matthias Claudius et la lettre à Garat qui est une lettre ouverte. Elles ont été publiées, celles à Kirchberger, dans un livre (1862); les autres, à des destinataires différents, en divers lieux.
La Correspondance générale en deux volumes est sur le métier.
3. - Edition collective, en sept volumes, des OEuvres majeures de Saint-Martin, chez
Georg Olms, Hildesheim, R.F.A., 1975 -..., en voici l'économie avec les titres abrégs: I. - Des
Erreurs; Ode et Stances; II. - Tableau naturel, Discours; III. - L'Homme de désir; IV. - Ecce homo, Le nouvel homme; V. - De l'Esprit des choses, Controverse avec Garat; VI. - Le Ministère de 1'homme-esprit; VII. - Notes et documents.
4. - Les livres et articles en tout ou en partie consacrés au Philosophe Inconnu ont été répertoriés dans la Bibliographie saint-martinienne. Voir aussi "Etat présent des études saintmartiniennes" ap. Saint-Martin, Mon portrait..., nouv. éd., Monaco, Ed. du Rocher, 1980.
5. - La Chronique saint-martinienne (d'abord publiée dans les Cahiers de la Tour Saint-Jacques, puis dans les Cahiers de l'homme-esprit, et présentement sous forme séparée), est le bulletin de lia son et d'information de tous les arnateurs du Philosophe Inconnu, saintmartiniens et martinistes.
Et consulter, bien sûr l'lnitiation, passim.
6. - Néanmoins, une décourverte majeure exige d'être ici rapportée telle qu'elle fut annoncée dans l'Initiation, juillet-septembre 1978, pp. 174-175: celle du fonds Z. LE CIEL SOURIT AUX MARTINISTES.
La chose la plus merveilleuse, la plus extraordinaire, la plus étonnante... Mais non ! Cette découverte, qu'on exulte d'annoncer ici, est tout simplement unique, c'est-à-dire d'une importance sans seconde pour connaître LouisClaude de Saint-Martin. Elle nous procure, en effet, la fleur des papiers personnels du théosophe.
Il est vrai qu'en quête des ces papiers, j'avais recueilli d'abord, en 1953, à Londres, une copie des écrits dont le petit-cousin Nicolas Tournier avait hérité - le fameux manuscrit Watkins; puis, en 1954, près de Munich, le Portrait autographe.
Cette année 1978, I'Initiation a révélé l'existence d'autres originaux en provenance du lot échu à Tournier.
Mais restaient dans l'ombre - à moins qu'ils n'eussent été anéantis - les documents, précieux entre tous, qui étaient passés, après la mort du Philosophe Inconnu, entre les mains de Joseph Gilbert. Les premiers biographes, Gence, Caro, Matter, y faisaient allusion... Or, les voici retrouvés, hosannah ! La tache de les publier sera lourde, mais elle m 'enchante.
Pour l'heure, j'en suis au dépouillement et au classement.
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Mais la première revue est achevée. En voici le compte très sommaire:
SAINT-MARTIN:
Des Nombres - De l'Origine et de l'Esprit des formes - Leçons de Lyon - Notes diverses et
nombreuses, notamment sur la langue hébraique - Lettres ((notamment à Gilbert el à Bourgeois
de Lausanne). MANUSCRITS AUTOGRAPHES. Copie très minutieuse des lettres à
Kirchberger et à Effinger.
KIRCHBERGER.
Lettres à Saint-Martin. MANUSCRIT AUTOGRAPHE.
MARTINES DE PASQUALLY.
Traité de la réintégration. COPIE PERSONNELLE DE SAINT-MARTIN.
DOCUMENTS COHEN:
Catéchisme de tous les grades - Rituels de réunion et de réception - Rituels très complèts d
'opérations - Tableaux et dessins théurgiques (dont quelques-uns se trouvent à la B.M. de
Grenoble) (1) - Table des 2400 noms - Recueil d'hiéroglyphes - Prières, prosternations,
instructions, etc... COPIES PERSONNELLES DE SAINT-MARTIN.
COMMUNICATIONS SOMNAMBULIQUES.
(dont celles de l'Agent inconnu). COPIE PERSONNELLE DE SAINT-MARTIN.
DOSSIER CHAUVIN, relatif à l'histoire posthume des papiers de Saint-Martin.
Ces quelque mille sept cents pages apporteront une contribution inégalable à l'histoire du martinisme: enfin une édition correcte des Nombres, enfin les lecons de Lyon dans le texte du professeur (car mon hypothèse que Saint-Martin enseignait et que les notes de Willermoz avaient été prises par un auditeur est désormais prouvée), enf n ce tant espéré Traité des formes, etc... etc. Mais aussi, enfin la clef de la théurgie cohen. Etc... etc.
Ce fonds, providentiellement retrouvé, sera désigné sous le nom de fonds Z. Alors que l'ésotérisme, et Saint-Martin luimeme,attirent les nouveaux cacouacs (2), quelle consolidation, quel encouragement,quel signe, pour les martinistes !
Aux papiers de Saint-Martin sont joints d 'autres papiers venus à Gilbert d 'un autre théosophe:
Fabre d'Olivet. C'est aussi que l'on dispose maintenant de la fin du manuscrit de la Théodoxie universelle, dont Dorbon-Ainé avait publié en fac-similé le début. L'édition de ces pages ne doit pas tarder.
Chose merveilleuse, extraordinaire au plus haut point, pourquoi pas, après tout, encore que ce soit trop peu dire ! Mais, au bout du compte, rien de moins étonnant. 29 avril 1978.
(1) A propos du fonds coën de Grenoble (fonds Prunelle de Lière), il faut rappeler qu'un
inventaire détaillé en a été publié pour la première fois dans la Bibliographie générale des
écrits de Louis-Claude de Saint-Martin (1967), N 249, pp. 221-223. L'édition des principaux
documents théurgiques de ce fonds a été annoncée à mainte reprise (par exemple,dans
l'Initiation, avril-juin 1969, p. 109, sous le couvert de mon collaborateur et ami Jacques
Baradate et dans le Dictionnaire Universel de la Franc-Ma,connerie (1974), article ~< Martines
de Pasqually)), p. 840. Grâce à Dieu, cette édition a été retardée, car seul l'ensemble rituel constitué et conservé par SaintMartin, dans le fonds Z aujourd'hui, donne tout leur sens aux éléments en provenance de Prunelle de Lière. C'est donc en articulation avec l'édition des pièces du fonds Z que seront publiées ou signalées celles de la B.M. de Grenoble.
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(2) CACOUACS. Nom donné par les défenseurs de la religion aux Philisophes du parti
encyclopédique, autrement dit aux philosophistes, à partir de 1747, à la suite de la
publication anonyme de Mémoire et du Nouveau Mémoire pour servir à l'histoire des cacouacs,
par J.-N. Moreau, dirigé contre les pseudophilosophes (N.D.L.R.) L'édition du fonds Z sera assurée par les Editions de la Maisnie, Guy Trédaniel, éditeur à Paris.
III. - La Théosophie de Saint-Martin.
Le Philosophe Inconnu est - I'aurai-je assez répété? - un théosophe méconnu. Je veux dire que sa pensée n'est pas philosophique, sauf peut-être à prendre le terme en une vieille voire primitive, acceptation; elle est théosophique (et donc gnostique). La théosophie, qui n'est pas la philosophie, n'est pas davantage la théologie et elle constitue une forme particulière de la mystique qu'on nomme spéculative Mais elle réconcilie la philosophie et la théologie. Voyez ce qu'on peut tirer de là quant à la signification de la théosophie au siècle des Lumières.
La théosophie est un illuminisme, car la lumière, même parfois physique, est le symbole privilégié de la Sagesse et la quête sophianique est celle de l'illumination. Et c'est une quête en profondeur; de l'intérieur, par l'intérieur (I'interne, dit Saint-Martin), donc un ésotérisme.
La théosophie prescrit une activité ad extra que Kirchberger, ami de Saint-Martin, qualifiait de scientifique et une activité ad intra que le même qualifiait d' ascétique)n Ces deux actiités, dont Saint-Martin souligne la conjugaison, procèdent d'une même vision unitaire de Dieu, de l'homme et de l'univers, de leurs rapports donnés en un tableau naturel, dont précisément la Sagesse fait à la fois l'oeil et l'objet.
Nous sommes tous veufs, notre tâche est de nous remarier. Nous sommes tous veufs de la Sagesse. C'est après l'avoir épousee, et d'abord cherchée puis courtisée, que nous pourrons engendrer le nouvel homme en nous, devenir nouvel homme. Or, tout est lié au nouvel homme: la médecine vraie, la royauté vraie, la poésie vraie, le sacerdoce vrai ne peuvent être exercés que par l'homme régénéré, autrement dit le nouvel homme. La théosophie saint-martinienne est une mystagogie de la génération spirituelle. Cette doctrine s'édifie comme un martinésisme en traduction et, quant à la théurgie, en transposition, que Bohme, à partir de 1788, confortera et explicitera sur plusieurs points9 telle la sophiologie.
Saint-Martin, dans son vocabulaire qui module les notions martinésiennes, s'est efforce de rappeler les vérités premières que voici: la dignité de l'homme malgré son avilissement dans cette région de ténèbres; la distinction, par conséquent, de l'homme et de la nature, du physique et du moral; comment la science de l'homme, seule nécessaire, seule vraie science, est inscrite dans l'univers entier, dans les sciences de tous genres, les langues, les mythologies et les traditions de tous les peuples. Même les livres sacrés sont comme des accessoires postérieurs aux vérités qui reposent sur la nature des choses et sur l'essence constitutive de l'homme.
Surtout, l'homme est la clef, expliquons les choses par l'homme et non pas l'homme par les choses. L'âme humaine est le suprême témoin.
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Admirer et adorer constituent le privilège de l'homme et la base sur laquelle doit reposer son mariage au temporel et au spirituel.
Il faut s'occuper de l'homme-esprit et de la pensée avant de s'occuper des faits, afin que germe ou sorte notre propre révélation, car toute chose doit faire sa propre révélation. Avec des mots inspirés par Bohme, Saint-Martin exprime ainsi, dans son style, le but de la théurgie cohen, qu'il veut atteindre, mais autrement que Martines: Nous sommes libres de rendre par nos efforts à notre être spirituel notre première image divine, comme de lui laisser prendre des images inférieures désordonnées et irrégulières, et que ce sont ces diverses images qui feront notre manière d'être, c'est-à-dire notre propre gloire ou notre honte dans l'êtat à venir.
Si la théurgie n'est pas nécessaire, c'est que Saint-Martin, judéo-chrétien comme Martines, est plus chrétien alors que le second est plus juif. La déité du Christ le qualifie comme médiateur suffisant et nécessaire. Saint-Martin ne rejette pas la théurgie, il l'intériorise. Car, si le Christ est Dieu et le nouvel homme un autre Christ,le théurge chrétien n'a besoin, pour revenir et contribuer au retour de tout être émané dans le Principe, que de se régénérer. Il doit, à cette fin, posséder la Sagesse. Et commencer par la chercher. Cette recherche~ cette p~ssession ont nom théosophie ~>. Et leur instrument à nom volonté ~>. Le premier exposé systématique de la doctrine est en cours de publication dans l'lnitia~ion, 1975: No 4, pp. 183-197; 1976: No 1, pp. 22-35; No 2, pp. 77-91; No 3, pp. 154-162; No 4, pp. 219-224; 1977: No 1, pp. 33-39; No 2, pp. 75-84; No 4, pp. 219-224; 1978: No I, pp. 3542; l~lo 2, pp. 83-88: 1979: No I, pp. 25-3~; No ~, pp. 81-87 A paraâre en un volume:
Le Théosophe méconnu. Initiation à Saint-Marrin.
IV. - Saint-Martin et la Franc-Maçonnerie.
Le problème des rapports entre Saint-Martin et la Franc-Maçonnerie, qui touche à tant d'autres problèmes, a été traité dans les études suivantes; Saint-Martin Franc-Maçon, L'Inltiation, avril-juin 1965, pp. 82-91; Louis-Claude de Saint-Martin et la FrancMaçonnerie, Le Symbolisme, janvier-juin 1970, pp. 123-180, juillet-septembre 1970, pp. 285-307, janvier-février 1971, pp. 43-73. Introduction à Des erreurs et de la vélité;
Oeuvres majeures, t. I (1975) et notes et documents correspondants in vol.
VII. - Des compléments se trouvent dans le Calendrier de la vie et des écrits de Louis-
Claude de Saint-Martin, ainsi que dans Saint-Martin et la Franc-Maçonnerie, additions et précisions, in Chronique saint-martinienne, passim.
Voici le schéma de la solution:
1. - Saint-Martin a été Franc-Maçon. A-t-il reçu la lumière avant de rencontrer l'Ordre des Elus Cohen? Willermoz l'assure. Je ne sais. Si ce fut, ce pourrait avoir été dans la Loge Ecossaise La Concorde, fondée en 1745 à l'Orient de Tours, qui comptait parmi ses membres Burdin (qui sera Vénérable en 1763 ou 1764), dont Saint-Martin connaissait et aimait la famille.
2. - Saint-Martin reçut, en une seule fois, les trois grades cohen, dits du Porche, par le ministère du frère Baudry de Balzac, entre l'été 1765 et l'hiver 1768, probablement en 1765 ou 1766.
3. - Entre le 25 novembre et le 15 décembre 1768, Grainville et Balzac (très probablement)
I'ordonnent Commandeur d'ORIENT.
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4. - Martines de Pasqually l'ordonne Réau-Croix vers le 17 avril 1772.
5. - En 1773, Saint-Martin s'associe à la requête que les Frères Iyonnais adressent à Weiler. En 1774, il est admis à être reçu dans la Stricte Observance Templière. Mais, le moment venu, en 1774, il fait défaut.
6. - En 1785, afin de se qualifier pour l'entrée dans la Société des Initiés (Cf infra). Saint-Martin accepte d'être affilié à la Loge Ecossaise Rectifiée la Bienfaisance à l'Orient de Lyon, adoubé Chevalier Bienfaisant de la Cité Sainte f Eques a leone sidero). Le 24 octobre, il est reçu Profès et Grand Profès.
7. - En 1790, il demande à être rayé des registres maçonniques où depuis longtemps (ciepuis toujours?) il ne figurait que de nom. (Son nom figure sur les tableaux de loge, de 1786 à 1791).
8. - Saint-Martin n'a jamais appartenu au Rite des Philalèthes, quoique, selon Savalette de Lange, il y ait été candidat à la douzième classe. en 1782. Invite a leur Convent de 1785, il ne s'y rendit pas.
9. - Saint-Martin a appartenu aux sociétés para-maçonniques suivantes:
a) la Société des Initiés, fondée sur les instructions de l'Agent Inconnu et dans la mouvance
de celle-ci. Reçu le 4 juillet 1785, après avoir été adoubé Chevalier Bienfaisant de la Cité
Sainte (Cf supra);
b) la Société de l'harmonie, de Mesmer; reçu le 4 février 1784; c) la Société philantropique, dont il fut membre fondateur en 1780 et sur l'ar~nuaire de laquelle son nom figure jusqu'à sa mort.
10. - Saint-Martin n'est pas l'auteur de la devise quarante-huitarde que le Grand Orient de France adopta en 1849: Liberté, Egalité, Fraternité.
11. - Saint-Martin n'a fondé aucun régime, aucun rite, aucun ordre maçonnique - ni aucun ordre ou société d'aucune sorte.
Sur l'Ordre martiniste et la prétendue initiation de Saint-Martin, cf. infra, chap. IV.
12. - Saint-Martin, le vrai, ou un Saint-Martin mythique, a été mêlé, bon gré mal gré, aux
querelles du jésuitisme et de l'anti-jésuitisme en Maçonnerie, etc. (Cf l'introduction à
l'édition des Erreurs et de la vérité, dans les OEuvres majeures).
13. - Le symbolisme maçonnnique, le vocabulaire maçonnique ont laissé leur trace sur les écrits de Saint-Martin.
14. - La pensée maçonnique, que ces formes véhiculent (et qui les mutile), aussi. Cependant, la Maçonnerie que Saint-Martin chérit un temps, et à laquelle il resta toujours reconnaissant, fut celle des Elus Cohen, fort particulière en vérité et ce n'est pas l'aspect maçonnique de la secte martinésiste qui l'avait séduit le plus.
15. - Saint-Martin est un grand écrivain maçonnique. Son oeuvre est capable de contribuer au développement de la spiritualité chez les Maçons et très particulièrement, chez les Maçons Ecossais Rectifiés: dans sa fidélité à la doctrine de Martines de Pasqually il est de leur bord, par l'explication qu'il en donne il a droit d'être reconnu comme l'un de leurs docteurs.
16. - Le texte suivant exprime assez bien le sentiment et l'opinion à peu près constants au
fond de Saint-Martin, s'agissant de la Franc-Maçonnerie: ~< Les personnes qui ont du
penchant pour les établissements et sociétés philosophiques, maçonniques et autres,
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18 lorsqu'elles en retirent quelques heureux fruits sont très portées à croire qu'elles le doivent aux cérémonies et à tout l'appareil qui est en usage dans ces circonstances. Mais avant d'assurer que les choses sont ainsi qu'elles le pensent, il faudrait avoir essayé de mettre aussi en usage la plus grande simplicité et l'abstraction entière de ce qui est forme et si alors on jouissait des mêmes faveurs, ne serait-on pas fondé à attribuer cet effet à une autre cause; et à se rappeler que notre Grand Maître a dit: Partout où vous serez assemblés en mon nom, je serai au milieu de vous. (Mon livre vert, article inédit).
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CHAPITRE III
LE RITE ECOSSAIS RECTIFIE
La Stricte Observance templière, dite aussi Régime, ou Rite, Ecossais Rectifié, à partir de 1770, a été réformée en Ordre des Chevaliers Bienfaisants de la Cité Sainte, au convent de Lyon, en 1778, pour les provinces françaises, et au convent de Wilhelmsbad, en 1782, sur le plan général.
Jean-Baptiste Willermoz (1730-1824) fut l'artisan de la réforme qui appropria mieux le Rite Ecossais Rectifié, selon l'essence de la Franc-Maçonnerie authentique, au dépôt de la plus profonde science de l'homme: la réintégration systématisée par Martines de Pasqually et travaillée, expliquée, diffusée par Louis-Claude de Saint-Martin (Sur J -B. Willermoz, reste fondamental: Alice Joly, Un Mystique lyonnais et les mystères de la Franc-Ma,connerie..., Paris, Mâcon, Protat frères, 1938; aussi de la même, en coll. avec R.A., De l'Agent Inconnu au Philosophe Inconnu, Paris, Denoël, 1962, Cf. Ies biblio. de Saunier et Amadou, ainsi que plusieurs titres référés dans le cours du présent chapitre)
KARL VON HUND ET LA STRICTE OBSERVANCE TEMPLIERE
La vie de Hund attend son historien, la Stricte Observance Templière (S.O.T.) aussi, qui fut
à peu près toute sa raison de vivre. Le livre posthume de Le Forestier, La Franc-
Maçonnetrie templière et occultiste aux XVlIIè et XIXè siècles (Paris, Aubier-Montaigne
et Louvain, Nauwelaerts, 1970), amasse une documentation énorme mais très incertaine. A ce jour, la meilleure mise au point est le numéro spécial du Symbolisme (juilletseptembre, 1968) consacré à la S~O.T. et au Rite Ecossais Rectifié.
Steel-Maret (ps. Bouchet et Boccard, Archives secrètes de la Franc-Maçonnetrie, Collège
métropolitain de France à Lyon, Ilè province dite d'Auvergne 1765-1852, Lyon, Librairie
de la Préfecture, 1893; nouvelle édition considérablement augmentée, avec une
introduction par Amadou et Saunier, à paraître); la Nouvelle notice histotrique..., signée
Un Chevalier de la Rose Croissante >) (ps Albéric Thomas, ap. Franz von Baader. Les
Enseignements secrets de Martines de Pasqually, Paris, Chacornac, 1900. pp.I-CXCII),
Albin von Reitzenstein (Die Strikte Observanz, Berlin, Wunder, s.d. (1907), Reinhold
Taute (Der Wilhelmsbader Konvent und der Zusammenbruch der Sttrikten Observanz.
Nach Otiginal- akten und zuverlassigen Quellen, Berlin, Wunder, s.d. (1909), Hiram (ps.
Bon),J.-B. Willermoz et le Rite Templier à l'O $ de Lyon, I (seul paru), Paris, Férération
nationale catholique, 1935), Louis Guinet, (Zachatrias Werner et l'ésotétrisme
maçonnique, La Haye, Mouton et Cie, 1962, à l'introduction); Wilhelm Mensing,
Der~reimaurerkonvent von Wilhe~msbad vom 147biszum 1-9-1782 am Vorabend derfranzosischen
Revolution von 1789, Bayreuth, Quatuor Coronati7 1974 (très bonne bibliographie, voire la
meilleure à ce jour); Documents strasbourgeois sur la Stricte Observance >), Renaissance
traditionnelle, avril 1978, N 34, pp. 89-128 (Particularités sur le baron de Hund, (<
Principaux événements de l'O.-. Intérieur dans la Vè depuis 1772 jusqu'en 1778,
Nomenclature des FF.. de 1' Ordre Intérieur documents tirés des Archives d'Etat de
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Vienne en Autriche); sont les plus utiles parmi les publications qui intéressent en tout ou en partie Hund et son Ordre et dont Amadou et Saunier ont établi la liste (Amadou, Bibliographie du Rite Ecossais Rectifié, hors commerce; Jean Saunier, Eléments de bibliographie, Le Symbolisme, octobre-décembre 1968, pp. 56-68, version conjointe et augmentée à paraître). Distingons, parmi les sources inexplorées, le dossier conser~é à la bibliothèque du Grand Orient des Pays-Bas (fonds KLCSS, 29).
Dans l'attente de l'historien espéré, dont la tâche ne sera ni mince ni facile, et faute de pouvoir résumer ici l'oeuvre de sa vie, ou presque, efforçons-nous au moins de distinguer le certain du douteux envahissant.
I. - Eléments biographiques.
1. - Karl Gotthelf Reichsfreiherr (baron d'Empire) ~on Hund und Altengrotthau naquit le 11 septembre 1722, à Altengrotthau, en Lusace (Silésie) d'une vieille famille de nobles terriens.
En 1737, orphélin de père, sa mère l'envoie a Leipzig où il devient étudiant à l'Université. Hund ne se maria pas. On dit que ce fut l'effet d'un chagrin d'amour: la fille de son hôte à Leipzig (d'aucuns disent que c'était son tuteur) serait morte lors de son séjour et il l'aurait aimée.
Fin 1742 ou début 1743, voyage à Paris. Là, conversion au catholicisme, selon ses propres mémoires, dont la Loge Minerva de Leipzig conservait le manuscrit avant la Deuxième Guerre mondiale. (On ignore où se trouve aujourd'hui la pièce, si toutefois elle n'a pas été détruite).
Des voyages en Angleterre et en Hollande sont douteux, un second voyage à Paris en 1754 I'est plus encore et semble destiné à mettre en rapport le baron avec le Chapitre de Clermont, pour justifier des prétentions que d'ailleurs il n'eut pas. En 1755, il est doyen élu des Etats de Haute-Lusace; en-1760, il est nommé conseiller intime d'Auguste III de Pologne; en 1769, conseiller d'Etat de l'Impératrice et conseiller intime de l'Empereur: peu de choses.
Il mourut le 28 octobre 1776 à Meiningen et fut inhumé à Mellrichstadt en Franconie. Sa famille s'éteint avec lui.
2. - L'Anti-Saint-Nicaise (1786-1787) le décrira de taille moyenne, de bonne apparence et d'une élégance discrète dans le vêtement, hospitalier, généreux. Quoique ces détails viennent d'une source apologétique, ce qu'on sait de la vie du baron confirme les traits moraux, et les traits physiques sont assez vraisemblables et pas trop flatteurs pour qu'on puisse les estimer probables.
3. - Karl von Hund a été très diversement jugé.
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Il ne fut pas un agitateur politique (Dr Emmanuel Lalande), mais il advint que la Stricte Obersenvance Templière donnât le sentiment de nourrir et, surtout que ses adversaires, de bonne ou de mauvaise foi, lui attribuassent des soucis politiques à elle étrangers. J'ai servi l'Ordre en honnête homme pendant vingt et un ans, écrivait Hund en 1776, en négligeant tout ce que ma naissance et ma noblesse auraient pu me donner auprès des ducs et des princes.
Je le crois, mais je souscrirais sans grande réserve à un autre jugement de Lalande (plus connu sous son pseudonyme occultiste Marc Haven) qui n'est pas contradictoire, mais dont la juxtaposition avec les lignes précédentes manifeste la complexité du personnage:
Le baron de Hund était d'intelligence ordinaire et d'une très grande vanité, ce qui s'accorde assez bien avec la taille de l'ex-libris, le manque d'unité du dessin, la surcharge des détails et la confusion des idées qui, sous une apparence en profondeur ont, en fait, peu de valeur philosophique. (Dr Emmanuel Lalande et Quenaidit, Deux ex-libris: maçonnique et cabalistique ; L'lnitiation, juillet-septembre 1968, pp, 132-146. Repris du Bulletin de la société... Le Vieux Papier, 1905, avec un avant-propos par Robert Amadou. Cf p.143, et l'ex-libris reproduit).
En fin de compte, ainsi m'apparâît-il: Contrairement aux légendes ni un pur naïf (il démasqua l'imposteur Johnson) ni un pur escroc (la patente de 1742 - ou environ - avait un sens puisqu'on a fini par la déchiffrer, selon H.S.). Mais il advint que l'enthousiasme et l'amour-propre l'aveuglassent et que, pris au piège, il persévérât malhonnêtement, pour sauver sa réputation et son Ordre, dans les erreurs qu'il avait commises de bonne foi au service de l'une et de l'autre.
Si la mystification attriste certains moments de la Stricte Observance Templière, lui, le fondateur de ce régime maçonnique, lui l'Eques ab Ense, fut plus mystifié que mystificateur; il ne devint mystificateur qu'après avoir été mystifié, acculé à la mystification.
La tromperie paya ses plus nobles élans et châtia ses pires passions. Le diagnostic d'Albéric Thomas, qu'entérine le Dr Emmanuel Lalande, est incomplet. A la mediocrité de l'intelligence et à la très grande vanité, il faut joindre au moins le goût des mystères efficaces et l'aptitude au dévouement. Ce goût était mal affiné, mais il était flatteur. Ce dévouement fut anarchique, il demeure respectable. (Avant-propos à Lalande et Quenaidit, art. cit. pp. 136-137).
Il. - Karl von Hund Franc-Maçon
1. - Hund fut Franc-Maçon, reconnu pour tel par ses Frères.
2. - Où et quand reçut-il la lumière maconnique? Je l'ignore.
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Certains auteurs (et Dieu ! qu'on se copie et recopie entre historiens de la FrancMaçonnerie !) tiennent qu'il fut initié à Francfort en janvier 1742 et ajoutent, parfois, dans une loge militaire, au voisinage du marquis de Belliste. Pourquoi pas? mais pourquoi? 3. - Le baron déclare avoir fait fonction de Vénérable Maître en chaire, lors de son séjour à Paris, le 20 janvier 1743 et de Premier Surveillant dans une autre loge parisienne, à la même époque.
Sur le chemin du retour, il avait visité des loges dans le Brabant. Non liquet. 4. - Hund a toujours maintenu cette affirmation capitale: à Paris, en 1743, il fut reçu dans la Maçonnerie templière et nommé a la tête de la VIIè province de l'Ordre par un personnage dont le nom in ordine était Eques a Penna rubra et l'identité civile: CharlesEdouard, le prétendant lui-même. C'est alors que Hund aurait pris son propre nom in ordine: Eques ab Ense. Le prétendant, en 1777, nia l'épisode et même qu'il eût jamais été Maçon. De plus, en 1743, Charles-Edouard n'était pas à Paris, puisqu'il n'y arrivera, en provenance de Rome, que le 20 janvier 1744.
IIl. - La Stricte Observance Templière: Histoire.
1. - Sur les antécédents de la Stricte Observance Templiere, beaucoup a été écrit sans preuves à l'appui: le Chapitre templier de Unwuerden, celui de Droysich, pour ne rien dire de l'activité, outre-Rhin, du Chapitre de Clermont avant 1754, c'est-à-dire avant sa fondation à Paris par Bonneville ! Tout ce qui concerne une éventuelle Maçonnerie templière en Allemagne avant le baron de Hund et même avec Hund avant 1750 environ est gratuit.
2. - La réforme dite de Dresde en 1755 est hypothétique. L'activité de Bieberstein en domaine templariste est réelle, mais obscure.
3. - L'installation par Hund, en 1749 ou en 1751 d'un Chapitre templier à Kittlitz, n'est pas prouvée.
4. - En 1755, Hund exhibe une patente codée, signée ~< Georges Guillaume, Chevalier du Soleil d'Or, Grand Maître de tous les Templiers, qui le nommait Grand Maître Provincial de la VIIè province de la Maçonnerie templière (réunissant les XIIIè et XIVè provinces de l'ancien Ordre du Temple).
D'aucuns pensent que la patente daterait en réalité de 1751, ce sont ceux qui relèvent des traces de l'activité templariste du baron avant 1755 et que la rétroactivité gêne. Quid de cette patente? Rien de clair.
5. - En toute hypothèse, c'est dans les années cinquante, en 1753 au plus tard, croirais-je, que Hund commence à organiser et a répandre la Maçonnerie templière.
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Schumacher, dit Rosa, soi-disant délégué du Chapitre de Clermont, et Samuel Leucht, dit Johnson, soi-disant délégué du Grand Maître de l'Ordre des Templiers de Londres, en font autant, chacun pour son compte. Ce sont deux imposteurs.
6. - Johnson démasque Rosa, séduit Hund qui le démasque à son tour lors du Convent d'Altenberg près d'Iéna en 1764. Johnson sera emprisonné à la Wartburg. Au cours du même Convent, Johann Christian Schubart présente un <~ plan économique qui prévoit la mise en commun des biens de tous les Frères. Il ne fut pas appliqué. Schubart, cependant, se démena pour l'Ordre. Il fonda, par exemple, à Chambéry la Loge La Sincérite que Joseph de Maistre rejoindra en 1773.
7. - En 1765, la Stricte Observance Templière pénètre en Suisse via Bâle. La rivalité oppose l'Ordre, tolérant, et Johann-August Starck, fondateur du Cléricat, autre organisation néo-templière, très catholique.
La loge de Hambourg, de 1737, rejoint l'Obédience de Hund, qui a le vent en poupe. En 1767, I'accord se fait entre les branches noble et cléricale de la Stricte Observance Templière, c'est-à-dire entre Hund et Starck. Le premier fait approuver les statuts qu'il a rédigés.
8. - 1770. Le Convent de Kohlo marque le Zénith de la Stricte Observance Templiere qui portera désormais aussi le nom de Régime, ou Rite Ecossais Rectifié. C'est la fîn, officielle, du mythe des Supérieurs Inconnus. (Quant aux Supérieurs Inconnus eux-mêmes, ils n'existèrent pas en dehors du mythe, n'en déplaise à l'imaginatif René Guénon, et à tant d'autres). L'accord avec le Cléricat est ratifié et Hund élu Grand Maître de la VIIè province. Enfin, Ferdinand de Brunswick est élu Grand Maître de toutes les Loges Ecossaises.
9. - En 1772, à Lyon, Willermoz apprend par une correspondance avec des Frères strasbourgeois l'existence de la Stricte Oberservance Templière. L'année suivante, il présente une requête à Hund, en vue d'y être admis avec quelquesuns des ses Frères et néanmoins amis. En 1774, le baron Weiler importe la Stricte Observance Templière à Lyon, après l'avoir établie l'an précédent à Strasbourg. 10. - En 1773, au Convent de Berlin, se rencontrent Zinzendorf et le Rite Suédois dont il est le champion en Allemagne avec la Stricte Observance Templière. 11. - En 1775, le Convent de Brunswick marque le déclin de l'Ordre. Hund, mis sur la sellette, est incapable de justifier ses titres. Sommé de désigner les Supérieurs Inconnus qui l'on investi, il déclare, en somme, forfait.
Au Convent suivant, à Wiesbaden, en 1776, il sera absent. Le meneur de jeu sera Gugomos, encore un imposteur. Cette année-là, meurt le baron.
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12. - Cette année-là aussi, les trois provinces qui constituent la Nation française signent un traité d'alliance avec le Grand Orient de France. Ce traité, signé le 13 février 1776, ne touche que les trois premiers grades et accorde à leurs titulaires un droit de visite réciproque en même temps que de double appartenance. (En marge, rappelons que l'Ordre des Chevaliers Bienfaisants de la Cité Sainte, à partir de 1778, loin de renier l'arrangement, y fera associer le Directoire de Septimanie (Montpellier). En 1804, il conclura un concordat avec le même Grand Orient de France, concordat renouvelé en 1811).
13. - 1778. Le duc Charles de Sudermanie, futur roi de Suède, est élu Grand Maître de la VIIè province en succession de Hund, par le Convent de Wolfenbuettel. Alliance et association avec le Rite Suédois, mais rupture avec le Cléricat peu auparavant. 14. - En 1782, c'est le fameux Convent de Wilhelmsbad. La réforme de Lyon, par laquelle, quatre ans auparavant (Convent des Gaules, 1778) Willermoz avait métamorphosé, à l'échelle nationale, la Stricte Observance Templière en Ordre des Chevaliers Bienfaisants de la Cité Sainte, est, en gros,adoptée pour l'ensemble de l'Ordre: triomphe de Willermoz... à la Pyrrhus.
15. - L'Ordre périclite. En 1783, le retrait de la célèbre Loge Les Trois Globes à l'Orient de Berlin donne un mauvais augure et un mauvais exemple.
Starck déclenche des attaques. S'engagent les querelles du crypto-catholicisme et du cryptojesuitisme en Maçonnerie. Lumières contre illuminisme, catholicisme contre prostestantisme, et bientôt contre-révolutionnaires contre le pays, et la Franc-Maçonnerie du pays où est née - est-ce un hasard? - la révolution (Cf le schéma de ces polémiques pour la première fois exactement tracé in introduction à Saint-Martin, Oeuvres majeures, vol. 1 (G. Olms Verlag, 1975) et v~l. VII, notes et documents y relatifs). 16. - Au début du XIXè siècle, la Stricte Observance Templière, ce qu'il en restait, disparâît. Ferdinand de Brunswic3~ était mort en 1797 et Charles de Hesse-Cassel, avec Christian de Hesse-Darmstadt pour substitut, lui avait succédé à la Grande Mâîtrise générale.
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IV. - La Stricte Observance Templière: Organisation.
D'une organisation qui fut, à son mieux, précise et minutieuse, citons quelques points, pour insinuer l'esprit de l'Ordre.
1. - Les armes de la Stricte Observance Templière sont deux cavaliers sur un même cheval
dans un écu écartelé de la croix de l'Ordre. Chaque province a, en outre, ses armes
propres. Ainsi la Vè province porte une tête de mort en argent sur champ de gueules et la
devise Mors Omnia Aequat.
2. - La hiérarchie des grades, dans les années 1770, était à peu près la suivante, qui semble s'être maintenue ensuite. Neuf grades en trois degrés: ler degré: Apprenti, Compagnon, Maître.
2è degré: Ecossais vert (dont le rituel a été publié dans le numéro spécial du Symbolisme sus-référé), Chevalier de l'Aigle Rose-Croix (ce grade était-il pratiqué en Allemagne, ou ne l'a-t-il été qu'en France?).
3è degré: Ecuyer novice, Chevalier (Chevalier profès).
Un grade d'Ecossais rouge fait problème, dans sa place hiérarchique, voire dans sa nature, voire dans son existence.
3. - Les neuf p}ovinces de la Sricte Observance Templière étaient les suivantes (on indique entre parenthèses les provinces affectées du même numéro dans l'Ordre des Chevaliers Bienfaisants de la Cité Sainte):
I. Aragon (Basse-Allemagne)
II. Auvergne (Auvergne)
III. Occitanie (Occitanie)
IV. Léon (Italie)
V. Bourgogne (Bourgogne)
VI. Grande-Bretagne (Haute-Allemagne)
VII. Basse-Allemagne (Autriche)
VIII. Haute-Allemagne (Russie)
IX. Grèce et archipel (Suède)
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L'Helvétie constitua d'abord un Sous-Prieuré rattaché a la Vè province, mais fut érigé en Grand Prieuré indépendant, I'an 1779, à la suite d'un voeu exprime par le Convent de Lyon.
4. - L'Ordre est administré selon le principe que l'autorité vient d'en haut. Le troisième degré régit le second qui régit le premier. Au sommet, un Grand Supérieur ou Grand Maître général, c'est-a-dire notamment international.
5. - Le rituel des grades bleus rappelle curieusement les plus anciens rituels connus sur le Continent (Saunier). Les Hauts Grades sont banaux dans le genre. Les rituels proprement templaristes sont fort dévots et intellectuellement pauvres. Ostabat a édité: Un rituel de Chevalier de la Stricte Observance, Le Symbolisme, juillet-octobre 1971, pp. 226-244. Les fêtes de l'Ordre étaient les suivantes: la Trinité, à cause de l'institution de l'Ordre;
Saint-Jean, à cause de sa restauration;
Saint-Jacques, à cause de Jacques de Molay, martyr; Saint-Hilaire, à cause de l'acceptation des régles;
Saint-Hugues, à cause du fondateur Hugues de Payens; le 2 juillet, à cause de la bataille près de Tibériade Saint-Sylvestre, à cause de Sylvestre, Grand Maître de Germanie, puis Grand Maître général.
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V. - La Stricte Observance Templière: remarques.
1. a) Hund ne s'est jamais réclamé du Chapitre de Clermont dont, en effet, le rôle semble nul dans l'histoire de la Stricte Observance Templière (je parle au plan des événements, non pas à celui des idéologies où les influences entre les rameaux maçonniques, surtout quand ils étaient du même genre écossais, et plus encore quand ils étaient du même genre templier, étaient fortes et mutuelles). b) La prétention de Hund était que Charles Edouard, en tout cas le Chevalier au plumet rouge de 1743, I'avait désigné pour succéder à G. H. Marshall von Bieberstein à la tête de la VIIè province; désignation confirmée, selon lui, rétroactivement par la patente de 1755 ou 1751.
Le comte de Saint-Germain, selon Charles de Hesse, avait soutenu la véracité, au cas particulier, du baron et ajouté que, si Hund avait succédé à Bieberstein, celui-ci avait eu pour prédécesseur le baron Rod de Konigsberg. Sans attacher à cette anecdote plus d'importance qu'elle n'en a probablement, souhaitons qu'un érudit essaie d'identifier ce baron Rod. c) La Stricte Observance Templière ne doit rien au Rite templier de Ramsay, par la simple raison que Ramsay n'a jamais fondé de Rite ni fabriqué de grade. (N'empêche qu'il soit un docteur de l'écossisme, le patriarche de la Maçonnerie mystique, comme dit joliment Pierre Chevallier). d) Le Rite Suédois n'est pas la Stricte Observance Templière, quoique les deux Rites se veuillent de tradition templière et que des contacts aient eu lieu au plan administratif comme ceux des rituels et des idées.
2. - Il est certain que la Stricte Observance Templière s'inscrit dans le cadre de l'écossisme.(Mais chez Anderson déjà, germe le templarisme.) Elle a développé la revendication templière et se proposait d'atteindre un double but: réhabiliter la mémoire des Templiers du Moyen Age, obtenir que lui soient dévolus leurs biens injustement accaparés, notamment par l'Ordre de Malte.
Dans la perspective de Hund, son templarisme ne démaçonnise en rien la Stricte Observance Templière; au contraire, puisque la Franc-Maçonnerie est l'héritière du Temple.
De la légende templière et de la légende stuardiste qui lui est associée d'ordinaire, il faut souligner le caractère légendaire, il faut enregistrer, comme un fait d'histoire, leur présence et leur influence en tant que mythes. Et que plus elles sont exaltées dans des sociétés, plus celles-ci attirent, pour de bonnes et de mauvaises raisons, les chercheurs spirituels et les amateurs de prodiges avec, en corrélation, les Maîtres honnêtes (au moins à demi) et les charlatans. La Stricte Observance Templière fournit le meilleur exemple de ce phénomène très naturel.
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L'ouvrage de Jean-Baptiste Willermoz sera d'apuration, d'épuration, de réalisation enfin des virtualités ésotériques incluses en la Stricte Observance Templière, de ses symboles avoués et de ceux aussi que son histoire légendaire pouvait constituer. (Mais Willermoz affirme un lien historique entre la Maçonnerie et l'Ordre du Temple. Cf par exemple, I'instruction d'Ecuyer novice).
3. Willermoz se disait dépositaire de quelques connaissances qui pouvaient s'adapter à la Maçonnerie au cas qu'elles lui eussent appartenu primitivement. Ces connaissances, il les a infusées par doses successives et croissantes dans le rituel des grades de la Stricte Observance Templière, après avoir apporté au contenant le minimum de corrections que le contenu imposait.
Il est certain que l'Ordre des Chevaliers Bienfaisants de la Cité Sainte a repris la forme de la Stricte Observance Templière, plus étroitement qu'on ne le suppose souvent mais en changeant son esprit, en substituant la doctrine de la réintégration de Martines de Pasqually à l'idéologie templière. (Exemple: au premier grade, le tableau représente une colonne tronquée, avec la devise odhuc stat. Interprétation de la Stricte Observance Templière: I'Ordre du Temple est décapité, mais le tronc demeure. Tous les espoirs sont permis. Pour les Chevaliers Bienfaisants de la Cité Sainte, tous les espoirs sont permis aussi, mais en un sens différent: I'homme est déchu, mais il possède encore le droit de vivre dans son principe et les moyens d'y retourner).
L'acte de renonciation adopté à Wilhelmsbad le 21 août 1782 marque la rupture idéologique dans la continuité formelle. En voici le résumé d'après le reces du Convent:
Un de nos premiers soins s'est tourné vers l'authenticité du système que nous avons suivi jusqu'aujourd'hui et le but final, où il doit conduire nos Frères.
Après plusieurs recherches curieuses sur l'histoire de l'Ordre des Templiers, dont on dérive celui des Maçons, qui ont été produites, examinées et comparées dans nos conférences, nous nous sommes convaincus qu'elles ne présentaient que des traditions et des probabilités sans titres authentiques qui puissent mériter toute notre confiance, et que nous n'étions pas autorisés suffisamment à nous dire les vrais et légitimes successeurs des Templiers que d'ailleurs la prudence voulait que nous quittions un nom qui ferait soupçonner le projet de vouloir restaurer un Ordre proscrit par le concours des deux puissances et que nous abandonnions une forme qui ne cadrerait plus aux moeurs et aux besoins du siècle.
En conséquence nous déclarons que nous renonçons à un système dangereux dans ses
conséquences et propre a donner de l'inquiétude aux gouvernements; et que si jamais
quelque Chapitre ou quelque Frère formait le projet de restaurer cet Ordre, nous le
désavouerions comme contraire à la première loi du Maçon, qui lui ordonne de respecter
l'autorité sauveraine. A cet effet et pour décliner à jamais toute imputation sinistre et
démentir les bruits semes indiscrètement dans le public, nous avons dressé un acte
souscrit par nous tous et au nom de nos commettants, par lequel nous consacrons cette
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29 détermination sage et prostestons au nom de tout l'Ordre des Francs-Maçons Réunis et Rectifiés devant Dieu et nos Frères, que l'unique but de notre association est de rendre chacun de ses membres meilleur et plus utile à l'humanité par l'amour et l'étude de la vérité, I'attachement le plus sincère aux dogmes, devoirs et pratiques de notre sainte religion chrétienne, par une bienfaisance active, éclairée et universelle dans le sens le plus étendu et par notre soumission aux lois de nos patries respectives. Nous ne pouvons cependant nous dissimuler que notre Ordre a des rapports réels et inconstestables avec celui des Templiers prouvés par la tradition la plus constante, des monuments authentiques et les hiéroglyphes mêmes de notre tapis; qu'il parâît plus que vraisemblable que l'initiation maçonnique, plus ancienne que cet Ordre, a été connue à plusieurs de ces Chevaliers et a servi de voile à quelques autres au moment de leur catastrophe pour en perpétuer le souvenir. En conséquence et pour suivre tous les vestiges d'un Ordre, qui paraît à un grand nombre de Frères avoir possédé des connaissances précieuses, et auquel nous devons la propagation de la science maçonnique; nous nous sommes crus obligés de conserver quelques rapports avec lui et de consigner ces rapports dans une instruction historique.
Et d'adopter aussitôt après le titre Chevalier Bienfaisant,inspiré par la réforme de Lyon (qui disait Chevalier Bienfaisant de la Cité Sainte et se voyait autorisée à maintenir cet usage pour son compte) dans un passage qui est reproduit à l'article consacré au titre en question.
C'est à la lumière de cette déclaration qu'on doit, à mon sens, entendre la remarque de
Jean-Pierre Laurant: Le Forestier, entre beaucoup, a pu montrer le caractère fabriqué de la
Stricte Observance et de la légende stuardiste sans que l'on cesse de s'interroger sur le
fond des choses (préface à Jean Palou, Les Origines du Rite Ecossais Ancien et Accepté....
Sazeray, (Indre), Fondation Jean Palou, s.d. [ 1972 ], p. 3).
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MAITRE ECOSSAIS DE SAINT-ANDRE
I. - ORIGINES.
1. - L'écossisme.
a) Le grade de Maître Ecossais de Saint-André (Rite Ecossais Rectifié), sous ce nom et sous ceux d' Ecossais et de Maître Ecossais >) qui le désignent aussi, ainsi que le grade de Mâître Parfait de Saint-André qui le dédouble parfois et celui d'Ecossais Vert auquel il a succédé, appartiennent à la famille des grades dits écossais. Famille immense et turbulente, où les avortons, les mort-nés et les stériles abondent, mais dont plusieurs dizaines de membres ont survécu, avec des fortunes diverses, certains s'illustrant; tous issus, sur le continent. du Scotch Mason attesté à Londres en 1733 (où il engendrera le Royal Arch) et débarqué en France à la fin de 1743. (Leur floraison anarchique ne commencera pas avant 1760.) b) La documentation se trouve principalement à la bibliothèque municipale de Lyon (fonds Willermoz); parmi les nombreux compléments qui nous sont parvenus, citons ceux que conserve la bibliothèque du Grand Orient à La Haye. Très généralement, Cf les bibliographies du Rite Ecossais Rectifié établies par Robert Amadou (Bibliographie du Rite Ecossais Rectifié, hors commerce) et Jean Saunier (Eléments de bibliographie, Le Symbolisme, octobre-décembre 1968, pp. 56-68) et surtout la bibliographie à paraître que ces deux auteurs ont compilée er. collaboration. Dès maintenant, il faut signaler, d'un intérêt exceptionnel, par Jean Saunier, Introduction à l'hude du grade de Mâître Ecossais de SaintAndré)) (J. Saunier et B. Guillermain, Rite Ecossais Rectifié..., [ Paris ].
Chancellerie de l'Ordre ~ 1971 ], pp. 9-55). La fervente étude de Charles Montchal, Loge de
Saint-André... Origine, histoire, rituels, symboles, Genève, imp. d'Albert Kundig, 1913,
tirée à 100 ex. h.c., procure maint renseignement et surtout mainte réflexion utile, mais la critique historique doit s y appliquer. c) Le thème général, commun à la plupart de ces grades et où des thèmes adventices furent rattachés avec plus ou moins d'adresse, est celui de la destruction du premier Temple et de sa reconstruction, de l'exil à Babylone et du retour sous Cyrus. d) Dans le labyrinthe signalons une fausse piste: I'Ecossais de Saint-André d'Ecosse composé par le baron de Tschoudy en 1765 appartient à la famille écossaise, mais il ne possède pas de rappon direct avec le grade en question. e) Autre erreur à dénoncer: les liens déclarés de l'Ecossais Vert et du Maître Ecossais de Saint-André avec l'Ordre de Saint-André du Chardon, où Robert Bruce, en Ecosse géographique cette fois, aurait admis des Templiers réfugiés et, particulièrement, avec la résurgence stuardiste de cet Ordre, peuvent revêtir un fort beau symbolisme, mais ils manquent de fondement historique.
2. - La Stricte Observance Templiere.
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La Stricte Observance Templière possédait au moins deux grades écossais. L'un d'eux, I'Ecossais Vert, constituait le quatrième grade et ouvrait le deuxième degré des grades du système; il appartenait donc à l'Ordre intérieur, tandis que les trois premiers grades, constituant le premier degré, étaient les grades symboliques qu'on dirait anglais ~>. (Un rituel de ce grade a été publié par Ostabat, Le Symbolisme, juillet-octobre 1971, pp. 226-244.)
La présence de grades écossais dans la Stricte Observance Templière répondrait, selon Alice Joly, à un compromis entre les usages des loges allemandes tels que les avait modifiés l'admission dans l'Ordre des Chevaliers Templiers de Starck et Raven, et ceux des Frères de Strasbourg, attachés à cultiver les Hauts Grades français.
3. - La réforme lyonnaise.
a) En tout état de cause, la présence de l'Ecossais Vert, guère templariste en effet, étonna les Frères Iyonnais.
En août 1774, ils demandèrent à Weiler, qui venait les rectifer en leur apportant la Stricte Observance Templière, si l'Ecossais Vert relevait bien de l'Ordre intérieur. La réponse fut confirmative. b) Au mois de mars 1777, Lut7elbourg proposait que le grade fût ôté de l'Ordre intérieur pour venir couronner le premier degré. Le 28 mars 1777, le Chapitre de Lyon y fit droit; il pratiquera désormais quatre grades symboliques: Apprenti, Compagnon, Mâître et Ecossais Vert.
Le 25 avril de la même année, le Grand Directoire d'Auvergne déférant aux intentions du Sérénissime Frère Grand Supérieur de l'Ordre, notifiées par le Très Révérend Frère de l'Arc, Commissaire Général, le 4 avril et à l'invitation du Très Révérend ~rand Chapitre Provincial de Bourgogne d'adhérer à sa délibération du 18 mars dernier, et vue la cessation des motifs qui ont empêché jusqu'à présent les provinces de France de s'assimiler à celles d'Allemagne et autres de l'Ordre concernant le grade d'Ecossais Vert, a confirmé unanimement ses délibérations précédentes faites en Directoire Ecossais et notamment celle du 28 mars à ce sujet.
En conséquence, il a arrêté qu'à compter de ce jour le grade d'Ecossais Vert serait rendu ostensible dans toutes les loges réunies du district sous la simple dénomination d'Ecossais ainsi que le tablier, ruban et bijou affectés à ce grade; qu'il serait joint aux trois premiers grades et ferait le complément de la maçonnerie symbolique; que néanmoins il ne serait jamais conféré que par le Directoire ou avec sa permission par écrit aux Frères de son district, ou a~ec la permission par écrit de celui auquel ils appartiendront, en se corformant à la délibération et aux règlements qui y sont joints, détaillés dans le protocole de ce jour aux registres du Directoire Ecossais séant à Lyon, dont copie sera envoyée au T.R.F. de l'Arc ainsi que du tableau ostensible des membres du Directoire qui suit ladite délibération. (Registre des délibérations du Grand Directoire, B.M. Lyon mss 5 481, p. 8).
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32 c) Lors de la 8e séance du Convent des Gaules, le 5 décembre 1778, Willermoz ayant fait savoir combien le grade d'Ecossais Vert, moitié symbolique, moitié appartenant à l'Ordre intérieur, avait été juqu'ici peu satisfaisant, le Convent, en le détachant des Hauts Grades, le déclara quatrième grade symbolique et a approuvé le plan de réforme proposé par ce Frère, qui a été exhorté à le rédiger sur cet aperçu, et à présenter son travail, lors de la rectification des grades symboliques.
En conséquence de quoi, I'Ecossais (Vert) fut rebaptisé et, déplacé, son rituel fut modifié et
le Code maçonnique des Loges réunies et rectifiées de France, de 1778, édicta au
Chapitre X: La maçonnerie rectifiée ne reconnait que quatre grades, savoir: ceux d'Apprenti, de Compagnon, de Maître et de Maître Ecossais. Tous les autres grades, sous quelque dénomination qu'ils soient connus, principalement toute espèce d'élu, de chevalier KS [ sc. Kadosch ] et des grades qui leur ressemblent, sont expressément défendus dans toutes les loges réunies, sous les peines les plus graves, comme dangereux et contraires au but et à l'esprit de la FrancMaçonnerie.
4. - A Wilhelmsbad.
Ce point, comme tant d'autres, fut entériné au niveau du Régime par le Convent de Wilhelmsbad en 1782, dont le recès porte, chapitre IV: Et comme dans presque tous les Régimes, il se trouve une classe écossaise, dont les rituels contiennent le complément des symboles maçonniques, nous avons jugé utile [sur son exemplaire imprimé, conservé à la B.M. de Lyon, Willermoz a porté ici la correction manuscrite: ou nécessaire ] d'en conserver une dans la nôtre, intermédiaire entre l'Ordre symbolique et intérieur; avons approuvé les matériaux fournis par le comité des rituels et chargé le R $ F $ ab Eremo (Willermoz). [ W. a d'abord ajouté après ce dernier mot: aîné, puis il a biffé son titre, son nom d'Ordre et son patronyme et écrit en place: I'un de ses membres ] d'en faire rédaction. (Ex. imprimé, annoté à la main par Willermoz, B.M. Lyon, mss 5 458, pièce 2bis, p. 5).
Willermoz ne faillit point à la tâche.
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II. - ORGANISATION.
1. - Ainsi le Maître Ecossais de Saint-André, qui s'appela d'abord Maître Ecossais sans autre, est, dans le Rite Ecossais Rectifié, et n'importe ses origines et ses apparentements historiques, un grade symbolique (puisqu'il est maçonnique stricto sensu); mais un grade vert et non pas bleu. Il complète, parfait le grade de Maître Maçon (à l'instar du Royal Arch sur une branche collatérale du Scotch Mason ancestral).
2. - Entre la Maîtrise et la réception du quatrième grade, un délai d'un an est requis. Le Maître Maçon qui souhaite, toutes conditions étant remplies d'ailleurs, accéder au dit grade, en fera la demande au Député-Maître de la Loge Ecossaise. 3. - Les marques distinctives des Maîtres Ecossais sont: ler un Tablier de peau blanche, coupé en carré, long en travers, ainsi que la bavette, qui sera doublée de taffetas vert, la bavette rebordée couleur de feu; 2è un cordon vert à gros grains moiré de la largeur de deux pouces et demi, avec une rebordure de trois lignes en couleur de feu, sur le bord extérieur seulement, avec une petite rosette aussi couleur de feu au bas; 3è le bijou du grade en vermeil, qui sera suspendu sur la poitrine par le cordon passé au col en sautoir, et qui y sera attaché par un petit ruban couleur de feu. Ce bijou sera une étoile flamboyante à six pointes, formant un double Triangle avec le lettre H au milieu entre le Compas et l'Equerre sur un fond en couleur de feu. Cette étoile sera entourée d'un cercle surmonté d'une couronne. (Code... de 1778, Article X. Sur son exemplaire imprimé, Willermoz avait note en marge: Ce bijou sera changé dans le nouveau rituel du quatrième grade. B.M. Lyon mss 5 458, pièce 2).
4. - La Loge Saint-André n'est point permanente ni délibérante; elle n'a point de caisse propre à elle, elle n'existe que temporairement et seulement pour des cas de réception, de scrutin et d'instruction de nouveaux reçus. Elle est placée sous la dépendance d'une Préfecture (c'està-dire de l'Ordre intérieur) ou d'une Commanderie désignée par le Directoire, ou sous la dépendance immédiate de celui-ci (c'est-à-dire, d'une façon ou d'une autre, sous la dépendance de l'Ordre intérieur).
Le Député-Mâître est un dignitaire inamovible de l'Ordre nommé par la Grande Loge Ecossaise dont il reçoit ses provisions et instructions.
5. - Au Rite Ecossais Rectifié, le conseil d'administration de la loge n'est pas constitué par le Collège des Officiers mais par le Comité Ecossais, c'est-à-dire l'ensemble des Maitres Ecossais de la loge, qu'ils en soient ou n'en soient pas officiers, siégeant sous la présidence du Vénérable Mâître, lequel doit obligatoirement être Maître Ecossais.
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III. - RlTUELS.
1. - Au Convent des Gaules.
a) En 1778, affirmera Willermoz, trois ans plus tard, (lettre à Charles de Hesse-Cassel, du 12 octobre 1781), on jugea qu'il conviendrait de conserver dans le quatrieme grade les principaux traits caractéristiques des divers écossismes de la Maçonnerie française pour servir un jour de point de rapprochement avec elle. Et il est vrai que le thème commun aux grades écossais sous son aspect particulier d' exploration des ruines du Temple par les Croisés Ecossais portant l'épée d'une main et la truelle de l'autre (Le Forestier), ce thème ainsi particularisé s'y retrouve. La juxtaposition de la truelle et de l'épée correspond parfaitement à un grade qui annonce le passage de la Maçonnerie symbolique (par définition) à l'Ordre intérieur, à l'Ordre des Chevaliers Bienfaisants de la Cité Sainte proprement dit (quoique la Maçonnerie symbolique, à quatre grades, et les Chevaliers Bienfaisants de la Cité Sainte constituent ensemble le Rite Ecossais Rectifié, la Maçonnerie Ecossaise Rectifiée au sens large).
Le mot sacré et le mot de passe restèrent ceux de l'Ecossais Vert. Ils le sont encore. b) - Le Convent des Gaules dans sa 17è séance, le 9 décembre 1778, approuva le rituel et les instructions des grades symboliques de Compagnon, de Maître et de Maître Ecossais, dont Willermoz avait fait lecture.
2. - Au Convent de Wilhelmsbad.
Au Convent de Wilhelmsbad, Willermoz présenta l'esquisse d'une autre version qui fut adoptée, le 26 août 1782, en même temps que le texte des trois premiers grades.
3. - Après Wilbelmsbad.
a) Le reste de l'histoire a été racontée par Willermoz lui-même dans sa lettre du 10
septembre 1810 au prince Charles de Hesse-Cassel. L'affaire a été si embrouillée et elle
importe tant, que mieux vaut en citer tout du long les fragments pertinents. (Cette lettre a
été publiée in extenso ap. Steel-Maret, ps. Bouchet et Boccard, Archives secrètes de la
Franc-Maçonnerie. Collège métropolitain de France à Lyon. IIè province dite
d'Auvergne 1765-1852, Lyon, Librairie de la Préfecture, 1893, pp. 3-15; rééd. augmentée, par Amadou et Saunier, à paraitre).
A Wilhelmsbad, ~< les bases du 4è grade furent aussi arrêtées, et Votre Altesse me confia personnellement les instructions et l'esquisse du tableau figurant la nouvelle Jérusalem et la Montagne de Sion surmontée de l'Agneau triomphant, le tout écrit de sa propre main et adopté par le Convent pour me diriger dans cette partie du travail. Les rituels français de Novices et de Chevaliers furent aussi pris pour base de la révision de cette classe.
Cette Commission [ sc. Ia Commission spéciale pour la rédaction des rituels prise dans le
sein de l'Assemblée parmi les Frères d'Auvergne et de Bourgogne ] divisée en deux
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35 sections à cent lieues de distance l'une de l'autre, reconnut dès la première année de 1783 que les communications par correspondance de chaque parcelle du travail prolongeraient son ensemble pour bien des années, on chercha donc les moyens de parer à cet inconvénient. Les Frères de Bourgogne pleins de confiance envers ceux d'Auvergne, qui offraient à Lyon un plus grand nombre d'hommes capables qu'à Strasbourg, engagèrent ceux-ci à se charger de l'ensemble de l'ouvrage; sauf la communication à leur donner de chaque partie avant qu'elle Mt définitivement arrêtée; c'est sur ce plan que tout le travail fut exécuté [...]
Quoi qu'il en soit, après la révision des trois premiers grades symboliques il paraissait convenable de faire du 4è, ce qui aurait complété cette classe et en aurait accéléré la publication.
Mais la Commission se rappelant que le Convent avait considéré ce 4è comme intermédiaire entre le symbolique et l'intérieur, comme le complément du premier et préparatoire au second, enfin comme le point de liaison des deux classes, crut devoir en suspendre la révision, et faire auparavent celles des deux rituels de noviciat et de chevalerie; ces derniers n'exigeant point un travail ni long, ni difficile et n'ayant plus besoin que d'être perfectionnés. Ceux-ci étant finis, la commission entreprit le travail du 4è dans les vues qui avaient été apportées de Wilhelmsbad, elle s'en occupa longtemps avec une grande attention, sentant toute l'importance du travail qui lui était confié. Il était très avancé et presque fini lorsque les états généraux de France furent convoqués. Plusieurs membres de cette commission jouissant d'une réputation distinguée, et appartenant aux trois Ordres politiques, furent élus pour se rendre à cette assemblée; leur départ faisant un grand vide dans la commission, fit suspendre le travail jusqu'à un temps plus favorable pour le reprendre et ce temps n'est plus revenu. Elle remit entre mes mains tout ce qu'elle avait fait ainsi que tous les renseignements, instructions et tableaux qui avaient été fournis par le Convent et par Votre Altesse, et j'en suis resté constamment dépositaire jusqu'à ce jour.
Les provinces informées que l'ouvrage était très avancé et qu'il laissait une grande lacune dans la rectification générale qui avait été annoncée, ne cessèrent de réclamer la confection et l'envoi de ce 4è, mais il ne fut pas possible de les satisfaire; car la divergence des opinions politiques ne tarda pas bien longtemps à diviser partout les esprits. Celui de discorde vint bientôt souffler son poison dans les loges comme partout ailleurs; celles du régime rectifié, plus fermes dans les principes, résistèrent plus longtemps que les autres, mais furent ensuite entrâînées par le torrent. Les Frères Grands Profès disséminés çà et là réunirent leurs forces, soutinrent courageusement les chocs et firent tête à l'orage le plus longtemps qu'il fut possible; mais à leur tour, ils furent accablés.[...]
J'ai annoncé plus haut à Votre Altesse que le travail de rédaction presque fini au 4è grade
de Mâître Ecossais, avait été forcément suspendu en 1789; que la Commission qui en avait
été chargée avait remis alors entre mes mains, en se séparant, tout ce qui était nécessaire
pour l'achever, et que cette lacune dans la totalité de la révision générale avait donné lieu à
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36 beaucoup d'instances faites de tous côtés, que je n'avais pu satisfaire, n'osant prendre sur moi seul de compléter ce travail. Vingt années se sont écoulées en cet état; mais l'année dernière après la grande maladie que j'essuyai, me voyant rester seul de tous ceux qui avaient participé à cet ouvrage, effrayé du danger que je venais de courir et sentant vivement toutes les conséquences fâcheuses qui en résulteraient si cette lacune dans le Régime Rectifié n'était pas remplie avant ma mort, j'osai entreprendre de le faire. Il ne restait qu'à lier les différentes parties du rituel et à mettre la dernière main aux explications des tableaux et aux instructions de ce grade. Ce rituel a été publié dans les loges réunies de France vers la fin de 1809; et il a été accueilli partout avec la plus grande satisfaction; je regrette seulement que le défaut de copistes ne m'ait pas permis de le communiquer encore à tous les établissements maçonniques qui le demandent. b) En outre, des versions provisoires furent mises en circulation, dès après le Convent de Wilhelmsbad et ainsi se rencontre un rituel de 1784-1785, dit de 1785. c) La liste des principaux rituels connus du Mâître Ecossais de Saint-André s'établit donc comme suit:
" Rituel du Convent des Gaules (1778); grade de Mâître Ecossais, trois tableaux seulement (Saint-André est absent du titre comme du rituel où, postérieurement, il figurera sur un quatrième tableau).
" Rituels postérieurs à Wilhelmsbad: I'un de 1785, I'autre, version révisée de celui-ci, de 1809-1810, tous deux ne comportant qu'un grade, celui de Maître Ecossais de Saint-André (je souligne) et quatre tableaux (Saint-André apparaît et apporte le baptême, la confirmation et l'homélie...).
" Rituel du Grand Orient de France (1911): encore un seul grade, celui de Maître Ecossais de Saint-André; le quatrième tableau devient un tapis d'Ordre et après la christianisation, c'est la déchristianisation.
" Rituel de Genève (1893-1894): le 29 novembre 1893, il dédouble le grade de Mâître Ecossais de Saint-André et Mâître Parfait de Saint-André; quatre tableaux; le texte de l'instruction est altéré. Les deux grades se donnent en deux parties. Celles-ci constituèrent de 1894 à 1899 deux cérémonies distinctes. Depuis 1899, elles se succèdent au cours d'une seule cérémonie.
" Rituel de Zurich: comme les rituels d'Allemagne, il n'a qu'un seul grade, celui de Maître Ecossais de Saint-André, avec les quatres tableaux: c'est le rituel de
Wilhelmsbad.
" Rituel du Grand Prieuré des Gaules, préparé sous la direction de Camille Savoire en 1935; comprend deux grades: Maître Ecossais et Maître de Saint-André, qui sont conférés au cours d'une seule cérémonie.
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A quoi l'on joindra, pour mémoire, des rédactions intermédiaires. On doit considérer comme définitif, ce semble, le rituel de 1809-1810 et de le désigner ainsi que "le rituel de Wilhelmsbad" (un exemplaire en est conservé à la B.M. de Lyon, ms. 5 922.
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IV. - DOCTRINE.
Le sens rituel est clair, il signifie le passage de l'ancienne loi à la nouvelle loi, de l'Ancien Testament au Nouveau, il prépare au passage des symboles à la réalité, de la Maçonnerie (symbolique) à l'Ordre intérieur qui est un Ordre équestre. Il est écossais et prétemplier, je veux dire précurseur du templarisme de l'Ecuyer Novice (certain côté de l'écossisme coïncidant avec ce deuxième caractère).
Aussi, pour commencer, le candidat, dans la chambre de préparation, est placé en face d'une Bible ouverte aux chaptires 40 et 41 d'Ezéchiel et des neuf maximes qui lui ont été données, trois par trois, lorsqu'il fut reçu aux grades d'Apprenti, de Compagnon et de Maûtre. Voici ces maximes:
1. L'homme est l'image immortelle de Dieu, mais qui pourra reconnaître la beauté de cette image, si l'homme la défigure lui-même?
2. Celui qui rougit de la religion, de la vertu et de ses Frères, est indigne de l'estime et de l'amitié des Maçons.
3. Le Maçon dont le coeur ne s'ouvre pas aux besoins et aux malheurs des autres est un monstre dans la société de ses Frères.
4. L'amour de l'argent, lorsqu'il s'empare de l'homme, dessèche son coeur et fait tarir en lui la source des plus nobles aspirations. La satisfaction de nos besoins et de nos appétits matériels serait-elle l'unique but de notre travail ici-bas? L'insensé voyage toute sa vie sans savoir où il va et d'où il vient, ni ce qu'il doit faire. Mais le sage se rend compte de tous ses pas parce qu'il en connaît l'importance et le but. 5. L'homme est naturellement bon, juste et compatissant. Pourquoi est-il souvent en contradiction avec lui-même? Cherchez sérieusement la cause. Elle est importante à discerner.
6. L'égoïsme est comme la rouille, elle détruit ce qu'il y a de plus beau et de plus pur dans le coeur de l'homme.
7. Celui qui voyage en terre étrangère n'est jamais plus près de s'égarer que lorsqu'il renvoie son guide, croyant savoir son chemin.
8. Heureux celui qui, s'étant bien étudié lui-meme,a pu connâître ses défauts, apercevoir son ignorance et sentir qu'il a besoin de secours, car il a déjà fait son premier pas vers la lumière.
9. Chercher avec un coeur droit, demander avec résignation et discernement, frapper avec confiance et persévérance, c'est la science du sage.
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L'on avertit le condidat que le grade qu'il va recevoir lui apprendra, mais encore caché sous des symboles, le vrai but de l'Ordre.
Le rituel de la réception même retrace et met en action toutes les grandes époques survenues au Temple de Salomon, après qu'il eut été construit. Le personnage d'Hiram n'est jamais perdu de vue. Ces objets sont figurés par quatre tableaux dont le dernier, qui n'existait pas en 1778, représente le passage mentionné plus haut de la loi ancienne à la loi nouvelle; le grade a été christianisé afin de correspondre à sa situation et de s'accorder à la vocation du Rite Ecossais Rectifié tout entier.
L'ancienne instruction du grade ne laisse place à aucune ambiguïté:
L'Ordre vous montre aujourd'hui, sans mystère, quoiqu'encore sous le voile léger d'une allégorie, qui s'explique bien facilement, le but et le terme général des ses travaux. Tout ce que vous avez vu jusqu'à présent dans nos loges, a eu pour base unique l'Ancien Testament et pour type général le Temple célèbre de Salomon, à Jérusalem, qui fut et sera toujours un emblème universel. Mais, ici, vous voyez une enceinte de muraille percée de douze portes, telle que l'enceinte de la Nouvelle Jérusalem est décrite par saint Jean l'Evangéliste. Vous voyez au milieu de cette enceinte la montagne de la Nouvelle Sion et sur le sommet l'Agneau de Dieu triompha, avec l'étendard de la Toute-Puissance, qu'il a acquise par son immolation volontaire et réparatrice, Ce tableau figure pour les Maçons le passage de l'Ancienne Loi, qui a cessé, à la Nouvelle Loi, apportée aux hommes par le Christ et qu'il a volontairement scellée de Son Sang, pour la rendre à jamais ineffaçable et universelle.
La Croix de Saint-André, que vous voyez au bas du même tableau, figure aussi le passage maçonnique de l'Ancien au Nouveau Testament, confirmé par l'Apôtre Saint André qui, d'abord disciple de Saint Jean-Baptiste, né et prêchant sous l'ancienne Loi, pour préparer les coeurs à la Nouvelle, abandonna son premier mâître, pour suivre, sans partage, Jésus Christ, et scella ensuite de son sang son Amour et sa Foi pour son Vrai Mâître. C'est cette circonstance particulière qui a fait adopter, pour ce grade, dans l'intérieur de nos Loges, la dénomination de Maître Ecossais de Saint-André.
C'est pourquoi, depuis bien des siècles, depuis l'époque incertaine où les anciens initiés du Temple de Jérusalem, ayant été éclairés par la lumière de l'Evangile, purent avec son secours perfectionner leurs connaissances et leurs travaux, tous les engagements maçonniques~ dans toutes les parties du monde où l'Institution s'est successivement répandue, sont contractés sur l'Evangile et spécialement sur le premier chapitre de celui de Saint Jean, dans lequel le disciple bien-aimé a établi, avec tant de sublimité, la Divinié du Verbe Incarné. C'est sur ce Livre Saint que, depuis votre premier pas dans l'Ordre, vous avez contracté tous les vôtres. > (Ap. Jean Saunier, ~< Le caractère chrétien de la Ma$onnerie Ecossaise Rectifiée au XVIIIè siècle)), Le Symbolisme, octobre-décembre 1968, pp. 27-28).
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Le bijou du grade récapitule cette leçon.
La devise, sur quoi la cérémonie s'achève à peu près, confirme que bientôt, c'est-à-dire dans l'Ordre intérieur, se lèvera le voile des symboles; Meliora praesumo, (Ce qui, en 1778, signifiait certainement aussi, dans l'esprit de Willermoz qu'il y avait mieux à trouver dans le Rite Ecossais Rectifié que le projet insensé de restaurer l'Ordre du Temple.)
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V. - PROBLEMES.
1. - Le caractère chrétien.
Le caractère chrétien du grade, et de la Maçonnerie Rectifié en général, n'a pas été sans soulever des difficultés. On s'est interrogé sur la manière de concilier cette exigence avec la tolérance andersonienne. a) Le rituel de 1785 déclare: Oui, mon Frère, I'Ordre est chrétien; il est le point de ralliement de toutes les confessions chrétiennes; ses instructions découlent de celles du Christ, et il conduit à la foi en ce divin Maître.
1809 prend quelques précautions: Oui, I'Ordre est chrétien; il doit l'être, et il ne peut admettre dans son sein que des chrétiens ou des hommes bien disposés à le devenir de bonne foi, à profiter des conseils fraternels par lesquels il peut les conduire à ce terme. Genève marque un retrait (ou un progrès?) plus accusé: Oui, mon Frère, I'Ordre est chrétien, mais dans le sens le plus large et le plus élevé. Il regarde comme tels et cherche à rallier à ses travaux tous ceux, quelles que soient leur confession et leur croyance, qui travaillent sans arrière-pensée à la réalisation de la formule chrétienne: Gloire à Dieu au plus haut des cieux, paix sur la terre et bienveillance parmi les hommes. Une autre version parle encore du plus pur esprit du christianisme primitif. C'est ambigu et moderne.
L'interprétation du caractère chrétien de l'Ordre templier (selon une désignation officieuse du Rite Ecossais Rectifié) va, comme on voit, de ce que j'oserais appeler la Stricte Observance (Cf l'article de Jean Saunier, Le caractère chrétien de la Maçonnerie Ecossaise Rectifiée au XVIIIe siècle, art. cit.), à une late >) Observance. b) Une déclaration solonnelle de 1970 sera citée ici car elle est exemplaire:
Le Grand Chapitre du Grand Prieuré des Gaules dit à nouveau sa fidélité aux traditions conjointes de l'Ordre maçonnique et aux principes propres au Rite Rectifié. Considère que ce dernier possède dans son patrimoine un appel à la tradition chrétienne et à l'exploration de son ésotérisme qu'expriment entre autres le texte des prières et la prestation de serment sur l'Evangile de Saint Jean.
Déclare ces formes intangibles.
Dit que tous ceux qui, libres et de bonnes moeurs, voudraient appartenir au Rite doivent s'y soumettre. Nécessaires, elles sont suffisantes à constater les engagements. Les justifications d'un autre Ordre ayant trait à l'état civil ou à l'apport confessionnel ne sauraient leur être substituées.
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42 c) Mais il est absurde d'avoir en certains rituels corrigé le texte de la deuxième maxime au grade de Compagnon, reprise à celui de Mâître Ecossais de Saint-André: Celui qui rougit de la religion, de la vertu et de ses Frères... en Celui qui rougit de la vertu de ses Frères... ! (Le problème soulevé par l'affirmation du caractère chrétien du R.E.R. se pose de même au niveau des trois premiers grades symboliques, dits bleus - le quatrième est un grade symbolique, dit vert. Cf. Jean Granger, "Le Rite Ecossais Rectifié", ap. La Formation des maçons, Cahier N 1, Grande Loge Nationale Française, province de Rouvray, avril 1976, pp. 1-20.)
2. - Administration.
Un problème d'Ordre administratif et non plus doctrinal, mais également lié à la nature particulière et, corollairement, à la structure particulière du Rite Ecossais Rectifié, tient à l'administration des Loges de Saint-André. a) D'une part le Régime Ecossais Rectifié en tant que tel n'existe plus. La structure très cohérente de l'Ordre a été brisée, à commencer par l'abolition de la Grande Maîtrise générale qui garantissait le caractère international de l'Ordre.
D'autre part, la Maçonnerie Rectifiée a refusé l'isolement, fut-il splendide. Des nécessités sociales non moins que la volonté de respecter ce Landmark de la Maçonnerie universelle, selon lequel les Loges symboliques doivent être autonomes et non point être soumises au gouvernement d'une institution maçonnique différente et réputée supérieure, mais aussi le désir de conserver au quatrième grade son originalité essentielle ont fait avancer plusieurs solutions propres à assurer l'organisation et la direction des Loges Ecossaises. Leur principe commun résulte d'un compromis: les loges écossaises ne relèvent pas de l'Ordre intérieur, mais elles ne dépendent pas non plus de la Grande Loge (où les Loges bleues du Rite Ecossais Rectifie se sont groupées afin de suivre le même Landmark). b) D'où un Grand Collège Ecossais Rectifié, à la Grande Loge Nationale Française-Opéra, un Directoire des Loges Ecossaises autonomes des Gaules à la Loge Nationale Française, etc.
A la Grande Loge Nationale française et à la Grande Loge suisse Alpina aussi des solutions ont dû être ménagées que Jean Baylot parvient à résumer en ce peu de lignes: La Loge de Saint-André est, en droit règlementaire, la Loge de Saint-Jean siégeant en Maître de Saint-André. Pour des raisons touchant aux relations internationales, nous avons à nouveau inclus dans notre organisation priorale ces Loges de Saint-André qui furent pour un temps, plus directement rattachées à la Maçonnerie bleue, sous la conduite d'un Directoire specialisé. Une évolution séculaire, commandée par la recherche de l'unité des grades symboliques dans la Grande Loge Alpina et par les exigences de la vie en commun avec le Suprême Conseil du Rite Ecossais Ancien et Accepté, avait conduit nos Frères suisses à l'intégration des Loges de Saint-André dans leur Prieuré. Nos relations sont plus aisées avec des structures comparables.
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Voilà pourquoi, en 1965, par un nouveau traité daté du 21 octobre, conclu avec la Grande Loge Nationale Française, nous avons repris la direction complète des Loges de Saint-André. L'histoire et la tradition s'assurent parfois des revanches. Il s'est dessiné l'an dernier, dans la Préfecture de Neustrie, une tendance de certaines loges travaillant au Rite Rectifié à former une Loge de Saint-André sous le titre de la Loge de Saint-Jean, travaillant et recrutant dans cette dernière, suivant les dispositions du Code de Lyon de 1778. Il n'y avait aucune contradiction à souscrire à leur voeu d'où il sortit l'installation de trois nouvelles Loges de SaintAndré dans la Préfecture de Neustrie. Cette formule combine les avantages des deux conceptions. (J. Baylot et J. Granger, Le Rite Ecossais Rectifié..., Neuilly, Chancellerie de l'Ordre, [ 1968 ], pp. 18-19).
Que les loges du quatrième grade soient régies par une instance propre, et donc indépendantes de la Grande Loge comme de l'Ordre intérieur, ou bien que ce dernier les administre "les deux traits fondamentaux de la structure de 1778 [ maintenus, ajouterai-je, en 1782], la continuité et l'ambiguité sont aujourd'hui impossibles, dans la lettre maçonnique. Que celleci demeure donc anglo-saxonne. Mais il reste l'esprit [... ] " (Eques a Latomia universa. "La double structure administrative et hiérarchique du Régime Ecossais Rectifié en 1778", Renaissance traditionnelle, juillet 1977, N 31, pp. 188-196; Cf. p. 195.) La Franc-Maçonnerie rectifiée s'est codifiée tout net comme composée de quatre grades. La Maçonnerie Universelle, reprenant la formule anglaise de l'acte d'union, en 1813, affirme ne consister qu'en "trois degrés et pas davantage". Mais c'est à savoir, poursuit le texte, "à savoir ceux d'Apprenti, de Compagnon et de Maître, y compris l'Ordre suprême de la Sainte Arche royale". La contradiction entre les deux formules ne pourrait-elle être réduite, de même que la Grande Loge unie d'Angleterre a prévenu la contradiction dont menaçait la reconnaissance de l'Arche royale?
3. - Equivaleoce.
Troisieme problème du quatrième grade, lié à la nature particulière du Rite Ecossais
Rectifié; les rapports avec les autres rites.
a) Le Code de 1778, à l'article XIX, prévoyait: Le grade de Maître Ecossais est
exclusivement affecté au Régime Rectifié. C'est pour cette raison que lorsqu'on le confère
ou qu'on tient loge d'instruction de ce grade on n'ose y faire assister aucun visiteur d'un
autre régime, quelque grade qu'il ait.)>
Et l'on sait que la réception et l'instruction sont, avec le scrutin, les seules occasions où la
Loge Ecossaise se réunit.
b) Mais, afin de faciliter ses relations avec d'autres rites, et notamment avec le Rite Ecossais
Ancien Accepté, des équivalences de grades ont éte calculées: Maître Ecossais de Saint-
André et 18è degré du Rite Ecossais Ancien Accepté; Ecuyer Novice et Chevalerie
Kadosch; Chevalier Bienfaisant de la Cité Sainte et 33è degré du Rite Ecossais Ancien
Accepté. Ce système fut adopté en 1896 par le Grand Prieuré Indépendant d'Helvétie pour
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44 le Rite Ecossais Rectifié et le Suprême Conseil de Suisse pour le Rite Ecossais Ancien Accepté, et c'est en vertu de cet accord que trois Maçons français titulaires du plus haut grade Ecossais Ancien Accepté (Ribaucourt, Savoire et Bastard) furent, en 1910, armés Chevaliers Bienfaisants de la Cité Sainte à Genève. Le réveil du Rite Ecossais Rectifié en France allait s'ensuivre. c) La question d'une équivalence entre le quatrième grade du R.E.R. et l'Arche royale du Rite Emulation est, de même, inéluctable dans certaines.
ECUYER NOVICE
Il y eut, au cours de l'histoire du R.E.R., des membres de l'Ordre intérieur, Chevaliers Bienfaisants de la Cité Sainte, qui n'étaient pas maçons. Depuis le Convent général du Rite, à Genève en 1969, les C.B.C.S., et par conséquent les Ecuyers Novices, ne se recrutent pas seulement habituellement, mais nécessairement parmi les frères du R.E.R. Si l'on discute encore sur les origines des emprunts à la tradition chevaleresque dans la confection des échelles de grades maçonniques, sur la part de Ramsay, sur les initiatives allemandes, sur la valeur de la tradition de Kilwinning, personne ne conteste que la référence à l'institution de la chevalerie est entrée telle quelle dans la tradition maçonnique, sinon comme un corps étranger, au moins avec le destin d'un greffon. L'institution du noviciat est donc très simplement l'équivalent de la période de stage qui préparait les jeunes gentilshommes à l'adoubement. Elle n'a pas de signification maçonnique spécifique. Le Convent général du Rite Rectifié siégeant à Zurich en 1958, en modifiant et amendant les constitutions et statuts du rite, a stipulé que ce titre d'Ecuyer Novice ne correspondait pas à un grade. Les membres de cette classe, non armés Chevaliers après trois ans d'attente, sont replacés dans la position précédente de Maître Ecossais de Saint-André.
1. - Le troisième degré de la Stricte Observance Templière comportait pour premier grade celui d'Ecuyer Novice. Le titre, dont les deux mots peuvent sembler contradictoires, évoque l'image à la fois militaire et monastique de l'Ordre du Temple dont la Stricte Observance avait fait son modèle. (Ainsi se rapproche-t-elle davantage en esprit du Temple médiéval, que les autres rameaux maçonniques de l'écossisme auxquels d'ailleurs les grades de son deuxième degré l'apparentent).
Un rituel d'Ecuyer Novice de la Stricte Observance daté de 1754, a été publié par
SteelMaret (ps. Bouchet et Boccard, Archives secrètes de la Franc-Maçonnerie. Collège
métropolitain de France à Lyon. Deuxième province dite d'Auvergne 1765-1852, Lyon,
Librairie de la Préfecture, 1893, pp. 4143). Il est bref, à peu près dépourvu de contenu doctrinal et correspond à une situation d'attente.
2. - Dans l'Ordre des Chevaliers Bienfaisants de la Cité Sainte, l'Ecuyer Novice est le
cinquième grade du Rite Ecossais Rectifié, le premier de son Ordre intérieur. Il a été
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45 formellement et nommément repris du grade synonyme de la Stricte Observance. Le Maître Ecossais qui y est candidat doit avoir un an d'ancienneté dans ce grade et être âgé de vingtcinq ans au moins, sauf dispense.
C'est à peine un grade, plutôt une position préparatoire, dans la stricte signification du terme >) (Jean Baylot).
Mais le noviciat, d'un an au moins, prépare au Chevalier Bienfaisant de la Cité Sainte. On est, avec lui, déjà en dehors de la Maçonnerie proprement dite, ou symbolique; on est audelà des symboles.
Les membres de l'Ordre intérieur, Ecuyers Novices et Chevaliers Bienfaisants de la Cité Sainte, sont groupés en Cornmanderies; les Commanderies en Préfectures. L'ensemble des Préfets constitue le Grand Directoire et l'ensemble des dignitaires des préfectures constitue le Grand Chapitre. Les dignitaires les plus élevés sont le Grand Prieur, le Grand Prieur adjoint, le Grand Chancelier et le Vicaire général qui gouvernent l'Ordre à l'échelon national, celui du Grand Prieuré.
3. - Le nouveau rituel avait été préparé par Jean de Turkheim pour le Convent des Gaules (Lyon, 1778). Celui-ci y fit apporter une modification importante, le 4 décembre 1778, au cours de sa septième séance dont voici un extrait du compte rendu (ms. Lyon 5 482):
On donna communication du nouveau noviciat. Le Convent, reconnaissant unanimement la stérilité de l'ancienne réception, approuva le nouveau formulaire avec la clause qu'en place d'un catéchisme parfait pour les novices, qui tiendrait trop des grades inférieurs, les deux respectables Frères Chanceliers seraient priés conjointement de rédiger une instruction suivie pour les novices, dans laquelle on leur rendrait compte de tous les rapports de la Maçonnerie avec le Saint Ordre. Le Convent renvoya à une autre séance l'examen de cette instruction.
Le lendemain on à fixé les signes, mots et attouchements de l'Ecuyer Novice.
A Wilhelmsbad, en 1782, le Convent entérina et perfectionna dans la continuité. De nombreux documents relatifs au noviciat du Rite Ecossais Rectifié sont conservés, principalement à la Bibliotheque Municipale de Lyon (fonds Willermoz) et dans les archives du Grand Orient des Pays Bas (fonds Kloss). Plusieurs ont été publiés par Steel-Maret (op. cit. pp. 52-53 et 92-115). Cf les bibliographies du Rite Ecossais Rectifié (manuscrits et imprimés) établies par Amadou (hors commerce) et par Jean Saunier (Eléments d'une bibliographie, Le Symbolisme, octobre-décembre 1968, pp. 56-68) et la bibliographie générale que ces deux auteurs ont compilée en collaboration (à paraître).
Je n'ai pu mettre la main sur un exemplaire de l'ouvrage ainsi décrit: Rituel pour la
réception au grade d'Ecuyer de l'Ordre des Chevaliers Bienfaisants (Brunswick, 1782, f,
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15 p) en français et en latin et ne suis pas même sûr, quoique je le croie, que ce soit un imprimé.
4. - Dans la forme de l'Ecuyer Novice de la Stricte Observance, et en dépit du caractère provisoire de ce grade, Willermoz et Turkheim suivant leur mouvement général, ont infusé de la doctrine martinésiste.
On retrouve quelques phrases du rituel de la Stricte Observance; le mot du grade, qui réfère directement, quoique par anagl amme, à la succession templière postérieurement à Jacques de Molay, a été conservé. Mais,comme on verra, I'histoire est contée d'une manière neuve.
5. - La doctrine du grade est suggérée dans les questions préparatoires auxquelles le Mâître Ecossais est tenu de répondre par écrit, avant sa réception, et que voici:
I. - Le Temple élevé par Salomon dans la Cité Sainte, elant le type général de la FrancMaçonnerie, pensez-vous que ce type ait été choisi d'une manière arbritraire ou qu'il y ait des rapports enssentiels entre ce type et l'instruction maçonnique, et quels pourraient être ces rapports?
II. - D'après l'étude que vous avez dû faire des symboles et emblèmes maçonniques, et d'après les instructions morales que vous avez reçues dans vos grades précédents, quelles idées vous formez-vous sur l'origine historique et sur le but essentiel de l'instruction maçonnique?
III. - Si la Franc-Maçonnerie se rapportait à quelques connaissances rares et essentielles, pensez-vous qu'il serait au pouvoir des hommes de communiquer toutes ces connaissances? Et, dans le cas contraire, quels seraient les vrais moyens de se les procurer? 6. - Les idées qui forment l'armature doctrinale du grade sont à chercher dans la longue instruction. Nous analyserons donc ce morceau d'Apprenti Chevalier. En préambule, I'importance du Temple comme symbole est réaffirmée. Le voile se lève un peu plus sur la signification: c'est que les vrais Maçons, ainsi que la cérémonie l'a montré, sont destinés à devenir Chevaliers de la Cité Sainte, que, zeles défenseurs de la religion du divin Christ, vivant dans l'espérance, la foi et la charité, ils bâtissent dans le Temple du Seigneur, et sous le voile des symboles et emblèmes maçonniques, ils cherchent par une douce persuasion à y conduire ceux qui en sont le plus éloignés. Mais le voile tout entier ne sera ôté que plus loin dans la carrière. On fixera le novice sur l'origine et le but primitif de la Franc-Maçonnerie.
La première partie de l'instruction propose, à cette fin, une vue générale du Régime Rectifié considéré sous ses rapports moraux. Il y a l'Ordre primitif et il y a l'Ordre maçonnique. Le premier a donné naissance au second. Le Régime Rectifié comprend deux classes: la classe symbolique, celle des Maçons, et l'Ordre équestre, avec ses deux grades.
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La réunion de toutes les classes considérees relativement au but fondamental de l'Ordre primitif et essentiel constitue l'Ordre maçonnique en général et les deux classes dont nous venons de parler constituent le Régime Rectifié.))
Dans cette seconde classe les emblèmes cessent. Vous avez appris sous le voile des symboles qu'il est des devoirs importants pour l'homme; I'on vient de vous faire entrevoir la nécessité de les remplir avec fidélité; cherchez par cette voie la science et avant elle vous trouverez, mon bien-aimé Frère, un trésor plus précieux, c'est la sagesse.)) La deuxième partie traite de l'origine de l'initiation maçonnique. Ce n'est pas l'Ordre du Temple ni celui des Chevaliers de la Cité Sainte, c'est un Ordre sublime et secret qui vise un but très élevé et ne peut être appelé que le Haut et Saint Ordre. Entre cet Ordre par exellence et la Franc-Maçonnerie, I'Ordre du Temple forme un anneau de la chaîne. Aussi la troisième partie donne les motifs de la filiation avec l'Ordre du Temple: Les Chevaliers Templiers ont occupé un rang distingué chez ceux qui ont possédé des connaissances d'un Ordre supérieur relatives à la vraie Maçonnerie)); ils en confièrent quelques-uns aux Maçons qu'ils avaient avec eux.
C'est donc uniquement comme Maçons (...) que nous conservons une filiation avec l'Ordre du Temple.
Avant de s'occuper en détail des Chevaliers du Temple, il faut parler de l'ancienne chevalerie. La quatrième partie s'efforce d'en communiquer une idée succincte. L'Ordre de Chevalerie a un caractère d'antiquité et de mystère qui peut permettre d'y voir des analogies avec l'Ordre essentiel, le Saint Ordre.
Les Templiers font l'objet de la cinquième partie qui en allègue la tradition secrète. Considérons les neuf fondateurs de l'Ordre du Temple. Soit que le Haut et Saint Ordre les ait instruits directement, soit que les Esséens (sc. Ies Esséniens) aient été les intermédiaires dont le Saint Ordre s'est servi, ou qu'après s'être communiqués sur quelques objets il ait permis aux Esséens de les initier à leurs mystères, on est convaincu assez généralement que ies Templiers furent choisis pour devenir dépositaires de quelques connaissances dont la propagation importait au bonheur des hommes; aujourd'hui, on ne doute plus que ces connaissances n'aient des rapports essentiels avec la Franc-Maçonnerie et que, par son secours, on ne parvienne à les recouvrer, surtout depuis qu'on s'est confirmé dans l'opinion que les Templiers ont connu l'initiation maçonnique et n'en sont pas les instructeurs. En effet, il a été constaté, à l'époque du Convent de 1782, qu'ils ont pratique et professé la Maçonnerie dans ses principaux et plus anciens emblèmes. Jacques de Molay, dans sa prison, initia aux connaissances secrètes son neveu le Comte de Beaujeu. Beaujeu fut élu Grand Maître. Pierre d'Aumont lui succéda qui se réfugia avec quelques Chevaliers en Ecosse, où il rencontra George Haris qui lui succéda à son tour.
Haris permit aux chevaliers de se marier, comme étant l'unique moyen de conserver
l'Ordre, en concentrant tous ses secrets dans leurs familles; ils se perpétuèrent d'abord par
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48 leurs enfants, ensuite ils s'associèrent d'autres personnes par des initiations à différents degrés afin de s'assurer de leur discrétion.
Il ne s'agit donc pas de vouloir expliquer les grades symboliques de la Maçonnerie par les faits historiques de l'Ordre du Temple.
Les symboles signifient des connaissances plus générales et plus importantes ; les sciences et connaissances primitives de l'homme, connaissances professées par les sages d'Orient et successivement répandues par eux dans les différentes contrées de l'Europe. Les Templiers n'en ont connu qu'une partie; elles ne se peuvent plus retrouver dans leur integrité que dans le Haut et Saint Ordre.
Conclusion: pas d'autre motif pour avoir conservé le titre de Chevaliers et pris celui de Chevaliers Maçons de la Cité Sainte. ~> Et que le novice garde son regard attaché sur les symboles et allégories à l'homme physique, moral et intellectuel. <~ C'en est assez, mon bien-aimé Frère, pour vous instruire: à mesure que vous avancez, le cercle s'agrandit; le pas que vous venez de faire est important. Vous cherchez à remonter au but primitif de la Franc-Maçonnerie et l'on vous a attaché a un Ordre qui correspond avec ceux qui seuls peuvent vous instruire. Si vous savez quelque jour vous faire reconnâ~tre pour un vrai Chevalier Maçon de la Cité Sainte, si vous bâtissez constamment dans le Temple du Seigneur, vous pouvez concevoir l'espoir de parvenir à un but si désiré.
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CHEVALIER BIENFAISANT DE LA CITE SAINTE
Dans le Rite Ecossais, ce grade remplace le grade de Chevalier qui lui correspond dans la Stricte Observance Templière (un rituel de ce dernier grade a été publié par Ostabat, Le SymboUsme, juillet-octobre 1971, pp. 226-244).
I. - Sens et Origine.
1. - Le sens du titre est ambigu, son origine a été ennuagée.
Chevalier Bienfaisant de la Cité Sainte connote évidemment l'idée de charité, qui est le devoir essentiel du dit Chevalier; I'organisation chevaleresque, bien sûr, et particulièrement l'Ordre du Temple. Car la Cité Sainte est Jérusalem. Mais cette manière de dire Templier, qui semblerait embarrasser, a un objet precis: de déclarer que les C.B.C.S. sont des Templiers sans en être tout en étant. Ou, si l'on préfère, que le rapport de la Maçonnerie, et singulierement du Rite Ecossais Rectifié, à l'Ordre du Temple n'est pas au juste celui que croit la Stricte Observance Templière. (Le Convent des Gaules réservera la question de la filiation templière, alors que Wilhelmsbad la tranchera dans le sens de la renonciation, sauf au plan spirituel).
Que cette intention ait été celle de Willermoz et de ses amis ne semble pas douteux. Mais d'autres facteurs ont-ils contribué à forger l'expression?
2. - La Loge Rectifiée de Willermoz à Lyon se nommait La Bienfaisance. Mais le mot et l'adjectif correspondants sont communs dans le vocabulaire maçonnique. Puis on a signalé un grade de Chevalier Bienfaisant qui aurait été pratiqué à Metz et aussi l'influence éventuelle du grade dit Ecossais de Saint-Martin, dont le titre aurait pu se traduire, par allusion à l'état du légionnaire romain et à son geste proverbial, Chevalier Bienfaisant (Cf Amadou, Louis-Claude de Saint-Martin et la Franc-Maçonnerie, Le Symbolisme, juilletseptembre 1970, pp.285-307 et janvier-février 1971, pp. 43-73). Mais c'est vouloir expliquer obscurum per obscurius.
C'est cependant l'opinion de R. Le Forestier qui écrit dans son livre sur la
FrancMaçonnerie templière et occultiste aux XVIIIè et XIX siècles (Paris, Aubier-
Montaigne, Louvain, Nauwelaerts, pp.433-434): <~ Le titre de Chevaliers Bienfaisants de la
Cité Sainte, que prit le rite mystique sorti de la Réforme de Lyon avait eté déjà usité dans
un Système de Hauts Grades cultivé depuis 1770 par un Chapitre souché sur la Loge
Saint-Théodore de Metz. Le degré suprême de ce Système régional s'appelait Ecossais
Rectifié de Saint-Martin; il avait pour héros éponyme l'illustre évêque de Tours, le
chevalier romain qui avait partagé son manteau avec un pauvre, acte de charité rappelé
par de nombreux tableaux et statues exposés dans les églises de France. La Cité Sainte
dont les membres du Chapitre Saint-Theodore se proclamaient les Chevaliers était donc
Rome. Leur plus haut grade localisait en France le thème fondamental d'un haut grade
plus ancien, I'Hospitalier de Palestine, qui faisait allusion à la charité active pratiquée par
les moines guerriers appartenant à l'Ordre religieux qu'avait fondé, pour la protection des
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50 pèlerins en Terre sainte, Saint Jean évêque de Jérusalem. Autant de phrases, autant d'erreurs.
3. - Au demeurant, je ne pense pas que ni Chevalier (qui d'ailleurs était le titre du dernier grade de la Stricte Observance) ni Bienfaisant (si conforme à la vocation des Maçons Chevaliers) requièrent des explications compliquées. Celles-ci, en toute hypothèse, n'exprimeraient, il me semble, que des raisons supplémentaires. Quant à la Cité Sainte, outre la référence prétendue discrète à l'Ordre du Temple, à cette ville où Salomon avait construit le sanctuaire qui est le type essentiel de la Maçonnerie, point n'est besoin d'aller chercher loin les raisons, d'ailleurs liées à la raison majeure, pourquoi les Chevaliers Maçons aimaient à la mentionner.
II. - Fondation des C.B.C.S.
Le chapitre provincial d'Auvergne, à la date du 28 août 1778, reconnaît comme il a reconnu depuis longtemps la nécessité indispensable de réformer la dénomination du SaintOrdre; le Code des règlements généraux des provinces, des instructions particulières des officiers, le précis historique de l'Ordre, le rituel de vestition et cérémonies et les règles; de purger les unes et les autres des additions arbitraires qui y ont été faites par les différents frères a Spica aurea et ab Ense [ sc. Weiler et Hund respectivement ], ainsi que des cérémonies et règles trop monacales pour pouvoir convenir dans un Ordre tel que le nôtre dans un siècle tel que celui où nous vivons.)> (Registre des délibérations du Grand Directoire, B.M. Lyon Ms. 5 481, p. 70, Cf déjà à la date du 25 avril 1777, ibid., p. 8). La question du titre C.B.C.S., qui donnerait son nom à l'Ordre entier de la Stricte Observance métamorphosée au plan national, fut mise sur le tapis au cours de la premiere séance du Convent des Gaules, le 25 novembre 1778:
Les respectables Frères Chanceliers requirent que la dénomination de l'Ordre fut le premier objet à arrêter, que tous les membres de l'Ordre désiraient voir abolir l'ancien nom. Ils représentent que l'Ordre avait porté pendant quelques années celui de Chevalier Bienfaisant de la Cité Sainte dans un temps où ils n'avaient aucune possession; que son nom n'était point connu, qu'il pourrait remplir le but qu'on se propose en désignant l'Ordre sous une dénomination qui ne serait aperçue que par les membres qui le composent, et que sans cesser d'appartenir au même Ordre, on annonce, en reprenant l'ancien nom, une renonciation absolue aux possessions qu'ils ont eues depuis un autre nom.>)
Donc, I'on traitera l'affaire au cours de la deuxième séance.
Le 27 novembre, deuxième séance, I'objet de la dénomination de notre Saint Ordre ayant été mis en délibération, il fut arrêté unanimement qu'il serait désigné dorénavant sous la qualification de l'Ordre des Chevaliers Bienfaisants de la Cité Sainte. Lors de la sixième séance, le 3 décembre 1778, Willermoz lit la partie historique de l'instruction du grade, rédigée par ses soins.
Le Convent statue que cette instruction serait jointe aux actes officiels du Convent, mais
non enregistrée, qu'elle serait ensuite confiée aux représentants des Préfectures charges
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51 des réceptions et instructions des Chevaliers pour être déposée dans chacune entre les mains des Frères à qui il croira devoir les adresser.
Le 5 décembre 1778, au cours de la huitième séance, on a fixé les signes, mots et attouchements des Novices et le nouveau signe des Chevaliers Bienfaisants de la Cité Sainte.
III. - Documents.
Les documents relatifs au C.B.C.S. sont nombreux. Citons, principalement, les dépôts de la
Bibliothèque Municipale de Lyon (fonds Willermoz) et du Grand Orient a La Haye (fonds
Kloss). Le Code général des règlements de l'Ordre des Chevaliers Bienfaisants de la Cité
Sainte arrêté au Convent des Gaules tenu en novembre 1778 a été commodément repris
ap. Jean Tourniac, Principes et problèmes spirituels du Rite Ecossais Rectifie et de sa
Chevalerie templière (Dervy-Livres, 1969, pp. 305-350). Un rituel de réception a été publié par Jean Kostka (alias Jules Doinel, Lucifer démasqué, Paris-Lyon, Delhomme et Briguet, s.d. [ 1895 ], pp. 274-296).
IV. - Le grade.
l. - Le grade de C.B.C.S. n'est pas un grade maçonnique, car l'Ordre des C.B.C.S. est un Ordre équestre souché sur une base maçonnique en quatre degrés symboliques. Cependant, la terminologie est assez flottante (par analogie avec le ballottement où est soumise au sein du Rite Ecossais Rectifié la question des rapports entre la Maçonnerie et le Temple mediéval). Aussi bien le C.B.C.S. est-il armé, et la Franc-Maçonnerie est-elle considérée comme la pépinière du Saint-Ordre.
Chaque Chevalier, au moment de son armement, reçoit, comme dans la Stricte Observance, un nom d'Ordre (nomen in ordine; p. ex. Jean-Baptiste Willermoz était Eques ob Eremo, Joseph de Maistre, Eques a Floribus, etc), une devise en latin tirée des psaumes et des armes.
2. - Pour le regroupement de l'Ordre intérieur en Commanderies, Préfecture, Grands Prieurés Cf ECUYER NOVICE. Le Code fournit toutes indications sur ce système. Retenons que la Maçonnerie symbolique est sous le contrôle de l'Ordre intérieur et que le Grand Maître Général gouverne les six grades du Rite Ecossais Rectifié. 3. - Le rituel d'armement prescrit, avant la réception proprement dite, que le Commandeur s'adresse à l'Ecuyer novice en ces termes qui annoncent le sens du grade, le sens de l'Ordre:
Le dépôt de la science primitive de l'homme, conservé dans les anciens mystères, brille de
tout son éclat dans le Temple célèbre que Salomon avait élevé dans la Cité Sainte à la
gloire de l'Eternel qui daigna l'habiter. Vous voyez l'image, tracée devant vous, de son
Saint Sépulcre. Ce Temple fut détruit, les sages se retirèrent dans les déserts et y
préférèrent d'abord la vérité aux honneurs du siècle. Bientôt, sentant le besoin d'une
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52 activité utile et pénible, ils rentrèrent dans le monde où, apprenant la persécution de beaucoup de leurs Frères, ils déchirèrent leur sein, tranquilles de leur innocence et qu'aucun remords ne troublait leur coeur, et que rien en eux ne donnait de moyens d'observer leur fortune.
Le sanctuaire du Temple redevint l'asile de l'éternelle et auguste vérité, son parvis, celui du malheur; on y consolait la veuve, I'orphelin y trouvait un père, les voyageurs un défenseur, le malade et le pauvre des secours généreux, telle est l'origine de l'Ordre des Templiers, des Frères vertueux dont nous tirons la nôtre, et aux vertus desquels vous êtes appelé à succéder.
La science, cachée auparavant dans des réduits écartés où elle mettait au-dessus des besoins ceux qui la professaient, fut alors consacrée au bonheur de l'humanité; mais le Temple s'écroula, et les Maçons propageant l'existence et les fruits d'un Ordre célèbre, le réédifièrent, adapté par une réforme sage aux besoins et à la situation actuelle de l'Europe. Il a repris dans ce siècle, le dix-huitième, son nom de Chevalier Bienfaisant de la Cité Sainte pour l'allégorie du Saint Sépulcre de Jérusalem en Palestine, et sera, pour le reste de votre vie, une école de bienfaisance, un foyer de lumière et l'asile de l'amitié la plus douce. Par le pouvoir qui m'a été conféré, je vais vous recevoir dans le Saint Ordre. 4. - Dans le discours d'instruction qui suit la réception proprement dite, I'Ordre du Temple est d'emblée mis en cause: sa fondation en 1125, ses malheurs que la jalousie de sa richesse causa. <~ Nous dit le Commandeur, qui sommes leurs descendants avons une tradition bien certaine des malheurs qui ont occasionné la destruction de notre Ordre. Mais trois Templiers s'échappèrent et trouvèrent refuge en Ecosse, dans des cavernes près d'Heredom. Ils s'associèrent avec les Chevaliers de Saint-André du Chardon d'Ecosse, d'où le quatrième grade.
A Heredom, en 1340, fut fondé l'Ordre des Francs-Maçons par les Templiers. Ils avaient prévu, et il demeure, que les trois premiers grades sont des épreuves imposées aux candidats à l'intérieur. L'Ecuyer novice comprend alors le sens de son passage par la Maçonnerie.
Deux emblèmes sont chers à l'Ordre des C.B.C.S. Le phénix fut choisi par les illustres fugitifs qui continuèrent le Saint Ordre pour remplacer l'ancien sceau du Temple, où figuraient deux cavaliers sur un cheval. Le pélican, d'autre part, signifie les secours que l'Ordre ancien fournissait aux commanderies de son ressort et la bienfaisance qui, depuis la réforme de l'Ordre, caractérise le Chevalier.
V. - Altérations et déviations.
1. - Au cours des ans, le rituel a subi des altérations. Donnons-en deux exemples. En Suisse, la dénonciation de l'infamie du pape Clément V s'accompagne de propos très généralement antipapistes, où les institutions de l'Eglise au Moyen Age sont dénoncées, à la seule exception... de l'Ordre du Temple. Curieuse rencontre, en milieu écossais rectifié, du laïcisme maçonnique et de l'atavisme protestant.
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Deuxième exemple: la plupart des rituels modernes, depuis une date que je n'ai pu encore fixer mais qui se situe au XIXè siècle, comportent, à la fin de la cérémonie, une scène pendant laquelle les Chevaliers présents, Grand Prieur ou son délégué en tête, délient leur nouveau confrère de ses serments maçonniques. L'idée, clairement expliquée, est belle, plus étrangère à la tradition des C.B.C.S. dans la forme que dans le fond. Mais c'est une innovation.
2. - La position médiane de l'Ordre des C.B.C.S. est difficile à tenir; elle prête aux déviations vers la gauche ou vers la droite. a) Vers la gauche, en quelque sorte, dévièrent les Frères de Francfort, Darmstadt et Wetzlar surtout, qui sous la conduite du Baron de Dittfurth résistèrent aux décisions du Convent de Wilhelmsbad. Fatigués des Hauts Grades, des Ordres intérieurs et autres superstructures, ils n'en voulurent plus rien savoir. L'Union éclectique naquit de leur lassitude et de leur maçonnisme éclairé plus qu'illuminé. b) A droite, en revanche, il faut situer la singulière histoire du Chapitre des C.B.C.S. de Francfort, au commencement du XIXè siècle. Félix Kretschmar, érudit francfortois des années 1920, en a recueilli les éléments dans un lot d'archives à lui venu de son compatriote et parent Johann Friedrich von Meyer (1772-1849). Une correspondance, étayée par plusieurs documents, et conservée dans un fonds privé d'archives dites archives S.O. >), me permet, avec l'autorisation de son dépositaire, de résumer ainsi l'affaire que je me propose d'analyser ailleurs.
Un certain nombre de C.B.C.S. de Darmstadt et de Francfort, auxquels vinrent se joindre
quelques C.B.C.S. de Strasbourg, les uns et les autres membres en outre de la Grande
Profession, et fervents de théosophie, gardèrent, dans une Allemagne peu favorable, leur
fidélité au Rite Ecossais Rectifié - mieux vaudrait dire ici à l'Ordre des C.B.C.S. Car s'ils
innovèrent eux aussi, ce fut pour détacher l'Ordre intérieur, dont ils constatèrent crûment
le caractère non maçonnique, des quatre premiers grades du Rite Ecossais Rectifié
Dans leur néo-Ordre des C.B.C.S., ils admirent des profanes, se contentant de leur
communiquer, avant de les recevoir Ecuyers Novices, non pas les grades, mais les cahiers
des grades symboliques. Johann Friedrich von Meyer, hermétiste très chrétien (son nom
d'Ordre était Eques a Cruce), ami et protégé de Christian de Hesse-Darmstadt, substitut du
Grand Maître Charles de Hesse-Cassel, fut l'un d'eux. On lui laissa même le soin de
rédiger un Projektierte Statute des Rittertums der heiligen Stadt, nouvelle manière. (Les
papiers de Kretschmar en comprennent une copie).
Vers 1830, selon Kretschmar, le Chapitre cessa ses travaux.
Deux documents conservés dans le fonds Kloss du Grand Orient des Pays Bas apportenl une information précieuse et complémentaire sur le Chapitre des C.B.C.S. de Francfort qui s'y manifeste davantage, semble-t-il, comme un collège de Gands Profès. En particulier, leur activité paraît s'être poursuivie jusqu'en 1835, puisque l'une des deux pièces est constituée par le livre des travaux du collège de 1827 à cette date.
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PROFES ET GRAND PROFES
Jean-Baptiste Willermoz écrivait à la fin de l'Empire: Celui qui reçoit le sixième (sc. Ie
sixième grade, c'est-à-dire le grade de Chevalier Bienfaisant de la Cité Sainte) apprend par
l'instruction qui le termine que ce grade qui est réellement une conclusion très satisfaisante
est le dernier du Régime; qu'il n'a rien de plus à lui demander ni à en attendre. Malgré
cette déclaration quelques-uns, par-ci, par-là, se plaisent à penser qu'au-delà de ce 6è, il
existe encore quelque grade ou instruction d'un Ordre et d'un genre plus élevés. Mais si
cette conjoncture était fondée, il n'en résulterait pas moins que ce quelque chose qui serait
supposé au-delà, n'étant annoncé ni avoué par les directoires et les régences, personne n'a
le droit de le leur demander, et que toute sollicitation serait inutile et déplacée. (ap. Pierre
Chevallier Louis Mathias de Barral, ancien évêque de Troyes Franc-Maçon du Rite
Ecossais Rectifié... Mémoires de la Société académique d'agriculture, des sciences, des
arts et belles-lettres du département de l'Aube, tome CIV, Troyes, 1967, pp. 204-205). ...L'Ordre des Chevaliers Bienfaisants de la Cité Sainte, Ordre chevaleresque, est enté sur une Maçonnerie symbolique en quatre grades, le Rite Ecossais Rectifié. Mais, au-dessus du deuxième et dernier grade de l'Ordre des Chevaliers Bienfaisants de la Cité Sainte, intitulé précisément ~< Chevalier Bienfaisant de la Cité Sainte et souvent nommé le 6è grade, audessus de l'Ordre des Chevaliers Bienfaisants de la Cité Sainte proprement dit, il existe une double classe secrète, celle de la Profession et de la Grande Profession. L'histoire et la nature de cette classe ont été souvent méconnues ou défigurées. En 1969, les responsables constatèrent que des études imprimées, des rumeurs avaient excité la curiosité et causé une controverse sur la persistance de la Grande Profession. Des légendes y avaient saisi prétexte à naître ou à renaître. Une mise au point officielle fut publiée, sous le titre assez coquettement modeste A propos du Régime Ecossais Rectifié et de la Grande Profession, et la signature Maharba >) (anagramme d'Abraham?), dans le Symbolisme, octobre- décembre 1969, pp. 63-67. A ce texte sans pareil, il faut nécessairement recourir. J'en reproduis donc l'essentiel mot pour mot.
Or, les faits sont patents; ils composent l'histoire et manifestent la doctrine des Grands Profès. Rappelons-les.
1. - La Grande Profession, en même temps que la Profession, des Collèges métropolitains a été instituée lorsque fut créé l'Ordre des Chevaliers Bienfaisants de la Cité Sainte, au Convent national des Gaules tenu à Lyon en 1778.
Au Convent de Wilhelmsbad, elle cessa d'exister of ficiellement. Un demi-siècle suffit à I'abolir, en fait, à quelques exceptions près qui étaient individuelles. Aussi, le 29 mai 1830, Joseph-Antoine Pont, Eques a Ponte alto, et dans ses propres termes.
Visiteur général dépositaire de confiance de feu ab Eremo qui était dépositaire général et
archiviste de la llè province, devenu depuis sa mort seul dépositaire légal du Collège
métropolitain établi à Lyon ; constatant I'inaction et la suspension indéfinie des travaux
dudit Collège métropolitain ; considérant qu'il se trouve etre le seul grand dignitaire de
l'Ordre subsistant dudit Collège et qu'il est aussi important qu'urgent de pourvoir à
l'érection d'un College >~; vu les articles 22, 23, 24 et 25 des Statuts et Règlements de
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55 l'Ordre des Grands Profes qui prévoient un tel cas et parent au danger d'extinction; accorde une charte pour la constitution du Collège et Chapitre Provincial des Grands Profès a Genève.
La Suisse, où le Régime Ecossais Rectifié et l'Ordre des Chevaliers Bienfaisants de la Cité Sainte continueront de s'abriter jusqu'à nos jours, devenait aussi le conservatoire de la Grande Profession.
2. - La Grande Profession ne peut être confondue avec le grade maçonnique ni avec un degré chevaleresque (a) et surtout pas avec ces grades et ces degrés qu'elle surplombe. Un but lui est assigné: veiller à l'intégrité et favoriser la culture du dépôt inhérent au Saint Ordre primitif, qui existe depuis toujours et que l'Ordre des Chevaliers Bienfaisants de la Cité Sainte, issu d'une double tradition maçonnique et chevaleresque, incarne à présent. Car les quatre grades symboliques du Régime Ecossais Rectifié (Apprenti, Compagnon, Mâître, Maître de Saint-André) et les deux degrés de l'Ordre intérieur (Ecuyer Novice et Chevalier Bienfaisant de la Cité Sainte) visent à former et à employer des dépositaires de confiance, chacun selon le rang et l'ouverture dont il jouit. Le Grand Profès est un dépositaire de toute conf~ance.
3. - La Grande Profession du Régime Ecossais Rectifié, classe suprême de l'Ordre des Chevaliers Bienfaisants de la Cité Sainte, est l'acte par lequel les Chevaliers et les Frères des classes inférieures du même Ordre qui en seront trouvés dignes sont initiés, après les épreuves requises, à la connaissance des mystères de l'ancienne et primitive Maçonnerie et sont reconnus propres à recevoir l'explication finale des emblèmes, symboles et allégories maçonniques.
On n'entre point dans cette classe par quelque initiation cérémonielle ni par quelque nouvelle décoration. La simplicité vers quoi tend le système entier de l'Ordre des Chevaliers Bienfaisants de la Cité Sainte y culmine dans la pure spiritualité. La Grande Profession enchâsse l'arcane de la Franc-Maçonnerie et y participe, quoi qu'elle ne soit pas d'essence maçonnique. Ses secrets sont inexprimables et c'est ainsi qu'elle forme, de soi, une classe secrète.
4. - Les Grands Profès, selon leurs lois, ne dissimulent pas davantage qu'ils n'exhibent leur qualité. Mais une classe ou d'ailleurs un Ordre, dont la spiritualité - mieux: I'esprit fait le fond, saurait-il se vulgariser sans déchoir et sans perdre son honneur avec son mode et sa raison d'être?
(a) Ainsi, par exemple, la ligne successorale des Grands Profès du Régime Ecossais Rectifié n'est ni identique, ni apparentée à la filiation initiatique d'aucune classe de l'Ordre des Chevaliers Maçons Elus Cohen de l'Univers, fondé par Martines de Pasqually. L'histoire, le droit et la coutume protestent contre toute confusion de ces deux descendances dont la seconde ne paraît d'ailleurs pas s'être perpétuée jusqu'à nos jours.
Les Grands Profès refusent, statutairement, les candidatures, et ils se cooptent à
l'unanimité obligatoire. Des Supérieurs Inconnus, au sens quasi mythologique du titre,
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I'incognito leur manque, puisqu'ils sont tous Chevaliers Bienfaisants de la Cité Sainte connus.
5. - Des mêmes Supérieurs Inconnus, il manque encore aux Grands Profès le genre de supériorité que ce titre implique. Leurs statuts et règlements excluent l'intervention dans la machinerie de l'Ordre pyramidal dont ils sont la pierre à pointe, imperceptible par beaucoup.
6. - De droit et de devoir, et éminemment, imconbent aux Grands Profès les tâches que le soin de l'Ordre requiert avec modération de tous les Maçons Ecossais Rectifiés et de tous les Chevaliers Bienfaisants de la Cité Sainte, Veilleurs et Gardiens; ils spéculent aussi, poussant aux recherches et aux réflexions sur le dépôt dont ils encouragent les partisans. Cette action des Grands Profès, quelle variété dans ses aspects contingents ! Mais jamais le Grand Architecte de l'Univers ne l'a laissé s'interrompre. Et il n'est pas de cas où elle se soit exercée - comment l'aurait-elle pu? comment le pourrait-elle sans se renier? - d'autre façon qu'en esprit et en vérité, pour le meilleur du Régime Ecossais Rectifié et de l'Ordre des Chevaliers Bienfaisants de la Cité Sainte; pour le bien de la Franc-Maçonnerie; à l'aide des hommes qui, partout, prient, souvent à leur propre insu, pour que luise le soleil de justice, source unique de lumière et de chaleur, où le Seigneur a dressé sa tente et dont souMe Son Esprit.
Cet essentiel du texte révélateur dit l'essentiel sur la Grande Profession. Ajoutons quelques remarques en marge.
I. - Histoire.
a) ka Profession et la Grande Profession du Régime Ecossais Rectifié ont succédé au Chevalier Profès, grade suprême de la Stricte Observance Templière. La date d'apparition de ce grade dans la Stricte Observance Templière est discutée: entre 1763 et 1770, selon certains; à l'occasion, selon d'autres, du Convent de Kohlo (1772) et sous l'influence du Cléricat de Starck. Jean-Baptiste Willermoz et plusieurs de ses amis (mais Saint-Martin fit défaut) le reçurent à Lyon, les 11 et 13 août 1774, des mains de Weiler. Ostabat a publié et remarquablement présenté, s'agissant de ce grade: le ~< cérémonial à observer quand un Frere fait sa dernière profession >); sept articles de la Règle en usage dans l'Ordre de la Stricte Observance Templière, et qui pour le principal n'est autre que celle de l'Ordre du Temple, un court extrait de 1' Instruction pour les habits, croix et armes qui concerne directement les Chevaliers Profes (Cf Les Chevaliers Profès de la Stricte Observance Templière et du Régi~ne Ecossais Rectifié, Le Symbolisme, avriljuin 1969, pp. 249-263; I'article entier occupe les pages 240-283.
b) La Profession et la Grande Profession du Régime Ecossais Rectifié ont été composées
sous leur forme définitive, par Willermoz, pour le Convent de Lyon (1778). Iors duquel
elles furent conférées à leurs premiers titulaires. C'est ainsi que le premier Collège fut
constitué le 3 décembre 1778 par Gaspard de Gasparon (Président), Willermoz lui-même
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(dépositaire général), Jean de Turkheim, F.-R. Salzmann~ Jc;ul Paganucci (censeur) et Jean-André Périsse Duluc (substitut du dépositaire).
De même Willermoz veilla à ce que des membres éminents, étrangers à la Nation française, du Convent de Wilhelmsbad (1782), les reçussent à leur tour, après être devenus, eux aussi, Chevaliers Bienfaisants de la Cité Sainte (ou plutôt Chevaliers Bienfaisants tout court).
Willermoz a rédigé les textes rituels, notamment les instructions. Mais il avertit: tout ce que j'y ai inseré concernant la partie scientifique [ sc. doctrinale ] n'est point du tout de mon invention.
II. - Editions de textes rituels.
Paul Vulliaud a édité l'Instruction secrète pour la réception des Profès, le Dialogue après
la réceptioo d'un Frère Grand Profès entre le Chef initiateur et le nouveau reçu,
l'Instruction préliminaire et le Résumé général de la doctrine (Joseph de Maistre Franc-
Maçon, E. Nourry, 1926, pp. 231-257)
L'Initiation secrète des Grands Profès a été publiée pour la première fois, par
autorisation, voire par Ordre, dans l'étude précitée d'Ostabat (p. 264-278), avec une
excellente présentation. En 1973, la fin du texte n'avait pas encore paru. Aussi faut-il
signaler une édition complète, mais postérieure et très défectueuse, du texte ap. René Le
Forestier, La FrancMaçonnerie templière et occultiste aux XVIIIè et XIXè siècle, Paris,
Aubier-Montaigne, et Louvain, Nauwelaerts, 1970, (pp. 1023-1049). c) A plus d'une reprise, la procédure utilisée par Pont, afin de maintenir l'existence de la Grande Profession, a été appliquée entre 1830 et nos jours. d) De la nature particulière de la Grande Profession, il appert qu'au cas d'une réception, toute distinction entre validité et licéité serait illégitime. Seul le Président d'un College régulièrement constitué, ou son délégué est capable de faire un Grand Profes, puisqu'il est seul habilité à le recevoir dans la classe que le Collège incarne. Il n'y pas de Grand Profès, ni de Collège, "irrégulier" ou "sauvage"; il peut y avoir des pseudo-Grands Profès et des pseudo-Collèges de pseudo-Grands Profès.
III. - Doctrine.
L'originalité de la Profession et de la Grande Profession du Régime Ecossais Rectifié par rapport au Chevalier Profès de la Stricte Observance Templière est flagrante. Il ne s'agit plus de spiritualité chevaleresque, même particulièrement templière, mais de communiquer une doctrine qui remonte à la plus haute antiquité, un extrait fidèle de cette sainte doctrine parvenue d'âge en âge par l'initiation jusqu'à nous. Or, cette doctrine, c'est, sous la forme où Willermoz l'a connue et même dans sa définition qu'il vient de réumer, le martinésisme.
Sous une réserve importante cependant: la Grande Profession n'est pas une ordination, de
même que l'Ordre des C.B.C.S. n'est pas l'Ordre des Elus Cohen. Les Grands Profès ne
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58 pratiquent pas, ès qualités, la théurgie et même les textes rituels sont à dessein muets sur ce sujet.
Les points capitaux de l'initiation secrète des Grands Profès sont la nature de l'initiation et celle de la Franc-Maçonnerie; un précis de l'épopée martinésiste où s'articulent Dieu, les esprits émanés, le cosmos créé, I'humanité; une interprétation du symbolisme du Temple de Jérusalem à la lumière du martinésisme et en rapport avec la Franc-Maçonnerie. Le but de Willermoz était donc de préserver la doctrine dont Martines de Pasqually avait été, selon que ce dernier le lui avait enseigné, l'un des relais seulement; maintenir, quand sombrait l'Ordre des Elus Cohen, la vraie Maçonnerie selon le modèle que Martines de Pasqually lui avait révélé comme l'archétype et que garantit une conformité doctrinale avec la doctrine de la réintégration.
IV. - Maharba, au nom des siens, assure que la Grande Profession enchâsse I'arcane de la Franc-Maçonnerie. Ne vaudrait-il pas mieux écrire: I'arcane du Régime Ecossais Rectifié? Mais le Régime Ecossais Rectifié se tient et se donne pour la perfection de la FrancMaçonnerie (un peu comme les Elus Cohen jugeaient les autres Rites maçonniques <~ apocryphes). Ainsi se dissipe l'apparente inexactitude. Maharba a-t-il raison au fond? Le Régime Ecossais Rectifié a-t-il raison au fond? C'est une autre affaire, hors le sujet; affaire d'opinion.
V. - Enfin, voici le texte de la lettre d'envoi aux Grands Profès de Genève. Moulinié, Peschier et Aubanel, reçus antérieurement par communication et constitués le même jour en Collège métropolitain, des documents qui les habilitaient, (communication fraternelle de Maharba, à qui grand merci). Document historique, document doctrinal d'un véritable ésotérisme.
Très chers Frères les Chevaliers et Grands Profès de Genève !
Nous cédons à vos voeux et à notre conviction en vous envoyant la légalisation et autorisation nécessaires à la régularité et à l'extension de vos travaux. Une seule signature accompagne ici celle du Visiteur général, mais c'est celle du neveu chéri de feu ab Eremo, de celui qui a été l'objet de toute sa tendresse, de ses sollicitations les plus secrètes, ainsi que l'écrivain de la présente en a été l'intime confident. Il le rappelle ici pour votre douce satisfaction et pour que ce nom vénéré ne reparaisse au milieu de vous que couronné par le respect de la reconnaissance qui doivent toujours l'accompagner. Mon frère aîné est absent, le plus jeune, digne aussi de tous nos suffrages, n'a pu participer aux derniers travaux d'une manière régulière... Tout le reste a disparu.
Du sein de cette sollicitude que tant de souvenirs animent, nos coeurs ont entendu votre
voeu, ils l'ont accueilli en se pénétrant de la justice, de la convenance, de l'utilité, de
l'autorisation demandée, ils se sont émus de joie et de reconnaissance: Oui ! TT $ CC $ FF
$.
ils vous remercient avec attendrissement et gratitude d'avoir sollicité de nous cet acte de justice~ de devoir et ils supplient le Dieu de toute miséricorde de vous le rendre profitable et d'écarter tout ce qui pourrait en résulter de nuisible en particulier comme en général.
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Point d'empressement humain, chers amis et bien-aimés Frères ! Le zèle de l'homme est loin d'être celui de la maison de Dieu ! Soyez pleins de patience, de longanimité, et surtout, Aimez-vous les uns les autres ; adorateurs et enfants de l'unité, honorez-la et soyez un comme votre rédempteur, votre Créateur (et leur amour qui sans cesse engendre, conserve, régénère) sont un. Au nom de cette unité, qui triomphera de toutes les divisions du temps, aimez-vous, supportez-vous, secourez-vous les uns et les autres ! Voilà le vrai sens de toutes nos instructions ! En voilà tout l'esprit ! Puissions-nous le sentir, le comprendre et l'expérimenter ! Nous vous serrons dans nos bras et vous demandons la bonne part dans vos souvenirs fraternels, comme nous vous assurons que vous avez dans les nôtres celle que mesure notre devoir et notre sincère affection. A tous et à chacun de vous nous offrons le vrai salut et baiser fraternels.
Vos affectionnés Frères.
[ Signé: ] Antoine Willermoz Joseph Antoine Pont in ordine a Ponte alto.
Lyon 29 mai 1830
IV. - Confidence du passé, exhortation pour l'avenir.
"Article premier. La Grande Profession de l'Ordre des Chevaliers Bienfaisants de la Cité Sainte est l'acte par lequel les Chevaliers et les Frères des classes inférieures du même Ordre qui en seront trouvés dignes sont initiés, après les épreuves requises, à la connaissance des mystères de l'ancienne et primitive Maçonnerie et sont reconnus propres à recevoir l'explication et le développement final des emblèmes, symboles et allégories maçonniques. " Cette définition est descriptive, d'après les statuts dont elle constitue l'article premier. (Mais rien, dans la doctrine, n'interdirait qu'un Grand Profès, de même qu'un Chevalier Bienfaisant de la Cité Sainte, fût un profane, c'est-à-dire un non-Maçon). La Grande Profession conserve en son entier le dépôt de la doctrine de la réintégration, voilà qui la définit philosophiquement.
L'une et l'autre définitions se concilient, voire s'articulent, se complètent, pourvu que soient reconnus la vraie origine et le but véritable de la Franc-Maçonnerie, auxquels s'ordonnent et qu'enseignent peu à peu les grades successifs du Rite Ecossais Rectifié et que les Grands Profes cultivent, sous les espèces réelles de la réintégration. L'essentiel du passé et du futur, Willermoz le déclare dans une lettre à Salzmann, du 3-12 mai 1812 (inédite, fonds L.A.). Son propos demeure pour tous ceux qu'il peut concerner. Vous devez vous rappeler, cher ami, que, dès l'origine de la formation à Lyon de la classe des Grands Profès annexée à l'Ordre intérieur et d'un Collège métropolitain, il fut convenu entre tous ceux qui y participèrent avec connaissance de cause, que l'auteur, ou pour mieux dire le principal rédacteur, des instructions secrètes de cette classe qui furent alors produites, ne serait jamais connu:
I) Parce qu'elles ne furent livrees qu'à cette condition.
II) On reconnut que pour attrayer la plupart des hommes il faut jeter un voile de mystère sur l'origine des choses qu'on leur présente à méditer.
III) Parce que nul n'étant bon prophète dans son pays, il suffit souvent que l'auteur d'une bonne chose soit connu pour que la chose même perde tout son prix. La masse juge l'homme de son gré et non plus la chose.
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Il fut donc convenu que tous s'accorderaient à dire que ces instructions secrètes venaient du fond de l'Allemagne; que le Frère dépositaire par de secrètes correspondances en avait heureusement découvert les possesseurs formant une classe très secrète et ignorée dans l'Ordre intérieur et qu'il en avait obtenu un dépôt central pour Lyon à l'époque du Convent National, à la condition qu'ils resteraient ignorés et que le dépositaire général correspondrait seul avec eux pour la suite et le complément des dites instructions; enfin que d'après leur autorisation, quelques Frères membres du Convent National de Lyon en avaient fait une rédaction plus correcte en langue fraçaise qui avait reçu leur approbation. Voilà ce qui fut convenu, voilà le langage que j'ai constarnment tenu envers tous les autres sans exception, dont je ne me suis jamais écarté et dont je ne m'écarterai jamais quoiqu'il arrive ailleurs. J'avais tenu le même langage à mon ami a Ponte alto [ sc. Joseph-Antoine Pont ], et il en était persuadé lorsqu'il alla à Strasbourg ou je vous l'avais recommandé. Mais, à son retour, quel fut mon étonnement à la première occasion qui se présenta sur ce sujet de le voir informé par vous que j'étais l'auteur de ces instructions ! Je fus atterré de ce coup-là dont je sentis à l'instant toutes les conséquences présentes et futures. Je mentirais si je dissimulais que je fus extrêmement sensible à cet oubli qui, dans ce genre, était plus qu'une imprudence; d'autant plus que je dus conclure qu'elle n'était pas la première et qu'elle avait été commise vers d'autes et peut-être aussi par d'autres. Mais, ferme dans mes principes et dans mes résolutions, je lui niai le fait. Le F. ab Hedera [ sc. FR.- R. Salzmann ], lui disje, s'est trompé, ou bien vous l'avez mal compris. Les choses sont comme je vous les ai dites, tenez-vous-en à cela; je dois le savoir mieux que personne, puisque le dépôt est venu par mon entremise et qu'il est resté entre mes mains. Depuis lors, il a évité de m'en reparler, et moi de même. Si je m'étais cru permis de pouvoir faire une confidence à quelqu'un, certes, c'est à lui que mon coeur l'aurait faite. Mais pouvaisje, à cause d'une indiscrétion, me soustraire à un engagement commun, lorsque tous les autres y restaient assujettis? J'ai pu sans blesser la vérité soutenir le plan qui a été convenu, parce que, si j'ai été le principal rédacteur de ces instructions, je n'ai pas créé la doctrine qu'elles renferment et n'en suis pas l'auteur. J'en ai déguisé la source pour un plus grand bien, et voilà tout. Cependant, par ce fâcheux et imprévu événement, je me vis arrêté tout court dans mes projets de développement de doctrine que j'avais jugés nécessaires et dont j'avais depuis quelques années commencé l'exécution et je pris dès lors la ferme résolution que j'ai suivie de me concentrer désormais en moi-même sur ces matières, ce qui vous explique pourquoi, depuis cette époque, je me suis mis beaucoup moins à découvert. [...]
Vous voyez en même temps que, depuis fort longtemps, j'étais allé au-devant de vos
observations sur nos instructions des G.P. et que j'avais senti la nécessité de donner plus
de développement à quelques parties pour les rendre plus intelligibles, plus attrayantes,
plus profitables. Quand elles furent produites, on voulait bien dire beaucoup, mais on
craignait encore plus d'en dire trop. On était de plus entouré de systèmes et de censeurs et
il fallait user de beaucoup de ménagements pour ne heurter personne. Les temps sont
changés, trente années et plus écoulées depuis lors ont élagué les systèmes et fait
disparaître bien des censeurs; on peut donc prendre un peu plus de latitude, sans dévier
néanmoins des bases sur lesquelles la doctrine des G.P. est établie; et surtout ne pas imiter
les auteurs que vous me citez, qui, tous, ou presque tous, à côté des vérités les plus
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61 sublimes, ont glissé des idées systématiques et disparates qui déparent tous leurs écrits: unité et simplicité de doctrine doit être le caractère de l'initiation des G.P., comme son but distinctif doit être de faire sentir la nécessité de la religion chrétienne et de la faire aimer et pratiquer, puisqu'il est hautement avoué dès le 4è grade [ sc. Maître Ecossais de Saint-André ].
Je pense comme vous, cher Ami, que ces explications données sur les grades symboliques sont trop incomplètes et devraient être plus é~endues. Lorsqu'elles furent produites, on trouvait tout trop long et il fallut trop abreger. On peut y obvier si tous ceux qui ont des idées sur ces objets veulent fournir des notes qui faciliteraient le travail. Fournissez les vôtres et promptement. De plus, les quatre rituels ont été fort embellis, surtout le quatrième, par les additions qui y ont été faites d'après les bases qui furent adoptées à Wilhelmsbad. Il faut donc aussi les expliquer. Je pense aussi avec vous qu'il faudrait y développer le but, les avantages et les rapports de l'Ordre intérieur dans l'assemblée, vu qu'il est aujourd'hui fixé sur des bases invariables. Fournissez donc vos notes et observations sur toutes les parties qui composent les instructions des G.P., pour pouvoir parvenir à les rendre plus utiles.
Relisez en critique toutes ces instructicns; notez, dans quelle partie que ce soit, les lacunes, les obscurités, les besoins d'explications ou de développement qui vous frapperont; proposez vos idées sur le comment et le pourquoi. Ces choses peuvent être rendues plus claires, plus complètes, plus utiles. La réunion des idées qui viendront de vous et d'ailleurs pourra faire jaillir quelques nouveaux traits de lumière qui en prépareront le plus grand perfectionnement possible. [...]
En plusieurs lieux, dans les séances qui sont consacrées par les statuts des G.P. à l'étude et aux conférences sur leurs instructions secrètes, on y fait ces jours-là un travail mixte; on s'occupe de divers systèmes hypothétiques, souvent plus ou moins discordants; on y raisonne sur des peut-être. Je dis qu'au milieu de ces divagations scientifiques où la vérité reste encore obscure, la curiosité humaine se satisfait, mais la vraie foi n'y gagne rien. L'initiation des G.P. instruit le Maçon, éprouve l'Homme de Désir, de l'origine et formation de l'univers physique, de sa destination et de la cause occasionnelle de sa création, dans tel moment et non un autre; de l'émanation et l'émancipation de l'homme dans une forme glorieuse et de sa destination sublime au centre des choses créées; de sa prévarication, de sa chute, du bienfait et de la nécessité absolue de l'incarnation du Verbe même pour la rédemption, etc. etc. etc. Toutes ces choses desquelles dérive un sentiment profond d'amour et de confiance, de crainte et de respect et de vive reconnaissance de la créature pour son Créateur, ont hé parfaitement connues des Chefs de l'Eglise pendant les quatre ou six premiers siècles du christianisme. Mais, depuis lors, elles se sont successivement perdues et effacées à un tel point qu'aujourd'hui, chez vous comme chez nous, les ministres de la religion traitent de novateurs tous ceux qui en soutiennent la vérité. Puisque cette initiation a pour objet de rétablir, conserver et propager une doctrine si lumineuse et si utile, pourquoi ne s'occupe-t-on pas sans amalgame de ce soin dans la classe qui y est spécialement consacrée?
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CHAPITRE IV
L'Ordre MARTINISTE
Historique
1. - A. - Selon Papus même et à sa diligence: premières initiations personnelles en 1884; cahiers et premières " loges " en 1887-1890.
En 1891 est fondé le Suprême Conseil de l'Ordre martiniste dont Papus s'éfforcera jusqu'à sa mort de perfectionner l'organisation. Papus place son Ordre en connexion avec Martines de Pasqually et les Elus Choen, Saint-Martin, Willermoz et les Chevaliers Bienfaisants de la Cité Sainte, qu'il mêle un peu tous, en y joignant les Philosophes Inconnus.
Papus meurt en 1916, Détré (Teder) lui succède, qui meurt en 1918. Bricaud devient Grand Maître et s'affirme en possession de la succession cohen dont Papus n'aurait même pas, selon lui, soupçonné l'existence. Constant Chevillon en 1934, Henri-Charles Dupont en 1944, Philippe Encausse en 1960 sont les Grands Maîtres suivants.
" B. - Philippe Encausse avait, de son côté, en 1952, réveillé l'Ordre martiniste fondé par son père, qui avait quelque peu viré de bord.
En 1958, Philippe Encausse avait, avec son Ordre martiniste, Dupont avec son Ordre désormais intitulé Ordre martiniste-martinéziste et, enfin, Robert Ambelain avec son Ordre des Elus Cohen, devenant, en la circonstance, l'Ordre martiniste des Elus Cohen, avaient constitué l'Union des martinistes.
Quand Philippe Encausse succéda à Dupont, il fusionna l'Ordre martiniste et l'Ordre martiniste-martinézistes. (Cf Dr Philippe Encausse, L'Ordre martiniste en 1960, Les cahiers de la Tour Saint-Jacques, II-III-IV (, pp. 190-192).
En 1962, L'Ordre martiniste et l'Ordre martiniste des Elus Cohen s'unirent à leur tour pour ne plus former que l'Ordre martiniste, lequel comporta deux cercles: un cercle extérieur, ou Ordre martiniste classique, et un cercle intérieur dit Ordre des Elus Cohen (Cf L'Initiation, avril-juin 1963, pp. 59-63).
En 1967, Ambelain démissionne de son poste de Souverain Grand Commandeur de l'Ordre des Elus Cohen (ou cercle intérieur de l'Ordre Martiniste) en faveur d'Ivan Mosca qui, aussitôt, choisit l'indépendance et le sommeil.
En 1971, Philippe Encausse démissionne au profit d'Irénée Séguret, de la présidence de l'Ordre Martiniste (la présidence ayant remplacé, depuis 1966, pour une raison évangélique, la Grande Maîtrise) ; il en devient Président d'Honneur et Secrétaire général. Puis, il succède, le 1er janvier 1975, à Irénée Séguret, démissionnaire.
" C. - Enregistrons la naissance par Scissiparité (ou par schisme?), entre les deux guerres mondiales, de:
" L'Ordre Martiniste Traditionnel fondé par Victor-Emile Michelet (premier Grand Maître) et Augustin Chaboseau, second Grand Maître après la mort du premier, en 1931, en réaction contre Bricaud ; réveillé, en septembre 1945, avec Augustin Chaboseau comme
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Grand Maître un peu malgré lui, auquel succéda, aprés sa mort, en 1946, son fils Jean; dissous par ce dernier, un an plus tard, par égard à l'individualisme de Saint-Martin. En Août 1933, à Bruxelles, Augustin Chaboseau confèra le titre de Souverain Légat de l'Ordre Martiniste Traditionnel pour les Etats Unis d'Amérique à H. Spencer Lewis, " Impérator " de l'Ordre rosicrucien A.M.O.R.C. Les fondements pour la réorganisation de l'Ordre Martiniste en Amérique furent solidement établis par le Dr. H. Spencer Lewis avant sa mort prématurée, le 2 Août 1939.
Ralph M. Lewis, fils de H. Spencer Lewis, qui avait été initié au 4è degré de l' O.M.S. par Blanchard, le 10 Septembre 1936, fut reçu, de même " Supérieur Inconnu Initiateur " dans l'O.M.T. par Georges Bogé de Lagrèze, Légat de Chaboseau, et ce dernier lui octroya, en Octobre 1939, une nouvelle Charte pour installer l'Ordre Martiniste Traditionnel aux U.S.A. Aprés la guerre, le 12 Novembre 1945, Lagrèze proposa à Ralph M. Lewis d'étendre son activité à l'Amérique du Sud et au Canada.
Le 13 Juillet 1959, Ralph M. Léwis reçut dans l'Ordre Martiniste Traditionnel Raymond Bernard, Grand Maître de l'A.M.O.R.C. pour les pays de langue française, et lui confia le soin de réimplanter l'O.M.T. dans ces pays, avec le Titre de Grand Maître. Le premier groupe (ou Heptade) fut fondé en 1966. En 1977, Christian Bernard succède à son père Raymond Bernard.(Notez qu'un an auparavant, à la suite de nombreuses candidatures provoquées par une émission télévisée, l'entrée dans l'O.M.T. de langue française cessa d'être réservée aux membres de l'A.M.O.R.C. Un lien administratif subsiste, néanmoins, entre les deux organisations: Christian Bernard dirige à la fois l'O.M.T. et l'A.M.O.R.C. pour les pays de langue française, de même que Ralph M. Lewis est à la fois " Souverain Grand Maître " de l'O.M.T. et " Impérator " de l'A.M.O.R.C.
" L'Ordre martiniste et synarchique, fondé par Victor Blanchard, en 1934, encore présent en Grande-Bretagne, au Canada et aux Etats-Unis; une branche française semble se réveiller.
" L'Ordre martiniste Rectifié, fondé par Jules Boucher en 1948, chétif et quasiment mort-né.
Robert Ambelain, quand il eut abandonné l'Ordre des Elus Cohen, fonda, en 1968, l'Ordre martiniste Initiatique, qui reste discret.
Enfin, plusieurs ensembles de groupes nationaux se sont détachés de l'Ordre martiniste pour constituer l'Ordre martiniste suisse, l'Ordre martiniste belge etc... En général, ces Ordres Martinistes Nationaux ont maintenu des relations fraternelles avec l'Ordre Martiniste père.
Pour mémoire, un " Ordre martiniste libéral ", un " Ordre martiniste secret ", un Ordre martiniste universel ", etc.
2. - A. - Saint-Martin n'a pas fondé l'Ordre martiniste (ni d'ailleurs aucun Ordre ni aucune société d'aucune sorte, ni non plus aucun Rite maçonnique).
" B. - L'Ordre martiniste est né en 1891. Tous les autre Ordres martinistes sont dérivés, en tant que tels et d'une manière ou d'une autre, de celui-là.
3. - L'Ordre martiniste de Papus prétend transmettre une initiation spécifique dite: de Saint-Martin. Celle-ci aurait pu se transmettre, avant 1891 et même depuis cette date, en dehors de l'Ordre martiniste. Qu'en est-il?.
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A. - Saint-Martin n'a pas conféré d'initiation rituelle sui generis, soit qu'il en ait été le créateur, soit qu'il ait modifié une initiation à lui conférée. L'invraisemblance psychologique de l'hypothèse contraire est extrême. Et, en toute hypothèse, pas le moindre indice documentaire.
B. - Aucune tradition familiale ou autre ne résiste à l'examen. En particulier la pseudofiliation de Papus (Saint-Martin qui genuit Chaptal qui genuit Papus) est controuvée. C. - La filiation dite russe ne l'est pas moins. Les martinistes au XVIIIè siècle en Russie sont des Maçons Ecossais Rectifiés, des Chevaliers Bienfaisants de la Cité Sainte et/ou des amateurs de Saint-Martin, maçons ou non.
D. - Sur le rapport de l'Ordre martiniste avec la Franc-Maçonnerie, beaucoup d'erreurs ont été répandues. L'Ordre martiniste n'est pas une société maçonnique. D'une part, Papus, aprés avoir été refusé par la grande Loge de France pour crime d'occultisme, en 1899, souhaita d'autant plus que l'Ordre martiniste contribuât à " spiritualiser " la Maçonnerie française et, très naturellement, accentua la coloration maçonnique de sa propre société.
D'autre part, la marque maçonnique ne pouvait que s'accentuer du fait que le recrutement de l'Ordre martiniste s'effectuait, pour la plus grande part mais pas exclusivement, parmi les Francs-Maçons. (Et aujourd'hui encore, nombre de martiniste sont Maçons.) Quand il mourut, Papus n'avait pas désigné de successeur. Il semble même qu'il souhaitait la dissolution de l'Ordre martiniste et avait chargé Georges Loiselle d'y procéder, au cas de son décès.
Téder, élu par le Suprème Conseil, maçonnisa de bon coeur et, en 1918, Bricaud, prétendant à la succession Cohen, superposa le martinisme à la Franc-Maçonnerie. Pour recevoir le premier degré martiniste, le candidat devait être Maître Maçon; pour recevoir d'autres grades martinistes, il fallait posséder de Hauts Grades maçonniques, etc. Afin de boucler la boucle, Papus, en 1914, puis Bricaud tentèrent de constituer quelque groupe maçonnique (Loge ou Chapitre) au sein de la Grande Loge Nationale Indépendante et Régulière qui travaillait au Rite Rectifié. Des pourparlers s'engagèrent avec Edouard de Ribaucourt, Grand Maître de cette Obédience. Ils n'aboutirent pas en leur temps.
Mais, en 1961, une Loge fut fondée, sous l'Obédience de la grande Loge Française-Opéra, et le titre distinctif La France, qui exigea de ses candidats à l'initiation ou à l'affiliation qu'ils fussent martinistes c'est-à-dire détenteurs de la prétendue initiation de Saint-Martin. Depuis 1973, cette exigence a été abandonnée.
4. - La version Chaboseau paraît plausible. Il s'agit d'une chaîne: Saint-Martin, Abbé de La Noue, Antoine-Marie Hennequin, Henri de Latouche, Adolphe Desbarolles,Amélie de Boisse-Mortemart, Augustin Chaboseau.
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" A. - Je lui ai accordé foi, pour ma part, en 1946. Octave Béliard m'en blâma, qui, à raison, niait l'existence de toute initiation issue de Saint-Martin. Mais je persévèrai dans mon opinion.
C'est que G. van Rijnberk avait publié et cautionné et, me semble-t-il, cet historien scrupuleux n'avait pu manquer de vérifier le témoignage qu'il garantissait. Las, une visite à Van Rijnberk en 1953 m'apprit que celui-ci avait reproduit le récit d'Augustin Chaboseau, sans autre forme de procès.
" B. - Or, ma critique de ce récit aboutit à des conclutions négatives; elle en révèle les incohérences, les impossibilités et permet d'en identifier quelques sources (La tradition martiniste ; mais déjà l'essentiel in la maison où mourut le Philosophe Inconnu, Bulletin folklorique d'Ile-de-France, janvier-mars 1969 et Balzac et Saint-Martin, L'Année balzacienne, 1965, Paris, Garnier. 1965.
Un document requiert une mention spécial: il apporte le témoignage de Jean Chaboseau,
fils d'augustin, qui, dans sa lettre de démission, en Septembre 1947, de la Grande Maîtrise
de l'Ordre Martiniste Traditionnel, affirme que son père n'a jamais reçu d'initiation rituelle
des mains d'Amélie Boisse-Mortemart (le texte intégral de cette lettre ap. Dr Philippe
Encausse, Sciences occultes ou 25 années d'occultisme occultisme occidental, Paris, Ocia,
1949).
5. - Conclusion:
Avant Papus, point d'Ordre martiniste; point non plus d'initiation martiniste, c'est-à-dire qui proviendrait de Saint-Martin. Ou, si l'on veut, une initiation intellectuelle et spirituelle, mais point d'initiation rituelle.
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PRESENTATION
1. La grande affaire.
L'affaire du martiniste, c'est-à-dire, en particulier, l'Ordre martiniste; l'affaire des martinistes, c'est-à-dire, EN PARTICULIER, DES MEMBRES DE L'Ordre martiniste, c'est, pour reprendre un mot de Louis-Claude de Saint-Martin (1743-1803),éponyme de l'Ordre, la grande affaire. Et la grande affaire (la grande affaire de l'homme, bien sûr, mais quelle autre grande affaire mériterait de nous absorber?), la grande affaire donc, c'est celle que tentent de cerner les questions auxquelles aucun homme pensant, en tant que tel, ne peut échapper:
D'où viens-je? Qui suis-je? Où vais-je?
Or, de ces trois questions, la seconde est capitale: la connaissance de soi éclaire notre origine qui fixe notre destination.
L'homme vivant, en tant que tel, et avant même de formuler les thèmes de son angoisse, aspire après le bonheur et souffre; il agonise du désir de l'éternité parce que le temps l'enserre, et il éprouve à chaque instant les limites fixées à sa joie, à sa science et à son énergie, tandis qu'il possède en idée l'infini et reste insatisfait faute de l'atteindre et ainsi d'y participer.
Mais qui est malheureux de n'être plus roi, demande Saint-Martin, sinon un roi déchu? Il ne nous importe que de regagner notre royaume. Laissons la métaphore: L'homme, émané de Dieu, puis tombé, ne se retrouvera lui-même, dans la perfection (qui est paix et bonheur) propre à sa nature, qu'en remontant à son état primordial, puis en réintégrant son Principe. De même que la chute s'ensuit de la prétention d'Adam à opérer sans le concours divin, de même cette opération salutaire et libératrice, qui comprend deux étapes majeures, n'est réalisable que par l'effort conjugué de l'homme et de Dieu. Voir le Tableau naturel des rapports qui existent entre Dieu, l'homme et l'Univers. éd. 1782, t II, pp. 135-145.">La grande affaire, Saint-Martin l'a décrite en mode symbolique, de la manière suivante:
Considérons le nombre 4, nombre triangulaire selon les Pythagoriciens, tétractys divine, qu'on peut figurer ainsi dans son mouvement générateur du dénaire:
1 10
..
..
..
4
Un, c'est l'Unique, le Principe, Dieu. 0, c'est le Multiple, la Création, la Circonférence, L'Univers fait de pure apparence. 4, c'est L'homme.
Or, le nombre 4, se trouvant entre l'Unité et le nombre 10, ne paraît-il pas avoir la fonction de faire communiquer l'Unité jusqu'à la circonférence universelle, ou le zéro? Ou, pour mieux dire, ne paraît-il pas être l'intermède placé entre la sagesse suprême, représentée par l'unité et l'Univers, représenté par le zéro? En voici la figure:
1... 4... 0
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Mais l'homme a quitté le centre, abandonné le poste et s'est approché de la circonférence matérielle jusqu'à s'y confondre et s'y renfermer; dès lors il est devenu matériel et ténébreux comme elle, et voici la nouvelle figure que son crime à produit:
1.....Ø
La matière forme ainsi écran, obstacle, prison entre l'homme qui devait en être le geôlier et Dieu qui avait nommer l'homme son député.
Si la Vertu divine ne s'était pas donnée elle-même, jamais l'homme n'en aurait pu recouvrer la connaissance; ainsi il ne lui eut jamais été possible de remonter au point de lumière et de grandeur où les droits de sa nature l'avaient appelé. Mais la Vertu divine est venue parmi les hommes en rétablissant l'Unité primitive et en remettant toutes les puissances dans leur ordre naturel. Cet ordre est en effet restauré par la pénétration de l'Unité dans le quaternaire de l'homme: Ø Nous avons résumé à l'extrême, voire à l'excès, la démonstration de Saint-Martin. Mais celui-ci, dont le lecteur est invité à méditer le texte, élucide le rôle des vertus "Parce que la Vertu divine, Agent universel, a fait les premiers pas, l'homme peut revenir à l'Unité.
De cette Vertu, de cet Agent, le rôle est donc en l'occurence, ainsi qu'il est normal, un rôle décisif.
Ne nous étonnons point cependant des différentes opinions auxquelles les hommes se sont arrêtés
sur l'Agent universel. Quelque idée qu'ils s'en soient formée, il n'est rien en fait de <vertus, de
dons et de pouvoir, qu'ils n'aient pu trouver en lui. Les uns ont dit que c'était un Prophète;
d'autres un homme profond dans la connaissance de la Nature et des Agents spirituels; d'autres un
Etre supérieur, d'autres enfin une Divinité: tous ont eu raison, tous ont parlé conformément à la
vérité et toutes ces variétés ne viennent que des différentes manières dont les hommes se sont placés
pour contempler le même objet. Le tort qu'on eu les premiers, c'est de vouloir rendre exclusif et
général le point de vue particulier qui se présentait à eux; les seconds de ne pas se proportionner à la
faiblesse de leurs disciples et de vouloir leur faire admettre, sans le concours de leur intelligence, les
vérités les plus fécondes que l'esprit de l'homme puisse embrasser. (Tableau naturel...,op. cit. t. p. 146."
Voilà pourquoi l'Ordre martiniste, qui prône un dogmatisme éclairé, a choisi comme
entête des papiers, devise de la société, emblème de science, maxime d'action, symbole de
vie, ce mot, ce Nom à lire avec intelligence:
d c y d i
Par l'Agent universel, Réparateur divin, l'homme est devenu capable d'opérer sa
réintégration et de travailler à la réintégration de tous les êtres, dans leurs premières
propriétés, vertus et puissances spirituelles et divines
2. Martines de Pasqualy - Louis- Claude de Saint-Martin - Jakob Böhme.
Les derniers mots qu'on vient de lire sont tirés du Traité de la réintégration, par Martines de Pasqually (1727-1774). Martines de Pasqually fut en effet le premier maître de Saint-Martin et la fidélité de celui-ci à la doctrine de celui-là ne connut point de relâche et fut presque entière.
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Le trop rapide aperçu sur l'origine et la destination de l'homme que Saint-Martin nous a inspiré, expose aussi - et par une relation de cause à effet - la pensée de Martines de Pasqually.
Mais on a compris que le martinisme est autant manière de vivre que matière de penser; pratique et théorie n'y sont pas dissociées. Niant que l'immatériel en l'homme se puisse réduire à la raison disursive, même assistée de quelque intuition intellectuelle (Oeuvres postumes, Tours, Letourmy 1807, t. II., p. 407."), il invite l'homme à pressentir, puis à discerner, à expérimenter enfin sa composante - qui ne peut être que son essence - divine. L'âme est le nom de Dieu. Et cette révélation est vocation; elle entraîne une éthique, une ascèse, une technique spirituelle.
La technique propre à rétablir le contact unifiant de la partie dégradée et du Tout, la technique inséparable d'une éthique et d'une ascèse pour Martines de Pasqually comme pour Saint-Martin, le premier l'a définie et enseignée comme une théurgie rituelle. Martines de Pasqually admet certes qu'entre l'homme et Dieu, une communication immédiate, à la fois cognitive et amoureuse, qu'on pourrait dire mystique, serait glorieuse et plus conforme à notre vraie nature.
Mais, depuis la chute, constate Martines de Pasqually, la liaison est coupée au niveau supérieur, et lorsque Saint-Martin lui demande s'il faut tant d'ornements, de gestes, de paroles, tant d'intermédiaires et tant d'adjuvants pour prier Dieu, Martines de Pasqually repond (non pas, me semble-t-il, sans une grande nostalgie et quelque amertume): Il faut bien se contenter de ce qu'on a.
Or, ce qu'on a, selon Martines de Pasqually, c'est le moyen de requérir l'assistance des bons esprits pour lutter contre les esprits pervers, par desopérations qui constituent, audelà de leurs formes partiellement variables, le culte permanent prescrit par Dieu à l'homme. Les prêtres de ce culte ont été désignés, depuis Adam, par des noms divers; ils ont été groupés en des sociétés aux structures et aux noms divers eux aussi. Leur lignée sans faille s'est perpétuee à partir du XVIIIe siècle et jusqu'à nos jours dans la secte mystérieuse que fonda Martines de Pasqually et que lui-même intitula: Ordre des Chevaliers Macons Elus Coën de l'Univers (Sur les Elus coëns et les néo-coëns,Cf. supra, Chap. I.). A cet Ordre, Saint-Martin a appartenu et l'on peut dire que, toute sa vie durant, Coën il fut et Coën il resta. J'entends Coën d'esprit et de coeur, Coën d'intelligence et de foi - mais non point de méthode. Plus exactement, il ne rejeta pas la méthode coën, mais, très vite, la transposa.
Non seulement, en effet, Saint-Martin ne s'est jamais proposé et n'a jamais proposé aux hommes d'autre but que la réintégration dont Martines de Pasqually lui a précisé la notion, fourni le terme, affiné le goût et excité le désir; mais, pour Saint-Martin comme pour Martines de Pasqually, la méthode, c'est la théurgie. Saint-Martin fait même une place aux vertus et aux puissances intermédiaires. Mais Saint-Martin estime que le travail avec et sur ces vertus et ces puissances s'accomplit au mieux dans notre intérieur; opération du coeur en un triple sens; travail de connaissance (l'oeil du coeur est l'organe de la science spirituelle); travail d'amour (le coeur est l'organe du sentiment); travail enfin des forces vitales intérieures liées au sang: imagination, paroles et gestes.
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Voilà en quel sens la voie tracée, suivie et signalée par le Philosophe Inconnu est dite interne (Saint-Martin) et cardiaque (Papus).
A intérioriser la méthode de Martines de Pasqually, Jakob Bohme ne pouvait qu'encourager Saint-Martin, et le Philosophus teutonicus, le cordonnier de Gorlitz (1575-1624), I'y encouragea en effet. Bohme fournit notamment à Saint-Martin l'idée extrêmement importante de Sophia, ou Sagesse divine. Cette idée permit à Saint-Martin de mettre au point sa doctrine relative au rôle des vertus intermédiaires et au bon usage qu'il sied à l'homme d'en faire. Car, d'une part, la Sophia exerce, tant en l'homme que dans le monde et devant Dieu, des fonctions que Martines de Pasqually (non par ignorance, croyait Saint-Martin, mais pour des raisons pédagogiques) avait attribuées à des classes différentes d'êtres invisibles. D'autre part, des épousailles de l'homme avec Sophia naît en chacun le Verbe, dont le lien avec les vertus intermédiaires se trouve ainsi renforcé. On comprend donc que, pour Saint-Martin, la démarche du théurge, mieux nommé désormais théosophe, conjugue le travail intérieur - sophiurge principalement - avec l'étude de la nature dont le symbolisme dévoile la Sophia qui l'anime. Cette démarche théosophique mène à l'initiation. Et même, en un sens, des son premier mouvement, elle est initiation. L'enseignement de Saint-Martin, issu des leçons de Martines de Pasqually et de la lecture de Bohme, confirmé et exalté par les réflexions et les expériences du Philosophe Inconnu, vise à initier l'homme. Pour résumer le sens de la voie qui, selon Saint-Martin, conduit à traiter heureusement notre grande affaire, écoutons Saint-Martin lui-même nous parler de l'initiation.
Il faut d'abord observer les premières applications du vrai sens du motinitier qui, dans son
étymologie latine, veut dire rapprocher, unir au principe; le mot initium signifiant aussi bien
principe que commencement. Et dès lors, rien de plus conforme à toutes les vérités exposées
précédemment, que l'usage des initiations chez tous les peuples, rien de plus analogue à la
situation et à l'espoir de l'homme que la source d'où descendent ces initiations et que
l'objet qu'elles ont dû se proposer partout, qui est d'annuler la distance qui se trouve entre
la lumière et l'homme, ou de la rapprocher de son principe en le rétablissant dans le même
éclat où il était au commencement (Tableau naturel..., op. cit., t. II, P. 235.")
Tel est le but, nous le savons. Quant au moyen, au moyen de l'initiation, voici:
La seule-initiation que je prêche, écrit Saint-Martin, et que je cherche de toute l'ardeur de mon âme est celle par laquelle nous pouvons entrer dans le coeur de Dieu et faire entrer le coeur de Dieu en nous, pour y faire un mariage indissoluble, qui nous rend l'ami, le frère et l'épouse de notre divin Réparateur. Il n'y a d'autre mystère pour arriver à cette sainte initiation que de nous enfoncer de plus en plus jusque dans les profondeurs de notre être et de ne pas lâcher prise, que nous ne soyons parvenus à en sortir la vivante et vivifiante racine. (Correspondance inédite..., Paris, Dentu, 1862, p. 322.)
3. L'Ordre martiniste.
Son enseignement initiatique, qui s'insère dans l'admirable tradition de l'illuminisme
chrétien, Saint-Martin le dispensa de bouche à l'oreille, tenant avec ceux et celles qu'il
jugeait initiables mainte conférence. Il le dispensa surtout par des livres qui n'avaient
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d'autre but, selon son propre voeu, que d'inviter le lecteur à laisser là tous les livres, sans
en excepter les siens. L'oeuvre écrite de Saint-Martin demeure la source vive, toujours
ouverte à tous quoique tous ne puissent toujours s'y abreuver, où puiser la doctrine du
Philosophe Inconnu.
Cette doctrine a, pendant le dernier quart du XVIIIè siècle et presque tout le XIXè siècle, guidé un nombre d'hommes et de femmes qu'on ne saurait chiffrer, mais qui semble plutôt sous-estimé d'ordinaire - d 'hommes et de femmes qui connurent Saint-Martin, soit par Saint-Martin lui-même en son corps de chair, soit par ses livres, soit par le truchement d 'un de ses amis, d'un de ses disciples, soit enfin par plusieurs de ces canaux à la fois.
Il parut intuitivement au Dr. Gérard Encausse (1865-1916) que, pour préserver le dépôt de la doctrine martiniste - où il avait senti qu'était préservé le trésor de l'illuminisme occidental -, pour en favoriser l'étude, la mise en oeuvre et la diffusion; il parut à Papus que la fondation d'un Ordre initiatique serait opportune et efficace. Aussi, de premières initiations individuelles eurent lieu en 1884; peu après, une première loge fut fondée; des cahiers d'instruction virent le jour à partir de 1887 et, en 1891, le premier Suprême Conseil est constitué, qui réunit les principaux occultistes de l'époque. Papus était lui-même Président de ce Suprême Conseil; il prit ensuite le titre Grand Maître. Or, de Papus à Philippe Encausse, son fils, la même conception s'est maintenue de l'Ordre en tant que société: Ne demandant a ses membres ni cotisation, ni droits d'entrée dans l'Ordre, n'exigeant non plus aucun tribut régulier de ses loges au Suprême Conseil, le Martinisme est resté fidèle à son esprit et à ses origines en faisant de la pauvreté matérielle sa première règle. [...] Par là, aussi, il a pu demander à ses membres un travail intellectuel soutenu, créer des écoles, distribuant leurs grades exclusivement à l'examen et ouvrant leurs portes à tous à condition de justifier d'une richesse intellectuelle ou morale quelconque, et renvoyant ailleurs les oisifs et les pédants qui pensaient arriver à quelque chose avec de l'argent. (Papus, Martinésisme, Willermosisme, Martinisme et Franc-Maçonnerie. Paris, Chamuel, 1899, pp.41-42.)
L'Ordre en question - il est utile de le souligner - était l'Ordre martiniste. L'épithète choisie par Papus, que sa polysémie induisit en confusion, avant d'apprendre à l'expliciter, l'épithète "martiniste" référait objectivement à Saint-Martin et Papus détachera de plus en plus cette référence. Pour nous, son sens est clair: l'Ordre martiniste a été placé, selon le désir providentiel de son fondateur et conformément à son instinct spirituel très sûr, sous le patronage et dans la mouvance ésotérique du Philosophe Inconnu.
Il est remarquable que la tradition de l'illuminisme chrétien où participe Saint-Martin ait
été corroborée, dans l'O.M., à partir de 1894-1895, par Nizier Philippe, dit "Maître
Philippe", dont Papus s'honorait de n'être que le "petit fermier". A M. Philippe, Papus, qui
avait été scientiste puis s'était adonné à la magie cérémonielle, dut d'entrer dans la
troisième phase - la plus haute certes - de son existence terrestre: La phase mystique au
seuil de laquelle il fonda l'Ordre martiniste. Et M. Philippe Le Maître Inconnu passe pour
être le chef, L'initiateur, L'apôtre presque invisble mais ardent d un grand mouvement
mystique qui, au-dessus des religions officielles et malgré leurs dogmes, circule en ce
moment parmi les nat">s'intéressa si fort à cette fondation qu'il conseilla même pour
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71 plusieurs détails d'ordre administratif et symbolique (pantacle et médaille vers 1898). Cf Reproduction du pantacle et de la médaille, pp. 166-167.)
Marc Haven, Sédir, Phaneg, Albert Legrand, que M. Philippe et Papus avaient engagés sur la voie cardiaque, soit directement, soit indirectement, ont, de même que M. Philippe et Papus eux-mêmes, rénové la présentation de certains aspects de la doctrine de Saint-Martin; ils ont développé plusieurs points de cette doctrine et leur enseignement a contribué et contribue à l'instruction des membres de l'Ordre martiniste. L'instruction initiatique, si l'on veut employer le mot propre, cette instruction initiatique, c'est la gnose. Saint-Martin dit très bien: L'Elu universel n'a été chargé, pendant sa manifestation temporelle, que d'apporter cette loi [ de la réintégration ] aux hommes et de la leur expliquer, mais non pas de l'exécuter sans le concours de leur volonté. Il lui suffisait donc de leur donner une idée juste de la Science divine et de leur apprendre que cette science n'est autre chose que celle des lois employées par la Sagesse suprême, pour procurer aux êtres libres les moyens de rentrer dans sa lumière et dans son unité.
De ces lois, nous avons tout à l'heure, dociles au geste de Saint-Martin, pris une vue
panoramique. D'un mot, rappelons que l'homme déchu, celui dont on peut dire avec
désolation Ecce homo, doit devenir - c'est le premier stade de l'éveil - I'Homme de désir; les
entreprises de l'Homme de désir le transformeront, par une vraie divinisation ou plutôt
une redéification, en Nouvel homme dont la mission sera d'assurer, en vue de la
réintégration universelle, le Ministère de l'Homme-Esprit.
Pour suivre ce progrès, il faut étudier la Nature, sanctuaire de la Sophia et, par elle, communiquer avec celle-ci. Il faut pratiquer les techniques qui, après que l'homme a - et s'il n'a pas qu'importe? - joué de son intelligence discursive, permettent d'obéir à l'injonction martiniste fondamentale: Faites place à l'Esprit. Il y a une technique de l'illumination et la voie cardiaque est une voie méthodique. La prière du coeur, dans l'hésychasme, commence par des recettes.
Dans l'accomplissement de ces tâches, qui ressortissent à la grande affaire de l'homme, L'Ordre martiniste a pour fin d'aider ses membres. S'il peut y parvenir, c'est grâce à sa fidélité à la doctrine de Saint-Martin et de tous ceux qui sont, dans l'ascendance et dans la postérité spirituelles de Saint-Martin, ses Maîtres passés.
Mais, en fin de compte, seule une facilité de langage autorise à parler de Maîtres dans l'Ordre martiniste: grands maîtres ou maîtres passés. Louis-Claude de Saint-Martin luimême n'est pas un maître, au sens fort. Car, en martinisme, il y a des guides très précieux mais il n'y a pas de maîtres; ou plutôt il n'y a qu'un Maître et ce n'est pas un homme: Ne vous faites point appeler Maître. Car vous n'avez qu'un seul Maître: et vous êtes tous frères. ()
Si les techniques et les recettes sont nécessaires sur la voie initiatique, et donc sur la voie
martiniste, il n'existe pourtant aucune technique infaillible, aucune recette totale et d'un
effet pour ainsi dire mécanique. La charitas, reflet de la grâce, appel de la grâce, la charitas
- qui est, selon qu'on voudra traduire, amour, amitié, charité - est primordiale: Quand je
parlerais les langues des hommes et celles des anges, si je n'ai pas la charitas, je ne suis qu'un
airain qui résonne, ou une cymbale qui retentit. Quand j'aurais le don de prophétie et
quand je connaîtrais tous les mystères et toute la science; quand j'aurais toute la foi jusqu'à
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72 transporter les montagnes, si je n'ai pas lacharitas, je ne suis rien. Quand je distribuerais tous mes biens pour la nourriture des pauvres, quand je livrerais mon corps pour être brûlé, si je n'ai pas l'amour, cela ne me sert de rien. ()
Or, cet amour inspire le désir de la connaissance et s'augmente par une connaissance accrue.
Cet amour-là allié avec cette connaissance-là, n'est pas la gnose, qui implique la fraternité
universelle et l'invention des symboles? Malheur à quiconque croira pouvoir connaître
Dieu par un autre moyen que par l'amour ! Comment arriver au sein des êtres, si ce n'est
par leur analogie? ()
A l'amour, que son amour a suscité, Dieu répond par l'amour. Grâce après grâce, grâce pour grâce.
En termes simples, car il s'agissait de lancer l'hameçon, Papus a excellemment suggéré tout cela et rien d'autre, quand il a qualifié ainsi son Ordre:
Dérivant directement de l'illuminisme chrétien, le Martinisme devait en adopter les principes. [...] L'Ordre dans son ensemble est surtout une école de chevalerie morale, s'efforçant de développer la spiritualité de ses membres par l'étude du monde invisible et de ses lois, par l'exercice du dévouement et de l'assistance intellectuelle et par la création dans chaque esprit d'une foi d'autant plus solide qu'elle est basée sur l'observation et sur la science. ()
Les Martinistes ne font pas de magie, soit blanche, soit noire. Ils étudient, ils prient et ils pardonnent les injures de leur mieux. ()
Accusés d'être des diables par les uns, des cléricaux par les autres, et des magiciens noirs ou des aliénés par la galerie, nous resterons simplement des chevaliers fervents du Christ, des ennemis de la violence et de la vengeance, des synarchistes () résolus, opposés à toute anarchie d'en haut et d'en bas, en un mot des Martinistes.)
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PROGRAMME DE TRAVAIL I. - DEFINITIONS.
Le martinisme est le système de théosophie composé par Louis-Claude de Saint-Martin et exposé dans ses ouvrages. Un martiniste, une martiniste est celui, celle qui reçoit ce système afin de l'étudier et de le pratiquer.
On nomme plutôt saint-martinien, saint-martinienne, celui, celle pour qui l'oeuvre de SaintMartin sert comme objet de seule étude - et donc l'étude où l'intellect seul s'emploie, puisque l'esprit ne sépare pas le raisonnement des autres demarches de l'existence. Car, voici le sens du martinisme: c'est un effort de tout l'homme pour soumettre tout l'homme à l'esprit, et, en fin de compte, lui laisser le champ libre. Or, I'esprit est l'étincelle de l'Esprit dans l'âme.
Martiniste signifie donc disciple de Saint-Martin. Quant a l'Ordre martiniste, fondé en 1891 sous ce titre par le Dr. Gérard Encausse dit Papus (), il forme une societé qui groupe des martinistes en vue d'un meilleur apprentissage du martinisme.
Le martinisme ne constitue pas une religion. Il ne se confond pas non plus avec cet ensemble de théories et de techniques, enracinées dans la loi des correspondances, qui, depuis Eliphas Lévi, affiche commodément le titre occultisme.
Par conséquent, la communauté des martinistes ne saurait, sans trahir le martinisme même, devenir, soit dans sa totalité, soit dans telle de ses fractions, ni une secte dogmatique et formaliste, ni rien qu'une école où s'enseigneraient les bases de la symbolique et les procédés de l'astrologie, de la magie et de l'alchimie. Mais le martinisme est doctrine d'initiation; d'initiation interne, l'adjectif, s'il manque, est toujours sous-entendu; d'initiation au vrai sens du mot initier qui, dans son étymologie latine, veut dire rapprocher, unir au principe ; de cette initiation capable d' annuler la distance qui se trouve entre la lumière et l'homme, ou de le rapprocher de son Principe en le rétablissant dans le même état où il était au commencement (). Le martinisme est un illuminisme et l'Ordre martiniste une société initiatique.
Dans la famille des doctrines d'initiation, d'illumination, le martinisme appartient au genre de l'ésotérisme chrétien, c'est-à-dire judéo-chrétien. Précisons: au genre de la théosophie chrétienne, ou judéo-chrétienne. Car la théosophie fait le fond des doctrines et singulièrement des doctrines juives et chrétiennes - de forme ésotérique. Invité par son Principe, I'homme de désir courtise la Sagesse divine pour l'épouser et l'engrosser du nouvel homme; il la presse, tant à la fine pointe de son âme que dans la nature.
Cette seconde démarche vise à identifier les cachets dont Sophia a scellé les mondes visibles et invisibles et que l'occultisme décrit et utilise, sans plus. D'autre part, les dogmes religieux n'ont point d'autre objet que l'affaire de Dieu avec l'homme; il importe au théosophe de les approfondir pour en goûter l'amande en son intimité. et de même quant aux rites: tâches ésotériques par excellence.
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Le martinisme, que la religion et l'occultisme concernent, pourra explorer les domaines adjacents du mysticisme et de la philosophie, dont maint état d'ailleurs ressortit à celui-ci ou à celle-là.
Par ses manifestations supérieures, le mysticisme ne diffère pas de la voie initiatique. Par d'autres, il la jouxte. Mais en d'autres encore - prenons-y garde - il déchoit à une sentimentalité pseudo-mystique. Examinez tout, avise l'Apôtre, gardez ce qui est bon. () La philosophia perennis peu ou prou se cache et quelquefois éclate, autant que chez certains mystiques, dans de nombreuses philosophies. Pythagore, l'inventeur, dit-on, de ce dernier vocable, l'entendait comme ascèse initiatique; Platon aussi, et Plotin, et les alchimistes opposés aux souffleurs; et Saint-Martin lui-même, quand il se targuait, par antiphrase selon son temps, de personnifier le Philosophe Inconnu, Philosophia ancilla theosophiae, sauf à être la théosophie même.
Ainsi le programme des travaux offerts au choix des martinistes se déploie sur une belle envergure. A chacun d'y puiser, selon ses goûts et ses talents, à son plaisir et à son profit. Le choix n'est pas décisif: le thème vaut moins que la méthode. Car sa méthode, invariable, qualifie le martinisme: elle est cardiaque. Au plan de l'ésotérisme, en poursuite de l'initiation illuminative, que Sophia incarne et cède à ses amants, le disciple de Saint-Martin opère toujours dessus son coeur, immédiatement ou médiatement, et toujours par lui.
Mais gare au contre-sens sacrilège: le coeur ne déclenche pas les larmes de Margot et des crocodiles, les émotions des hystériques, I'agressivité des imbéciles contre la Science et ceux qui y aspirent. Le sous-cortex suffit à la tâche.
Le coeur est l'organe de la Connaissance et de l'Amour indissociables, de la Gnose unifiante. Après m'avoir découvert à moi-même, le coeur révèle Dieu. Car le Dieu de Saint-Martin, le Dieu du martiniste, le vrai Dieu est celui de la connaissance, magnifié par l'amour et révélé par la connaissance intuitive. ()
Il. - TABLE DES MATIERES.
Les matières tu programme vont du plus général au plus particulier. Le plus général: parole de Dieu même. Ecriture sainte de la tradition judéo-chrétienne, dont l'hébreu est une langue sacrée. Le martiniste doit savoir de l'hébreu et nul ne parle de Dieu comme Dieu lui-même. Ridicule de vanter la Bible: le plus général est aussi fondement et exaltation.
Le plus particulier: martinisme au sens stricte. Louis-Claude de Saint-Martin: ses deux maitres - il faut les marier, recommandait-il - Martines de Pasqually, le premier, et le second, Jakob Bohme, balisant de trois lumières coruscantes la voie vers la Lumière. Ils apprennent la théosophie essentielle. Aussi, ils aident à expliquer et à comprendre la plupart des objets qui entrent dans la perspective théosophique et vont s'aligner sur notre table. Leurs écrits seront primordiaux parmi ceux qui viennent des hommes.
Tradition judéo-chrétienne. Du judaïsme, histoire et doctrine, aucun détail ne tombe hors
programme. Remarquer cependant, et très fort, les esséniens que Qumran a divulgués et la
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75 kabbale, forme juive de l'ésotérisme. (Je représente l'hébreu: oser parler de kabbale - que dis-je? y penser - sans savoir de l'hébreu vaut délire ou imposture). De l'ésotérisme chrétien, le martiniste privilégie un rameau, évidemment le martinisme. Mais confirment celui-ci d'autres rameaux épandus au moyen âge; sous l'espèce de l'hésychasme; au dix-huitième siècle (illuminisme au siècle des lumières); au dixneuvièmesiècle qui le mêle d'occultisme et où naît l'Ordre martiniste.
Histoire et doctrine du christianisme, de même que celles du judaisme et à meilleur titre, n'inflige nul temps mort au martiniste. Citons pourtant les Pères de l'Eglise: et les gnosticismes qui ramènent à l'ésotérisme (chrétien ou pas, c'est une autre affaire). L'étude de l'ésotérisme conçu dans son universalité et perçu dans quelques-unes de ses manifestations autres que martinistes, voire autres que juives et chrétiennes, fournit un cadre et des points de comparaison. Exemples: I'hermétisme et les sociétés secrètes (non point politiques, mais initiatiques).
Le moyen de l'ésotérisme consiste en la symbolique. Deux applications en sont très importantes: I'une, I'arithmosophie (ou symbolique des nombres); l'autre curieuse et entraînante, l'analyse du tarot.
Glissons vers l'occultisme dont la théorie générale (les correspondances analogiques) soustend l'astrologie, I'alchimie (qui, d'un point de vue, est aussi chemin d'initiation, yoga de l'Occident), et la magie rangée dans l'armoire des toxiques.
Remontons: la religion et les religions, avec une place à part pour l'islam. Comment un
judéo-chrétien méconnaîtrait-il qu'il surgit du tronc abrahamique? Religion et religions
introduisent le mysticisme.
La philosophie et les philosophes. Pour mémoire, et parce que la pensée authentique réfléchit ce qui est au-delà de la pensée; donc en témoigne doublement et y incite. Enfin le principal, leprincipiel, parole de Dieu aussi, la respiration de l'âme, par quoi tout commence et qui conclut tout: vie, action, pensée, ce programme même; enfin la prière.


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