Le
mystère de la Trinité. Louis-Claude de Saint-Martin
Voici un petit texte pour annoncer les sujets de réflexion qui occuperont
notre Cercle durant nos prochaines réunions.
Louis-Claude de Saint-Martin
Extrait de : " Dictionnaire mythologique, symbolique et étymologique,
contenant l'explication morale des principaux personnages de la Fable, la
clef de la Mythologie et un mot sur l'Origine de tous les cultes, par Dupuis
" In L'Homme-Dieu. Traité des deux natures, Jean-Baptiste Willermoz,
Ed. Diffusion Rosicrucienne, 2007.
ce qui distingue essentiellement le dogme du christianisme de ceux
des autres religions, c'est la manière de concevoir Dieu en trois
personnes, qui sont le Père, le Fils et le saint-Esprit.
On a déjà corrompu ce premier dogme en en faisant un mystère
incompréhensible, tandis que c'est la première leçon
qu'on donne aux catéchumènes, comme la première porte
pour entrer dans le christianisme et sans laquelle on ne peut pas le comprendre.
- le Christ n'a pas dit de faire de ce dogme un mystère ; au contraire,
il a dit instruisez-les et baptisez-les, au nom du Père, du Fils
et du saint-Esprit.
Le baptême, dans son principe, se nommait Illumination ; ainsi il
devait être une instruction lumineuse, spécialement sur la
Trinité, car on n'illumine pas un mystère et on ne fait pas
entrer dans une religion en cachant le point essentiel qui la constitue.
Avant le christianisme, on a admis un Dieu unique sous la dénomination
de puissance. Les chrétiens lui donnent le même nom en y ajoutant
le mot : Père ou Créateur, et en font une puissance créatrice
qu'ils nomment Dieu, le Père tout-puissant.
Une puissance seule et infinie dans l'immensité du néant ne
crée rien. Tout objet susceptible d'être créé
n'existe en elle qu'en puissance. Pour qu'elle se détermine à
créer, il faut qu'il émane d'elle une volonté ou un
amour qui l'incite à donner l'existence à une chose plutôt
qu'à une autre, et c'est cette volonté, cet amour, ce verbe,
cette parole arrêtée, que les chrétiens nomment Dieu
le Fils ou la seconde personne de la Trinité, distincte de la première,
quoique faisant unité avec elle, car on sait que la puissance n'est
pas la volonté et que l'une ne peut pas opérer sans l'autre
; ainsi les deux, quoique différemment personnifiées, ne sont
qu'un seul être.
La puissance et la volonté réunies peuvent créer un
monde composé d'une multitude d'objets qui pourraient former un chaos,
un désordre, une destruction des uns par les autres, une cacophonie,
etc. Il faut, pour qu'une création réponde au but du créateur,
qu'il émane de lui, par sa volonté ou son amour, un esprit
de sagesse, d'ordre, d'harmonie, etc., qui établisse l'accord entre
les objets créés, et c'est là ce que les chrétiens
nomment le saint-Esprit, du mot saint qui veut dire régulier, et
du mot esprit, qui signifie but, fin, etc.
Dieu est donc personnifié chez les chrétiens par la puissance,
l'amour et la sagesse.
La Trinité est si bien établie qu'elle est indestructible
par le raisonnement, car celui qui voudrait en nier l'existence la prouverait
par le fait même de sa négation. Il nierait parce qu'il aurait
la puissance de nier et qu'il en aurait la volonté, et en niant il
emploierait tout ce qu'il aurait de sagesse logique pour persuader, ainsi
il aurait agi par la puissance, la volonté et la sagesse, ce qui
est la Trinité, avec laquelle il exécute toutes ses actions,
comme étant l'image et la ressemblance de Dieu.
La seconde personne de la Trinité est l'esprit d'amour, que les chrétiens
appellent le Christ, celui par qui tout a été fait et sans
lequel rien de ce qui existe n'a été fait. Ils disent que
pour se communiquer aux hommes, il s'est incarné dans l'humanité,
afin d'y arrêter l'action du péché originel et nous
replacer da,s notre premier état de conjonction avec la toute-puissance
divine, dont nous sommes séparés.
Pour prouver l'effet de cette conjonction de l'homme par la religion de
l'amour, le Christ a opéré ses miracles et il a donné
pouvoir à ceux qu'ils observeraient d'en faire de pareil et même
de plus grands. Il a encore voulu qu'on reconnût ses ministres par
les prodiges qu'ils opèreraient en son nom et par leur amour les
uns pour les autres.
Voilà toute la religion chrétienne, telle que le Christ l'a
établie, et telle que ses premiers ministres l'ont observée,
prêchée et manifestée.